Chapitre 13 :
Iris s’installa côté droit, contre la vitre, à côté de Samuel. Où allaient-ils aller désormais ? Connaissant M. Past qui ne l’aimait pas, ils ne seraient sûrement pas envoyés dans le bâtiment de Cassandra et Kilian. Ils avaient sûrement créé un bâtiment exprès. Mais c’était étrange… Seul le bâtiment des surdoués avait été touché. Les autres étaient intacts. Iris se demandait bien pourquoi. L’issue souterraine la tracassait aussi. Pourquoi avaient-ils eu l’idée de la creuser ? Comment pouvaient-ils savoir que tout cela allait se passer ? Personne ne pouvait deviner ce qui allait se passer. À moins de l'avoir eux-mêmes organisé... Plus les jours passaient, plus tout cela devenait étrange. Très étrange. Quelque chose clochait forcément. Il y avait des secrets, et ils devaient les découvrir. Elle espérait qu’Amanda soit déjà en fuite. Elle ne se ferait pas emprisonner. Même si elle n’était plus là pour les aider, elle était là où elle devait être. Loin de Nicolas Past. À cause de la nuit mouvementée, Iris était un peu fatiguée. Mais l’angoisse d’aller dans un autre endroit prenait le dessus.
— Tout cela est étrange, déclara la jeune fille à voix basse à son voisin.
— Qu’est-ce qui est bizarre ?
La surdouée fit part de ses questions à son ami. Samuel reconnaissait que tout cela paraissait vraiment étrange, mais pour lui, ils verraient après. Ils devaient prendre le temps de se réinstaller avant. Le bus s’arrêta, et la bande de surdoués sortit du bus accompagnée de M. Past. Les enfants suivirent sans un mot de plus M. Past qui se dirigeait vers l’immense bâtisse. Kendra vint se blottir contre Samuel et Iris. La jeune fille tenta de rassurer la plus jeune, mais ce n’était pas une tâche facile. Kendra était totalement terrorisée, et c’était compréhensible. Une gamine de son âge, qui avait déjà perdu ses repères et son environnement une fois, la deuxième fois devait être beaucoup moins supportable. Iris se baissa pour murmurer quelques paroles à son oreille avant de faire leur entrée dans le bâtiment :
— Kendra, écoute-moi bien. Calme-toi. Ce n’est pas grave, on se verra. Si l’on est tous ensemble, reste avec nous. Si tu te retrouves avec quelqu’un du groupe, tu restes avec lui. Si tu es toute seule, ne t’inquiètes pas, il y a un moment où chaque aile se retrouve, donc on se retrouvera. D’accord ?
La petite fille hocha la tête, tremblante comme une feuille. Elle n’était pas vraiment convaincue par ce que lui disait Iris. L’aînée ne savait pas quoi lui dire d’autre, ni quoi faire pour mieux la rassurer. Elle aussi était inquiète. Aucun des surdoués ne savait comment cela allait se passer, c’était bien évidemment normal, mais très stressant pour eux. Un nouvel environnement s’ouvrait à eux, avec des personnes plus ou moins agréables. Mais ils ne voulaient pas être séparés. C’était tout. Tout ce qu’ils voulaient. Mais ils allaient nécessairement être séparés, c’était obligé, les adultes en décideraient ainsi. Car ainsi va la vie, la vie est cruelle avec certaine personne plus que d’autres. M. Past ouvrit la porte de l’énorme bâtisse. La bande de surdoués y entra sans s’y opposer. Mais l’entrée leur donnait le vertige. Il y avait comme d’habitude trois escaliers, mais la bâtisse était tellement haute qu’ils se doutaient forcément que d’autres escaliers les attendaient à l’étage. Les escaliers étaient séparés en ailes : ailes ouest, est, et nord. Il n’y avait pas d’aile Sud. Iris avait comme une impression de déjà-vue, elle y était déjà entrée dans ce bâtiment.
