28 - Jay part 2

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— Leo veut qu'on rejoigne la salle pour quinze heures, nous sort Shawn alors qu'une serveuse vient de déposer un café devant moi.

— Pas de problème, réplique Dan.

Je jette un coup d'oeil sur ma montre. Dix heures. J'ai donc cinq heures pour visiter cette ville avec ma princesse.

— J'y serai aussi. Mais ne nous attendez pas pour déjeuner, on va aller se balader avant de vous rejoindre.

Le visage de Jen s'assombrit. Sa tristesse me touche en plein cœur. Moi, non plus, je n'ai pas envie de partir. Je presse sa main pour lui apporter mon réconfort. On est encore ensemble, le temps des au revoir aura lieu dans quelques heures. D'un baiser dans le cou, je tente de le lui rappeler.

— Tu sais que tu pourras me rejoindre quand tu en auras envie. Puis, qui te dit que je ne viendrai pas me reposer à la maison quand on aura deux ou trois jours de break ? Je veux te voir sourire toute la journée, lui chuchoté-je.

Sous le regard peiné de Haley, Jen tente de sourire.

— J'espère pouvoir te faire confiance au moins sur ce plan-là, me lance Shawn.

J'émets un bref ricanement, amer. Son message est parfaitement clair. Et dire que je venais de penser qu'il nous foutait la paix depuis notre retour. A-t-il l'intention de revenir en arrière ? Je n'ai franchement aucune envie de me servir à nouveau de mes poings pour lui dire ma façon de penser. Mais s'il le faut, je n'hésiterai pas.

— Je n'ai pas plus envie que toi que les producteurs nous collent un procès au cul. T'as pas d'inquiétude à avoir pour ça, répliqué-je, mordant.

Lorsque je le défie d'ajouter quoi que ce soit, l'atmosphère devient plus que lourde. Le moindre faux pas de l'un ou l'autre et une bagarre éclatera, sans aucun doute.

— Vous n'allez pas recommencer, les gars ! grogne Dan.

Ses yeux pèsent sur moi un instant, avant que Jen ne me caresse le bras pour me rappeler à elle. Je me tourne aussitôt dans sa direction et lorsque je plonge dans ses prunelles, plus rien n'a d'importance. D'un coup de baguette magique, elle vient d'effacer toute la tension qui émanait de mon corps. Je me penche vers elle pour l'embrasser. Au moment où ses lèvres entrent en contact avec les miennes, j'oublie la pique gratuite que vient de me balancer Black.

Durant tout le reste du repas, notre leader n'ouvre pas une seule fois la bouche, hormis pour manger et avaler son chocolat chaud. Ce n'est qu'au moment où il se lève, qu'il se penche vers moi pour me murmurer :

— Tu vas bientôt connaître la même souffrance que ton père.

Putain, c'est quoi son problème ? Je n'ai rien capté, si ce n'est qu'il vient de me balancer une sale menace. Un nœud se forme dans ma gorge, je ne sais pas ce qu'il a prévu, mais ce qu'il vient de sortir et son regard démoniaque ne me laissent rien présager de bon. À croire qu'il attend depuis des jours le bon moment pour nous foutre en l'air. Dans l'incompréhension, je secoue la tête.

Au lieu de répondre à mes interrogations muettes, il éclate de rire. Puis, il se casse, sans me laisser le temps de réagir. Merde !

Furax et dans le flou total, je bondis sur mes pieds. Dans ma précipitation, ma chaise heurte le sol. Je m'en tape ! Faut que je le rattrape à tout prix ! Mais je n'ai même pas fait un pas que la main de Jen se pose sur mon avant-bras. Je sais ce qu'elle attend de moi, que je n'aille pas en découdre. Immobile, je le regarde s'éloigner, les narines dilatées par ma colère.

— Je ne sais pas ce qu'il t'a dit, mais vaut mieux laisser tomber.

— Jen a raison, surenchérit Dan. Je ne sais pas ce qu'il a, mais depuis qu'il a débarqué, il n'a pas l'air dans son état normal. Je me demande s'il n'a pas retouché à ces merdes.

Putain de bordel de merde ! Si c'est le cas, je peux m'attendre au pire. Black sous l'emprise de la drogue n'a rien de bien beau à voir. Chacunes de ses frasques se répercutent sous mon crâne. Plus moches les unes que les autres. Heureusement que Jen est entrée dans sa vie à l'époque où il sortait avec Johnson. Sans, il aurait fini derrière les barreaux. Ou pire. À force de frôler avec la faucheuse, il aurait pu y laisser sa peau. Une angoisse sans nom me tord les tripes en imaginant tout ce qu'il est foutu de faire quand il consomme cette merde.

