Chapitre 11

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Avec Simon, nous avons longuement discuté. Je lui aie raconté mon enfance, ma vie en Bretagne chez nos grands-parents. De son côté, il m'a parlé de ses différends avec Nate quand ils étaient plus jeunes tous les deux, du temps qu’ils ont mis avant de s’apprécier. Il s'est confié sur sa mère, qui est la personne dont il est le plus proche, et du fait qu'elle s'est beaucoup sacrifiée pour lui. Il m'a également parlé de notre père qui a tout fait pour faire partie de sa vie, bien que sa mère soit contre, car elle estime qu'il n'a rien d’une figure paternelle. Tu m’étonnes ! Rien qu’à voir le peu d’hésitation qu’il a eu à se débarrasser de sa propre fille on ne peut pas considérer Samuel comme le père du siècle.

Nous avions tellement de choses à nous dire que nous n'avons pas vu les heures passées et ce n'est que lorsque Elodie est rentrée que l'on a pris conscience du temps qui s’était écoulé.

- Oh ! Cara, tu ne m'avais pas dit que tu passerais, je serais rentrée plus tôt, me confie-t-elle surprise par ma présence.

- J'avais besoin de parler à Simon, avoué-je à mon amie.

- Ah bon ?

Elle semble perplexe alors que son regard vacille entre Simon est moi. Je n’ose à peine imaginer les pensées qui se bousculent dans sa tête.

- Cara est ma sœur, la rassure Simon, alors que le regard de la jolie blonde commençait à se durcir.

La surprise se lut instantanément sur sa tête et elle lâcha les deux poches qu’elle tenait dans ses mains.

-Quoi, mais... Mais c'est génial. Je suis tellement contente que vous vous soyez retrouvé.

Elle sautille sur place telle une petite fille le jour de Noël. Je n'aurais jamais pensé cela possible. D'un coup, elle s’arrête et réfléchit.

- Attends ! Alors cela signifie que tu es la jumelle de Nate ?

Je hoche la tête en guise d’approbation et un air de dégoût vient se poser sur son visage.

- Et moi qui ai tenté de te pousser dans ses bras ... Beurk...

Avec Simon nous rigolons devant sa mine écœurée.

Le reste de l’après-midi se passe avec tant de légèreté que j’en oublie la confrontation que j’ai eu plus tôt avec Nate. Après tout ce que Simon a pu me raconter le concernant, je me dis qu’il ne sert à rien de brusquer les choses.

Il fait presque nuit quand je rentre finalement chez moi et que je retrouve un Mathieu inquiet de ne pas avoir eu de mes nouvelles de tout l’après-midi. Je le rassure et lui raconte les différentes conversations que j’ai eu avec Nate et Simon. Je me demande qui de nous deux est le plus heureux de ce dénouement inattendu. Sincèrement, j’ai parfois l’impression que toute cette histoire le concerne plus que moi-même tellement il s’est impliqué. Je n’aurais jamais assez de toute une vie pour le remercier de cet ami fantastique qu’il est pour moi.

C’est finalement en compagnie de NEXTFLIX que nous finissions cette journée, avec un marathon de la série DYNASTIE. Je vous rassure, ce n’est pas moi qui ai choisi. Après quelques épisodes, la fatigue me gagne et retrouve mon lit avant de m’endormir sur le canapé.

Le lendemain, au réveil, je suis encore sur mon petit nuage. Même si je me rappelle que ce n'est pas gagné avec Nate, je sais maintenant que je vais pouvoir compter sur le soutien de Simon. Et ce n’est pas négligeable !

Nous sommes en plein ménage avec Mathieu lorsque l'on tambourine à la porte. Vu que nous sommes dimanche et que nous avons mis la musique un peu forte, je suppose qu'un voisin vient se plaindre du bruit. Lorsque j'ouvre la porte prête à m'excuser, je m’attendais à tout sauf à la personne qui me fait face : mon père est là ! Cette rencontre me terrifie, mais je ne laisse rien paraître.

- Oui je peux vous aider ? Demandé-je innocemment en faisant semblant de ne pas avoir reconnu mon interlocuteur.

Mon comportement l’agace et il ne se prive pas pour me le faire remarquer.

- Ne joue pas à ce jeu avec moi Cara, aboie-t-il d'un ton sévère comme pour m'intimider. Qu'est-ce ce que tu fous ici ?

Tout au long de ces années, je me suis tellement préparé à lui faire face, qu'il a beau être en colère et vraiment menaçant, il ne me déstabilise en aucun point. Je prends un air niais et je lui réponds :

- Je fais le ménage pourquoi ? Vous voulez peut-être que l’on baisse la musique ?

Une remarque stupide, qui ne fait qu’accroître sa fureur. Je sors sur le palier et ferme la porte derrière moi. Mathieu n’a pas besoin de savoir que je suis en train de me quereller avec mon géniteur.

- Ne joue pas à ça avec moi ! réplique-t-il en postillonnant. Je sais que tu me reconnais, je le vois dans ton regard ! Alors maintenant tu vas me dire pour quoi tu es revenu.

Il a beau me faire peur, je ne fais pas profil bas pour autant. J’ai toujours été comme ça, quand l’adrénaline monte en moi j’explose et, au lieu de me taire, je me crée des problèmes. Au collège Mathieu m’appelait même « la machine à problème ». Un jour ou l’autre, mon affront me causera ma perte.

- Paris offre les meilleures universités, un tas d’étudiants viennent chaque année en profiter alors je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas mon cas !

