Journal d’Un’mei, Reine de Casti
Ce matin je me suis levée avant l’aube, réveillée par un sentiment d’urgence mêlée d’angoisse, dans notre lit, Harrison dormait encore à poing fermé. Je n’ai pas eu la force de l’éveiller. Qu’aurais-je pu lui dire qu’il ne savait déjà, que d’ici quelques semaines tout au plus je vais congédier l’émissaire de l’impérium et refuser de me soumettre.
Une décision qui plongera on royaume, mes sujets, dans la guerre. J’ai fait ce choix en connaissance de cause, je sais ce que l’avenir nous réserve, où les courants de l’Ouhn nous mènent.
Ce matin, tandis que je regardais le soleil qui naissait comme dans les légendes, émergeant de l’océan éternel de Casti, je ne ressentais que le désir de fuir, de pleurer et de renoncer. Quel monstre peut ainsi sacrifier ses enfants ? Ce matin j’ai haï ma mère de ne pas avoir fait ce choix, tout en la comprenant avec une douloureuse acuité.
Non ! Je ne peux pas ! Je dois tenir la barre, trop de vies sont en jeu ! Maudit Akilesh et ses manigances !
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Minerva est de retour ! Elle s’est glissée dans les ombres des courants de l’Ouhn, ces tourbillons saumâtres où elle sait naviguer et attendre. Cette folle connait mon Don et comment s’y soustraire. Pourquoi ai-je hésité à l’époque ? Comme pour Aléna, j’ai laissé mon désir de les sauver prendre le pas sur la raison ! Le sang de leurs victimes est sur mes mains désormais.
Je dois m’assurer que ses actions ne sont pas liées à Akilesh, ce monstre tapis au-delà du voile me terrifie.
Aletheia ! Sa tante risque de la chercher, je dois la protéger, la mettre en sureté. Si seulement elle n’était pas si héroïque… Je refuse de sacrifier mes deux filles. Si tout se passe comme je l’ai prévu ma petite fusée vivra, j’espère de tout mon cœur qu’elle saura trouver le bonheur.
Aléna, je suis désolée de t’avoir fait souffrir, d’avoir brisé tes rêves… Si seulement j’avais été moins égoïste, si j’avais été une véritable amie. J’ai échoué avec toi, à te comprendre, à t’aimer, mais je n’échouerai pas à nouveau, pas avec Aletheia ! Si seulement tu pouvais la voir, elle est extraordinaire.
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Méty a découvert que Minerva a reçu un soutient de la part d’Hélios, cette information confirme donc mes craintes. Harison me connait trop bien, il s’est rendu compte que je savais qu’Hélios était au service d’Akilesh. J’ai dû lui expliquer la vérité concernant le Duc Hélios, grand de Casti et esclave du conseil d’Akilesh, un triste pantin que je me devais de sauver.
La détresse dans son regard, la façon dont ses épaules se sont affaissées, m’ont arraché une part d’âme. Je l’ai serré dans mes bras pendant que nous pleurions sur le sacrifice de nos enfants. Au petit matin, il était redevenu ce pilier, cette force qui me permet d’avancer. Mais nous savons tous deux que notre mort ne sera que justice pour nos choix.
Je ne me cacherai pas derrière le destin, le devoir ou d’autres excuses, ce sont mes choix et je les assumerai.
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Une enfant est morte, par ma faute ! Parce que j’ai laissé agir Hélios, parce que je crois comme une sotte qu’il n’est qu’une victime !
Ce monstre l’a tué elle et sa mère pour atteindre mes agents et cet étrange furet humanoïde. Il compte s’en servir contre moi, démontrer que je me fais vieille, mettre mes choix et mes décisions en doute lors des conseils. Après tout j’ai laissé venir un monstre alchimique ici même, je l’ai invité et il a massacré une famille.
Je sais qu’il a orchestré ce carnage, lui et les sbires de l’Impérium dévorés par l’ombre. Mais je n’ai aucune preuve, il a même influencé l’Ouhn pour masquer ses actes : une lecture des courants montrera Lucius le furet détective en coupable.
J’ai permis à Mety de fuir avant que la situation ne devienne intenable, elle dispose d’une escouade de commandos d’élite issus de ma propre garde. J’aimerais ne pas lui mentir, lui cacher la vérité mais elle refuserait d’abandonner Casti. Elle doit survivre et mener son équipe pour sauver Hélios, j’ai confiance en son empathie et sa bienveillance.
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Ce matin Han Sour, mon fils m’a contredit en public. Exprimant son désaccord avec force, il s’est positionné comme un va-t’en guerre. Ses attaques critiquant ma gestion du royaume, mes négligences sécuritaires se sont avérées plus douloureuses que prévu. Si j’ai souffert en sachant qu’il jouait la comédie, les grands de Casti et le peuple, tout comme l’Impérium n’y verrons que du feu.
Notre plan est en marche, j’ai semé les graines de la réussite, il reste à espérer qu’elles germent et que cela suffise. Je sais que mes choix sauveront le plus grand nombre, du moins leur offrirons une chance mais cela ne me permet pas de trouver la paix de l’âme.
Cela aurait dut être moi mère, pourquoi ne m’a tu pas sacrifiée ? Es-tu meilleure mère que moi, meilleure Reine de ne pas l’avoir fait ?
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