— Bon… Comme on est méchant selon vous, on a décidé de ne pas vous faire de visite. Enfin, j’ai décidé de ne pas vous faire visiter. On vous montre où vous êtes, et vous vous débrouillez tout seul ! Je vais vous donner votre aile, votre chambre et votre classe. Puis débrouillez-vous.
Les adolescents n’étaient pas vraiment rassurés. Le surveillant leur donna un papier à chacun.
Smarta Iris,
Aile Ouest, chambre 26 côtés fille, seconde 7.
Cela démarrait bien. Comme l’avait souhaité M. Past, les plus grands ayant des cours à l’université allaient très vite s’ennuyer. Iris s’en rendit compte en voyant qu’elle était ramenée en seconde. L’ennui allait être présent. Kendra avait été affectée à l’aile est, toute seule. Les autres essayaient de la rassurer, mais pas grand-chose n'y faisait. Iris et Samuel étaient tous deux dans l’aile Ouest, tous les autres étaient dans l’aile nord. La petite fille n’arrivait pas à arrêter ses larmes de couler. Iris les sécha et Samuel s’agenouilla près d’elle.
— Kendra… Ne t’inquiète pas. On se verra. Puis, il y aura peut-être des gens de ton âge. Tu pourras bien t’entendre avec eux aussi. Ne t’inquiète pas. Tu ne seras pas seule. Et tu seras forte.
La petite ne lui répondit rien et partit vers son aile. Les autres étaient déjà parties. Samuel se releva et se tourna vers Iris.
— On y va ?
Iris hocha la tête. Les deux surdoués montèrent l’escalier de leur aile. Ils se séparèrent dans des couloirs différents. Iris regarda sa montre, huit heures trente, à cette heure-là, les cours devaient sûrement commencer. La jeune fille arriva devant sa chambre. La porte n’était pas fermée. Quand elle pénétra dans la chambre, il n’y avait personne. Les deux lits superposés avaient l’air d’être occupés, la jeune fille s’installa donc à l’unique lit à une place qui était parfaitement fait. La surdouée se laissa tomber sur son lit. Une chose était certaine : elle n’irait pas déjeuner. Pas dans un espace inconnu, pas pour l’instant. La jeune fille regarda son emploi du temps. Son après-midi commençait à quatorze heures, par mathématique en salle E12. Iris pensa automatiquement à y aller plus tôt. Trouver la salle dans cet immense bâtiment n’allait pas être. La jeune fille se souvint du papier que lui avait laissé Amanda. Elle la sortit de sa poche, la déplia et la lut. Tout en continuant sa lecture, tout devenait de plus en plus confus dans sa tête.
Cher dirigeant du bâtiment spécial,
Pour ce qui est de la fameuse doctoresse, gardez-la à l’œil et tout se passera bien, nous en sommes convaincus. La phase 2 est terminée. Ne vous en faites pas, vous n’aurez plus à les surveiller tous ensemble en même temps réunis. Nous allons bientôt passer à la phase 3. Le changement se passera cette nuit.
N’oubliez pas d’observer leurs réactions.
Non… Non, cela ne pouvait pas être possible. C’était donc… L’État qui voulait détruire leur bâtiment ? Qui voulait les tuer ? Que voulait dire par phases deux et trois ? Quelle était la première ? Y en avait-il d’autre ? Certaines questions trouvaient quelques fragments de réponses, et d’autres questions envahissaient sa tête déjà assenée d’un tas de questions. Même si elle ne savait absolument pas où était sa chambre, la jeune fille partit dans le couloir des garçons dans l’espoir de trouver Samuel. Par chance, le garçon avait laissé la porte ouverte, et elle entra sans même toquer et referma la porte derrière elle immédiatement. L’adolescent, qui était en train de décharger ses affaires sursauta. Il en laissa tomber et se tourna vers l’entrée. Son visage s’apaisa quand il vit Iris.
— Espèce d’idiote ! jura-t-il. Tu pourrais ne pas me surprendre la prochaine fois ? Qu’est-ce qui t’amène ?
La jeune fille lui donna le papier en lui expliquant que c’était Amanda qui le lui avait donné avant qu’elle parte. Le jeune homme le prit, s’assit et le lut.
