Je vous hais, espérant que vous ne parviendrez jamais au bout de cette lettre que j'ai composée tel un supplice, pour vos yeux, votre temps, et votre attention que je ne cherche même pas à obtenir, surtout pour quelqu'un d'aussi obtus, froid, insensible, sans aucun tact pour autrui, ne remarquant pas tout ce que je fais pour vous, comme la fois où j'ai fait nuit blanche pour que vous puissiez terminer votre travail urgent de la semaine dernière, et à la suite de laquelle vous nous aviez promis de décompresser dans un bar autour d'une boisson fraîche, dont je savais pertinemment que vous n'auriez pas touché la moindre goutte d'alcool, ni de toute autre chose d'ailleurs, ce qui est fort déplorable au vu de la relation que nous entretenons depuis toutes ces années où nous nous trouvons chaque matin assis face à face, et où je peux témoigner, inlassablement, de votre acharnement et résilience face aux événements, le regard focalisé sur vos longues notes et vos petits dessins, ce qui jusqu'à présent me convenait, mais qui cette fois, enfin, me donna cette idée extravagante d'insérer, parmi vos documents et à l'encontre de mes principes professionnels, ce papier dont le message vous sera nébuleux au premier abord, papier dont l'interprétation, vous connaissant si bien, n'ira pas dans le sens que je souhaitais originellement, et dont je m'empresse de lever toute ambiguité en écrivant le fond de ma pensée en toutes lettres, que vous lirez bien après mon départ : je vous aime.