Son regard me glace le sang mais je ne faiblis pas, au contraire je le défis.

- Ne me prends pas pour un con Cara. Il y a des tonnes de bonne fac en France et tu es venu spécialement ici. Avoue tes intentions, hurle-t-il en perdant patience.

Ses yeux noirs me sondent mais je ne détourne pas le regard pour autant. Il veut la vérité, alors la voici.

- Je suis ici pour retrouver mes frères. Ceux avec lesquels tu m'as empêché de grandir et d'avoir des liens. Je suis venue retrouver ma vie et ma place ici. Et tu ne pourras plus m'en empêcher.

J'ai effectué ma tirade sans le quitter des yeux. À ces mots il m'attrape par la gorge et me plaque contre le mur.

-Je t'ai éloigné une fois, je peux tout à fait recommencer, Cara, crache-t-il alors que son visage n'est qu'à quelques centimètres du mien. Seulement, je vais te laisser une chance d'être plus maline. Pars de toi-même ou tu le regretteras. Et si tu t'approches des garçons, je promets de détruire ta vie, tu as compris ?

Il me relâche juste à temps avant que Jonathan, qui arrive de l'extérieur, ne nous surprenne. À en juger par sa tenue, il est parti courir.

- Souviens-toi de cette conversation, dit mon père le doigt pointé sur moi. Fais ce que tu as à faire et vite !

Puis il s'en va, me laissant seule avec mon voisin. L’adrénaline redescend aussi vite qu’elle est montée et mes jambes commencent à flageller. Si mon voisin n’était pas en train de me détailler de la tête au pied, essayant de comprendre la scène dont il vient d’être témoin, je me serais déjà effondrée.

-Tout va bien Cara ? s'inquiète-t-il.

- Oui, ne t’en fait pas ! Je mens pour ne pas avoir à fournir d’explications. Juste une petite querelle avec un voisin.

Ma réponse ne semble pas lui suffire et, en moins de deux pas, il traverse le palier et je me retrouve nez à nez avec lui. Il est si près que je sens son souffle contre mon oreille ce qui a le don de remobiliser tous mes sens. Ses deux yeux d’un marron intense me sondent et ne cesse de faire des allers-retours entre mes yeux et ma bouche. Mes pensées sont complètement embuées et ma capacité à réfléchir à littéralement disparue. J’oublie absolument tout ce qu’il vient de se passer et la seule chose que je souhaite, là, maintenant, c’est un peu de réconfort. Alors que j’allais m’écraser contre ses lèvres, il me repousse brusquement.

- Attends, c'est quoi ça ?

Il s’attarde sur ma gorge et semble analyser quelque chose en effleurant mon cou de ses doigts. Ses yeux horrifiés ne présagent rien de bon.

- Cara qui était ce type ? S'énerve-t-il subitement, sans pour autant me laisser répondre. C'est lui qui t'a fait ça ?

Il montre du doigt l'escalier par lequel est descendu mon père. Son regard est à la fois dur et protecteur, ce qui ne me réconforte que peu mais m’incite à me confier.

- Cet homme était mon père ou plutôt mon géniteur car il n’a rien d’une figure paternelle si tu veux mon avis, commencé-je les yeux rivés au sol. Il est venu pour me menacer afin de précipiter mon départ. Il semblerait qu’il ne soit pas ravi de revoir sa « petite fille chérie ».

Oui j’ironise la situation mais c’est ça ou je fonds en larmes. Ce que je n’avais pas prévu c’est que Mathieu débarque en plein milieu de mes explications. Sans même le voir, je sens sa présence dans mon dos et, il paraît quelque peu tendu.

- Non, ce n'est pas possible ! Dit-il surpris, en me faisant pivoter pour mieux me prendre dans ses bras. Je trouvais que tu mettais du temps sur le palier, mais je pensais simplement que tu étais avec Jonathan ou encore à t'engueuler avec un voisin, se justifie-t-il en serrant son étreinte. Si j'avais su, je serais intervenu avant.

Il marque une pause et poursuit, sans pour autant me lâcher.

- Je n’en reviens pas qu’il ait osé se pointer chez nous.

De mon côté, je me retiens de ne pas craquer en repensant à cette confrontation. J’ai beau jouer les femmes fortes, me retrouver ainsi face à mon passé ravive bien trop de blessures. Ce qui me porte le coup de grâce est de savoir que Nate a vendu la mèche et m’a balancé à notre père sans même se donner la possibilité d’apprendre à me connaître. Mon cœur se brise et, finalement, je m’effondre dans les bras de mon ami. Mathieu pose son menton sur ma tête et caresse mon dos avec sa main.

- T’en fait pas Cara, me dit-il tendrement. Tout va bien, on est là et je t’ai laissé pleins de ménage à faire pour que tu te changes les idées.

Je souris tout en lui mettant une petite tape sur l’épaule. Il n’y a pas à dire, il sait remonter le moral d’une demoiselle en détresse. Mathieu finit par me libérer et s'adresse à Jonathan :

- Tu veux entrer boire un coup mec ? On a une demoiselle à réconforter.

Jonathan semble hésitant. Il est vrai qu’entre lui et moi la situation n’est pas très claire, surtout depuis son appel de vendredi. Mais à ce moment précis, j’ai simplement besoin d’être en bonne compagnie.

- Cela me ferait plaisir que tu entres, lui dis-je doucement.

Il pose un tendre regard sur moi et accepte l’invitation de Mathieu.

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