— C’est… Pour le moins étrange, conclut-il avec une pointe d'inquiétude. Je ne comprends pas pourquoi l’État aurait voulu détruire notre bâtiment au risque de tous nous tuer. C’est totalement stupide. Je ne comprends pas ce qu’ils veulent faire. Et je ne comprends pas leur histoire de phase. Que veulent-ils de nous ? Ils sont flippants ces gens.
— Au moins… On est d’accord sur cela. Je suis rassurée de voir que je ne suis pas la seule à me poser ces questions. Tout est si… Bizarre.
Les deux adolescents zappèrent le déjeuner. Ils ne voulaient pas rencontrer les autres élèves pendant la pause déjeuné. Mais l’idée d’être présentée en tant que nouvelle à sa classe, angoissait Iris de l'extérieur comme à l'intérieur. Elle n’avait jamais subi cela, elle n’avait fait qu’observer. Lorsque l’heure vint la jeune fille et son ami partirent en avance. Heureusement pour eux, ils pouvaient s’aider, ils étaient tous les deux dans les salles E. Finalement, en parfaits surdoués, les deux amis trouvèrent sans problème leur couloir. Devant la salle, Iris se sentait de plus en plus stressée.
— Calme-toi Iris, ce n’est pas la mort, tu vas survivre. Tu n’as aucune raison d’angoisser, lui assura Samuel pour la rassurer.
Le professeur ouvrit la porte, et un troupeau d’élève sortit d’un coup. Les autres suivirent rapidement. Le professeur intima à Iris de n'entrer que quand il ferait signe. Alors que tous ses futurs camarades entrèrent, la jeune fille reconnut Fred. Pourquoi cela ne pouvait pas être Kilian et Cassandra, pensa la surdouée. Alors que la porte se ferma, Iris se sentit submergée par l’abandon. Quand, soudain, quelques minutes plus tard, la porte se rouvrit. Le « entrez » très fort du professeur ordonnait irrémédiablement l’entrée d’Iris. La jeune fille s’arrêta aux côtés du professeur et puis observa les autres qui faisaient de même avec elle.
— Iris est une surdouée. Normalement, ils ont un bâtiment à part, mais il a été détruit par l’ennemi. Ils ont donc été placés dans notre bâtiment pour une durée indéterminée.
Le professeur lui désigna une place, qui, était pour le moment isolée. Lors de l’appel, qui consistait juste que le professeur regarde l’ensemble de la classe, deux élèves étaient absents. Et ce fut un quart d’heure plus tard que ces derniers firent leur apparition. Quand on toqua à la porte le cours fut comme arrêté. Iris ne savait pas si c’était une chose habituelle, le silence avait beau être présent, seul elle et l’adulte regardait la porte qui n’était pas encore ouverte. La porte s’ouvrit enfin sur deux adolescents. Une fille et un garçon, qui à première vue avaient bien rigolé juste avant le cours. Iris n’eut pas le temps de voir leur visage
— J’en ai plus qu’assez ! Cette fois cela suffit. Si vous arrivez encore une fois aussi en retard, je prendrai les mesures nécessaires pour que vos punitions soient plus que la plonge ou le balayage du sable dans la cour !
La discipline était d’ordre ici. Mais les punitions avaient l’air plus facile que celle de l’autre bâtiment. Elles ne seraient peut-être pas aussi violentes que celles de M. Past, cela ne l’enverrait sûrement pas à l’infirmerie.
— Bon… Maintenant vous allez à vos places. Les vraies et non à côtés l’un de l’autre !
