Chapitre 10

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Flavy

Je l'entends partir, ses pas disparaissant dans le froid de la nuit.

Je ne comprends toujours pas la raison de ses venues. Cela me fait un peu de compagnie, c'est sûr, mais recevoir la pitié de quelqu'un... Je ne sais pas quoi penser de tout cela. En tout cas, elle m'amène de la nourriture, je ne vais pas m'en plaindre. Je la pense sincère lorsqu'elle dit ne rien savoir et vouloir m'aider. Son insistance est intrigante aussi. Je ne peux pas me permettre de donner des informations, et pourtant, à chacune de ses visites, à chacun mot qu'elle prononce, mon envie d'échanger avec quelqu'un d'autre s'accroît.

La faim est une chose, la solitude en est une autre. Je pensais avoir appris à supporter l'isolement, à me contenter du silence. Il faut croire qu'il y a être obligé de le supporter et vouloir le supporter. La première situation représente bien mon cas. Je n'ai jamais aimé être seule... Le fait que cette fille... qu'elle vienne et me parle comme si je n'étais pas qu'une simple prisonnière, une tâche venant nuire leur beau paysage... Vouloir m'aider ? Mais pourquoi ferait-elle cela ? Qu'est-ce qu'elle cherchait réellement ? Je ne sais plus quoi penser de tout cela.

La nuit passe doucement alors que je suis allongée, songeant à ma situation. Essayant de comprendre et de me souvenir de ma vie. Je connais mon prénom, mon âge et les caractéristiques de mon corps. Je connais mes goûts. Mais... beaucoup de choses m'échappent encore. Des bribes de souvenirs me parviennent, floues, en désordre.

Le matin vient rapidement et la matinée n'est pas si différente des précédentes. Je finis même par attacher un tissu aux barreaux pour limiter la luminosité. Ça ne tient pas très bien mais cela fera l'affaire.

Alors que je suis allongée, les yeux fermés sans bandeau, je me rends compte que je ne suis plus seule dans la pièce. Dans un sursaut, j'ouvre les yeux, me relève et me plaque contre un mur. Prête à en découdre, les poings serrés, le regard meurtrier bien que douloureux. Je dévisage l'homme qui se tient là, un sourire en coin. Cet homme...son visage me dit vaguement quelque chose, mais impossible de m'en rappeler.

– Faut croire que tu es suffisamment à l'aise ici pour que tu ne m'as pas entendu arriver. Rigole Owen, l'air de rien. Je suis venu pour te rendre une petite visite de courtoisie. Dit-il d'un ton léger, ses yeux pétillant d'une lueur amusée, peut-être même moqueuse.

Ses yeux, bien que magnifiques, me donnent l'impression d'être transpercée. Il m'observe et... c'est comme s'il cherchait à analyser mes moindres faits et gestes pour mieux me cerner.

– Je vois également que tu as bouché l'accès de ta fenêtre. Enfin, disons plutôt que tu as l'air de préférer être dans la pénombre. Dit-il en s'approchant de celle-ci. C'est pour cela que tu n'as pas ton fameux bandeau sur les yeux.

Lorsqu'il prononce cette phrase, je me raidie, me redressant et place mes poings devant moi, au niveau de ma poitrine. Une partie de moi bouillonne d'envie de lui demander de partir, mais mon esprit et ma gorge serrée me ramène à la réalité. Le poids des mots me retenant. Est-il ici pour me surveiller ? Me torturer dans l'espoir d'obtenir des informations ?

– Après ces derniers jours, je ne m'attendais pas à avoir de la visite. Lâchais-je enfin, le ton plus acide que je ne l'aurais voulu.

Mon regard ne le quittant pas, analysant chacun de ses mouvements. Lorsqu'il se retourne, son sourire finit par s'évanouir après un pouffement de nez. Les mains dans le dos, son visage devient sérieux.

– Je t'ai laissé du temps pour réfléchir et comprendre la situation dans laquelle tu te trouves. Dit-il. Maintenant, il serait temps de répondre à mes questions.

