1 - Routine
Quelque part sur Terre, 2018.
La lumière extérieure m’arrache au sommeil. J’avais pourtant bien refermé les rideaux occultants avant d’aller dormir. Mais un rai d’une blancheur éclatante pour mes yeux encore endormis parvient à se faufiler dans la pièce.
Mon regard fatigué se promène sur ce qui m’entoure, et un sentiment de déception s’empare une nouvelle fois de mon être.
La chambre est identique à celle de la veille : un plafond blanc constellé de petites bosses, l’armoire en mélamine, un bureau rangé avec soin, des livres alignés dans la petite bibliothèque… Cela me semble si familier. Cependant, l’impression de redécouvrir le tout chaque matin persiste. Dans ce fouillis d’objets, traces d’une vie passée, j’en remarque de nouveaux tous les jours. Cette peluche se trouvait-elle là hier ? Et d’où vient ce vase déjà ? Tant de questions se bousculent dans mon esprit embrumé.
La clarté ambiante me permet de distinguer les chiffres du réveil : déjà dix heures trente. Un lundi. Je soupire et repousse les couvertures. Geste maintes fois réalisé, me semble-t-il. La suite ? Je la connais par cœur, cette routine !
Je vais me lever, ouvrir la fenêtre. Du haut de cet immeuble, la ville se dévoilera. Peut-être sera-t-elle baignée de soleil aujourd’hui ? Ou plongée dans la grisaille… Direction la salle de bains, puis la cuisine. J’y croiserai ma mère, occupée à préparer le repas. Mon père sera, comme à son habitude, affalé devant la télévision.
— Bonjour. Bien dormi ? Qu’avez-vous mangé au petit-déjeuner ? demanderai-je avant de m’attabler.
Le reste de la matinée, mon ordinateur sur les genoux, je scruterai les réseaux sociaux à la recherche d'une quelconque distraction. Mais il n’y aura sans doute aucun message. Et le temps filera, à remonter ce fil d’actualité rempli de banalités de la veille. Puis viendra le moment de dîner, et l’après-midi passera en un clin d’œil.
Toutes pareilles, les fins de journées se mélangent dans mon esprit. Encore des automatismes : la douche, les dents, le pyjama tout doux, un verre d’eau… et au lit!
Noir.
Tout est normal.
Mais…
Je le sens au plus profond de mon cœur : quelque chose sonne faux dans cet enchaînement quotidien.
Ma place n’est pas ici. Malgré l’absence de preuves concrètes, j’en demeure persuadée, jour après jour.
Et lorsque mes yeux se ferment, un rêve, sans cesse le même, vient hanter mes nuits.
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