Les deux adolescents qui venaient d’entrer ne respectaient visiblement pas toutes les règles. Des délinquants ? Iris fut surprise que Fred n’adopte pas leur attitude de rebelle. Lui, qui avait si souvent fait le rebelle. Iris ne comprit d'ailleurs pas l'expression inquiète sur le visage de son ancien ami. La surdouée essaya de voir qui étaient donc les deux élèves, mais avec le professeur, cela lui était impossible. Mais quand il se décala, elle les vit. Elle le vit, la vit. Elle fut si… Submergée d’émotion ! La jeune fille était heureuse de le voir, de la voir aussi ! Les larmes lui picotaient les yeux. Et elle se retint de toutes ses forces pour ne pas se lever, crier leurs prénoms et les prendre dans ses bras. Physiquement, il n’avait pas changé, le même sourire, le même visage, les mêmes yeux. Mais pas son attitude. Car Iris savait que ce n’était pas dans les habitudes de son meilleur ami. La jeune fille à ses côtés n’avait pas changé non plus. Cassandra ne regarda pas et vint s’asseoir à sa place au fond de sa classe. Lui, Kilian, resta immobile, fixant sa meilleure amie la bouche mi-ouverte.
— Kilian ! À votre place immédiatement et je ne veux pas vous entendre parler ! cria le professeur.
Le garçon jeta un regard assassin au professeur avant de s’asseoir au côté d’Iris. La jeune fille n’osait pas y croire. La jeune fille regarda autour d’elle et tapota le bras de son ami pour s’assurer que ce n’était pas un rêve. Que c’était bien réel. Kilian se tourna vers elle, un sourire mi-moqueur, comme au bon vieux temps. Ils n’avaient pas vécu la même chose, mais ils se comprenaient toujours autant.
— Tu tâtes mes beaux muscles ? murmura-t-il.
— Je… (elle se rendit compte de ce qu’il venait de dire, ce qui la fit sourire). Je voulais vérifier si tout cela était vraiment réel. Toi et moi, ici, réuni, Cassandra aussi… C’est magnifique.
Kilian parut un peu surpris par les dires de son amie. Il n’avait pas dû autant souffrir de la distance qu’elle. Avant qu’il n’ait pu rajouter quelque chose, Iris entoura son cou d'un de ses bras et posa sa tête sur une de ses épaules. Cela lui faisait tant de bien de se retrouver ! Elle en rêvait depuis un moment. C’était bien réel. Pendant le reste du cours, Iris passa son temps à observer ses deux amis, Cassandra et Kilian. La jeune fille n’écoutait pas le cours. Cela ne lui servait à rien. Quand la sonnerie sonna, plusieurs élèves sortirent rapidement. Les autres se levèrent tranquillement.
— Iris !
C’était Cassandra qui venait de crier. La jeune fille se jeta dans les bras de la surdouée. Kilian se joint à leur câlin.
— J’ai tellement de choses à vous dire, murmura Iris.
Alors qu’ils rangeaient leur sac, Iris leur parla d’abord des autres surdoués, pour éviter qu’ils ne soient surpris si Samuel l’attendait à la sortie de la salle. Eux aussi s’étaient faits d’autres amis. Normal, arrivé dans un autre milieu, il faut bien socialiser. À la sortie, effectivement, Samuel l’attendait.
— Attends je parie, Kilian et Cassandra ? N’est-ce pas ?
— Gagné. En même temps ce n’est pas très difficile Sam !
Kilian et Cassandra, connaissant le bâtiment sur le bout des doigts, les guidèrent jusqu’à la récréation pendant que les deux surdoués racontèrent ce qui leur était arrivé dans leur bâtiment. M. Past, Amanda, les punitions, les soupçons, la nuit, l’association secrète, la lettre de Marin, le coup de fil des parents d’Iris. Tout. Les deux autres écoutaient de plus en plus surpris. Plusieurs rumeurs couraient dans le bâtiment sur l’espace dédié aux surdoués, sauf que s’était très éloignée de la réalité. C’étaient des rumeurs trop simples. Comme quoi ils avaient de meilleures conditions qu’eux, ou qu’ils ne travaillaient pas. Mais la réalité était tout autre. Elles avaient été créées de toutes pièces à partir de mots qu’avaient laissé échapper les adultes de l’établissement. Mais rien de ces dires était la vérité. Aucun.
— Mais qu’est-ce qu’ils voudraient exactement de vous ? demanda Cassandra.