Un léger frisson monte le long de ma colonne. Il n'est pas ici pour plaisanter. Je me sens cernée, prise dans un jeu dont je ne connais même pas les règles, seulement les rôles. Je suis la souris et lui, le chat féroce.

– Que veux-tu savoir exactement ? Dis-je sèchement, soutenant son regard avec une férocité que je ne pensais plus avoir en moi.

L'adrénaline coulant dans mes veines réveille en moi une force combative. Un caractère de ma personnalité que j'avais oublié. Une étincelle d'amusement brille dans ses yeux avant de disparaître. Owen penche légèrement la tête, comme pour mieux jauger ma réaction.

Je ne me laisserai pas faire.

– Ah ! Enfin décidé à parler. Dit-il, un sourire en coin. Bien, commençons par le commencement. Qui es-tu ?

– Une femme, comme tu peux le voir. Répliquais-je.

Un soupir agacé lui échappe. Son ton se durcit, sa patience semble s'effriter.

– Ne joue pas à ça et réponds sérieusement. Je n'ai pas toute la journée. Quel est ton prénom ? Demande-t-il d'un ton plus sec.

– Flavy

– Très bien, Flavy. Et ton nom de famille ?

– Je ne m'en souviens pas, et ce n'est pas un mensonge. Rétorquais-je, le regard planté dans le sien.

Pas besoin de préciser combien cette question me pèse. Comment peut-on oublier son propre nom ?

– J'ai perdu la mémoire il y a de cela plusieurs mois. Ajoutais-je, ma voix légèrement tremblante malgré moi. Peinant à la retrouver.

– J'espère pour toi que ce n'est pas un mensonge. Rétorque-t-il, une pointe de menace perçant dans sa voix. Pourquoi étais-tu seule dans cette maison ?

Je reste silencieuse un moment, prenant le temps nécessaire pour choisir mes mots.

– Eh oh ! Reviens parmi-nous ! Son ton impatient me tire de mes pensées.

Je secoue ma tête, me raccrochant au présent. Il faut croire que je m'étais un peu trop plongée dans mes souvenirs.

– Désolée. Je n'étais pas seule au début... mais ils sont partis, jugeant qu'il valait mieux pour moi de rester là-bas.

– De quoi te souviens-tu ? Me questionne-t-il

– Précise ta question car sinon je te parlerais des repas que j'ai pu avoir, des livres que j'ai pu lire et d'autres petites choses.

A partir de là, j'appuie mon dos contre le mur, croisant les bras. Je ne peux pas sortir d'ici puisqu'il a dû fermer la porte à clef. L'attaquer, encore moins. Mon état ne me le permet pas.

– Tes yeux... Me questionne-t-il en montrant les siens, puis les miens. C'est pour ça que tu gardes le bandeau, en général. Qu'est-ce que c'est ?

Je m'attendais à cette question et malheureusement pour lui, il n'aura pas de réponse. Plus aucun mot ne sortira de ma bouche.

La tension monte dans la pièce. Jusqu'à ce que quelqu'un toque à la porte. Je reste figée, retenant ma respiration, le cœur battant, alors que le son des coups résonne dans la pièce. Owen, d'abord surpris, reprend ses esprits, tournant la tête vers la porte. Son expression change instantanément, comme s'il savait qui s'était. Ses yeux se mettent à briller d'une nouvelle lueur, mais son visage reste de marbre. Un nouvel élément vient perturber ma vie de captive.

Alors qu'il se dirige vers la porte, une voix de femme s'élève, ferme et assurée.

– Il faut que tu viennes. L'Alpha nous attend, et comme tu ne répondais pas à l'appel, je suis venue te récupérer.

Je sens que la situation échappe à son contrôle. Pour la première fois depuis son arrivée, son visage laisse transparaître une émotion réelle, celle du dépit, ou bien de l'angoisse. Je ne saurais réellement dire.

Son regard se pose une nouvelle fois sur moi et un grognement de frustration sort de sa gorge. Il finit par ouvrir la porte, me laissant entrapercevoir une magnifique femme rousse. Nos regards se croisent et la porte se referme.

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