— C’est bien ce que l’on se demande. C’est ce que l’association cherche aussi à comprendre : notre présence.
— Et Marin ne t’a pas donné plus d’informations sur l’extérieur ? voulut savoir Kilian.
— Non, il a juste dit que des bombes tombaient du ciel tous les jours. Que Thuath et Siar nous ont déclaré la guerre, mon immeuble a failli y passer. C’est tout ce que je sais. Après, j’en connais un peu plus sur l’association, mais je vous expliquerais plus tard. On n’est pas dans un endroit adéquat. Est-ce qu’il y a des caméras et des microphones dans votre bâtiment ?
— Bien sûr que non ! s’exclama Kilian qui était totalement surpris à l’idée que les adultes puissent les observer de la sorte. Pourquoi cette question ?
— Parce que notre bâtiment en était bourré. Surtout dans la chambre d’Iris, répondit Samuel.
Sous le choc, Kilian et Cassandra s’arrêtèrent pour dévisager leur meilleure amie.
— Je les ai toutes arrachées, ajouta-t-elle.
— Arrachées ? Tu les as explosées tu veux dire ! Tu les as jetées violemment par terre et écrasées avec les pieds tout en les envoyant valser plus loin.
— Cela ne m’étonne pas de toi, commenta Kilian en passant son bras autour des épaules de son amie.
Iris était heureuse. Cela faisait tellement de bien de retrouver ses deux amis. De retrouver Kilian. Pas qu’elle n’aimait pas les autres, au contraire, les autres surdoués étaient devenus comme sa famille. Une famille où elle se sentait véritablement bien. La récréation du bâtiment était beaucoup plus grande que son ancien bâtiment.
— On va vous présenter nos deux potes, déclara Cassandra avant de s’éloigner.
— Ils ne sont pas dans votre classe ? questionna Iris en prenant une main de Kilian dans la sienne.
— Ce sont mes compères de chambres. Tu sembles inquiète, remarqua le garçon.
— Parce qu’il y a beaucoup de choses dans ma tête.
— Cela, on le remarque vite, commenta Samuel avec un sourire.
Iris sentit une emprise autour de sa taille. La jeune fille lâcha la main de Kilian et baissa la tête pour regarder.
— Iris ! Tu es là. C’est trop dur ! s’égosilla la petite fille.
Kendra. Iris sourit et se baissa pour la serrer dans ses bras.
— Kilian, je te présente Kendra. C’est la plus jeune des surdoués.
À l’entente du prénom de Kilian. La petite fille lança un regard narquois à Iris qui ouvrait la bouche pour dire quelque chose. Mais elle ne trouva rien à dire, mais elle avait peur que Kendra ne fasse ses remarques sur son lien fort qui l’unissait à Kilian. Elle voulait éviter cela à tout prix, cela risquait d’être gênant. La petite fille se retourna, et fit un sourire splendide à son interlocuteur qui la dévisageait. Mais elle ne dit rien, Iris en fut un peu soulagée.
— Comment cela se passe pour toi ? voulut savoir Iris.
— Horrible… Mes camarades de chambre sont horribles et se moquent de moi. En plus ils sont stupides. Je n’ai pas d’amis dans ma classe, ce sont juste des sans cerveaux. Je veux partir.
Iris soupira, et se baissa pour être à la hauteur de la petite fille.
— Écoute… On doit rester ici notre bâtiment a été détruit. Où voudrais-tu que l’on aille ? On est sous la responsabilité de l’État. Si l’on s’était échappé, les hommes de l’État seraient à notre recherche.
— Même si on allait à l’association ?
— Surtout si l’on allait à l’association. Est-ce que tu pourrais rassembler les autres s’il te plaît ?
La petite fille hocha la tête et se faufila dans la foule. Kilian fronça les sourcils et mit une main au-dessus de ses yeux. Il prit le bras d’Iris pour l’attirer vers lui, l’empêchant soigneusement de se dégager.
— Un problème ?
— Cassandra a aussi ramené Greg… Je ne l’aime pas celui-là. Et je ne rigole pas, tu n’a pas intérêt à traîner avec lui, Cassandra ne veut pas m’écouter. Tant pis pour elle.
Iris serra à son tour le bras de son meilleur ami. Si Kilian ne l’aimait vraiment pas, c’est que c’était une personne plutôt très mauvaise. Comment Cassandra pouvait-elle traîner avec lui ? Iris en tirerait cela au clair. Cassandra arriva, avec trois garçons qui la suivaient. Un était à ses côtés, les deux autres derrière. La surdouée repéra tout de suite celui dont Kilian se méfiait. Un grand qui avait sans doute redoublé et devait être plus âgé d’un an, il avait l’air idiot et posait son regard orgueilleux et prétentieux sur Iris, un sourire malicieux aux lèvres. Il était dans leur classe. Samuel avança d’un pas, il était méfiant lui aussi. Les deux garçons encadrèrent Iris comme des gardes, ce qui enflamma ses joues.
— Pourquoi as-tu ramené Greg ? voulut savoir Kilian sur un ton un peu trop agressif.
— Greg est gentil, affirma Cassandra. Greg, voici Iris, mon amie surdouée.
Le garçon vint lui faire la bise, ce qui prit Iris par surprise. Elle réprima un tressaillement. Kilian fronça les sourcils, lançant un regard noir à Greg. Ce dernier lui fit une tape amicale à l’épaule et y laissa sa main. Il fit un sourire à Kilian. Celui-ci n’en fit aucun. Il ne voulait pas rigoler avec Greg, il ne faisait pas confiance à ce garçon. Si Kilian ne lui faisait pas confiance, alors Iris non plus. Kilian l’éloigna de lui mais prit sa main. Greg les observa en fronçant les sourcils.
—Vous êtes ensemble ? demanda-t-il.
— Non ! s’écrièrent les meilleurs amis, leurs deux voix unies.
Cassandra laissa échapper un petit rire tout comme Samuel même si ce dernier semblait un peu perturbé sans qu’Iris ne puisse savoir par quoi. Greg et les deux autres les dévisagèrent bizarrement. Kilian et Iris ne comprenaient jamais pourquoi on les pensait en couple. Ils ne l’étaient pas, ils étaient juste amis. Cassandra s’approcha aux côtés de Greg et entrelaça ses doigts avec ceux du garçon. Iris comprit tout de suite ce que voulait dire Kilian concernant Cassandra qui ne voulait pas l’écouter. Greg et Cassandra étaient en couple. Cassandra comprit que son amie avait compris, mais comme pour lui montrer, elle embrassa longuement le garçon. Iris sentit que Samuel n'avait qu'une envie: s'éloigner. Elle lui lança un regard désolé, navrée pour lui.
— Voici Liam, présenta Cassandra.
C’était le garçon à sa droite, il était de taille moyenne, blond aux yeux bleus. Il paraissait assez renfermé mais très sympa. L’autre garçon se prénommait Charles, il était brun et plus petit que son ami. Lui, paraissait plus social. Un tout petit peu plus. Ces deux-là semblaient soudés et corrects. C’était eux que Cassandra devait amener. Pas Greg. Voyant bien que Kilian ne désirait pas être en la présence de Greg, la jeune fille partit avec son petit ami.
— Tu pourras lui parler s’il te plaît ? demanda Kilian à Iris.
— Bien sûr, déclara cette dernière en hochant la tête.
La jeune fille regarda les deux amis de son meilleur ami avant de leur tendre sa main.
— Moi c’est Iris, se présenta-t-elle. J’étais dans le bâtiment des surdoués mais il a été détruit.
Les deux garçons lui serrèrent la main en se présentant avec quelques mots même si Cassandra avait rapidement fait leur présentation. Au loin, la surdouée vit Kendra revenir avec toute la troupe des surdoués. Un sourire se dessina sur le visage d’Iris, elle tourna la tête vers Kilian et lui prit la main.
— Prêt ? Tu vas rencontrer le reste de la bande des surdoués.
Le reste du groupe fit connaissance avec Kilian. Aucun d’entre eux n’avait encore rencontré leur voisin de chambre. Sandra et Lilian étaient dans la même classe, les jumeaux et Kendra aussi. Iris et Samuel firent part de leur découverte concernant la lettre de l’État. Il n’y avait plus aucun doute, ils n’étaient pas ici pour faire tache dans l’environnement, les adultes attendaient quelque chose d’eux. Surtout, de la part des surdoués. Et ils devaient trouver un moyen de donner cette lettre à un membre de l’association secrète. Amanda avait peut-être jugé bon de leur donner pour qu’ils réfléchissent grâce à leur quotient intellectuel. Mais les adultes avaient encore plus de temps devant eux pour y réfléchir. Enfin, il y en avait sûrement qui avait le temps. La fin de récréation sonna, et le groupe dut se séparer.
Pendant le cours suivant, Iris s’ennuya à mourir. Elle était à côté de Greg. Kilian les surveillait du regard. Le garçon essayait de lui parler, mais Iris l’ignorait brillamment. La surdouée préférait réfléchir au futur. Elle devait déjà parler à Cassandra de son copain. Copain qui déjà, commençait sérieusement à l’agacer à lui donner envie de lui mettre une gifle. Greg l’avait bien compris, mais rien ne semblait l’arrêter.
— C’est parce que ton petit Kilian ne m’aime pas que tu m’ignores ? Ce n’est qu’un bon à rien, Cassandra a bien fait de s’éloigner un peu de lui. Elle ne devrait plus le voir. Prends exemple sur elle.
Comment réussir à garder le contrôle après cette phrase ? Iris ne savait pas vraiment, mais elle réussit. Pourtant, elle avait envie de lui hurler à la figure et de préparer ses mains, ses bras et ses jambes. À la place, elle serra les poings, son regard s’assombrit, elle se crispa et regarda droit devant elle. Si elle regardait Greg, elle n’arriverait pas à se contrôler. Kilian avait immédiatement remarqué que ce qu’avait dit Greg la mettait en rogne. Il connaissait Iris par cœur depuis des années, elle n’avait pas changé. Il pouvait pratiquement anticiper ces réactions, même les plus inhabituelles et surprenantes. Cassandra le remarqua juste après. Greg lança une nouvelle pique.
— Déjà tu ne me donnes pas d’ordre. Retire immédiatement ce que tu viens de dire. Kilian est la meilleure personne du monde. Tu manipules Cassandra comme si tu étais un joueur jouant son personnage de jeu vidéo. Cassandra est très influençable, et je ne te laisserai pas la monter contre Kilian et moi aussi facilement. Maintenant, arrête de me parler j’écoute le cours, souffla-t-elle méchamment.
Iris repartit dans ses réflexions. Que pouvait-elle bien faire ? La jeune fille avait toujours voulu découvrir pourquoi il y avait cette guerre pour l’arrêter une fois pour toutes. Mais elle n’était pas idiote, ce n’était pas elle, Iris Smarta, surdouée de seize ans qui allait instaurer la paix dans le monde tout entier et entre les clans après des décennies de guerre. Sauf que c’était tout de même une tâche qui lui tenait vraiment à cœur. Elle pouvait au moins essayer de découvrir les raisons, et aussi pourquoi cette guerre perdurait.
— Mais chérie, tu es super-intelligente, tu as déjà passé cette classe, et toutes les autres d’ailleurs. Tu n’as pas besoin d’écouter. Et moi, je m’en fiche, d’ici un an, je ne serai plus ici. Dès que l’on est majeur on quitte ce foutu désert. Donc je m’en fiche. On peut parler. Et je veux parler.
Iris sentit que le garçon allait être de plus en plus insistant. Elle se mordilla la lèvre inférieure, cherchant à s’effacer de tout cela. La jeune fille devait impérativement parler à sa meilleure amie. Cassandra ne devait pas rester une seconde de plus avec cet imbécile. Elle devait l’éloigner le plus tôt et rapidement possible de ce garçon. Greg la manipulait pour mieux l’isoler des autres.
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