Je m'accroupis devant Jen et happe son regard du mien. Il faut qu'elle prenne vraiment au sérieux, ce que je vais lui dire. Elle va devoir se méfier de lui jusqu'à notre départ.

— Promets-moi, princesse, de ne pas t'approcher de lui. S'il s'est drogué, il peut être dangereux.

En voyant que je ne plaisante pas, elle opine du chef.

— Je te le promets. Puis, je ne vois pas quand je pourrais le laisser venir jusqu'à moi, vu que mon garde du corps personnel me suit à la trace.

Le sourire très subjectif qu'elle me lance m'apaise momentanément. Toutefois, je n'arrive pas complètement à me détacher de cette épée de Damoclès qu'il vient de foutre au-dessus de mon crâne. Même si j'aurais préféré ne lui en parler que lorsque nous serions chez nous, il va falloir que je trouve un moment dans les heures qui suivent pour le faire. Je suis certain que c'est de Lui dont il s'agit. Quoi d'autre ? Surtout qu'il s'était déjà aventuré sur ce chemin lorsqu'il lui parlait de Shanya à l'hôpital. Je ne le vois pas s'en prendre à Jen physiquement, car il déglinguerait la femme qu'il aime également mais la briser de l'intérieur, il en est bien foutu. Je ferme les yeux un instant pour reprendre contenance. Quand je les rouvre, j'embrasse tendrement Jen, puis retourne à ma place.

Tandis que je sirote le reste de mon café, je cogite sans relâche. Je n'ai que cinq heures pour lui avouer mon plus grand secret. Espérons qu'elle comprenne et qu'elle l'accepte. Si elle refuse de le faire, je ne sais pas comment je m'en sortirais sans elle. Plus de vie commune. Plus de projet. Plus d'avenir. Un aller simple pour l'enfer.

Putain, ça me soûle ! Tellement que mes doigts tapotent nerveusement sur la table, sous les regards pesant de ma copine et de mes potes.

— Pourquoi t'es aussi nerveux, Jay ? me questionne Haley.

— Ouais, c'est clair. Qu'est-ce qu'il t'a dit pour te mettre dans cet état ? surenchérit Dan.

Jen ne dit rien, mais, à ses yeux fixés sur moi, je sais qu'elle attend ma réponse. Je lui jette un rapide coup d'œil avant de tourner le regard vers le couple devant moi.

— Rien, grinché-je.

Ils n'ont pas besoin de savoir.

— On voit bien, mec, que ça te met dans tous tes états, réplique Dan.

— Laissez tomber, ok ?

Tous trois tirent une grimace de pas convaincus pour un sou. Ils savent qu'un orage se prépare, mais ils n'ont pas conscience de la violence avec laquelle il va se déchaîner. Moi, je le sais. Si je ne mets pas tout en œuvre pour nous protéger, c'est un supercellulaire* qui va s'abattre sur nous pour détruire nos deux cœurs.

Plutôt que de rester dans mes pensées morne, je me lève et pose ma main sur l'épaule de Jen.

— On y va, princesse ? J'ai en vu un petit programme sympa et j'aimerais qu'on puisse s'y tenir, avant que je rejoigne les autres.

D'un signe de tête, elle accède à mon désir. Elle avale le restant de son chocolat chaud, se lève à son tour, embrasse Haley et Dan, puis me rejoint. Mon bras autour de ses épaules, je l'entraîne à l'extérieur où une bagnole avec chauffeur privé nous attend.

Une vingtaine de minutes plus tard, nous arrivons sur les bords de la Seine où nous attend une vedette vénitienne, que j'ai réservé pour une croisière privée. Tout en acajou, elle possède une cabine entièrement vitrée qui nous protégera de ce petit vent frais matinal. Une vraie petite limousine flottante. Du moins, c'est ainsi qu'ils la vendent sur le papier.

Alors que nous approchons du bateau, main dans la main, quelques fans viennent me voir, pour un autographe ou un selfie. Certains nous demandent même de poser Jen et moi, ensemble, en total admiration devant notre couple. On se prête tous les deux aux jeux, sans se poser de question, le sourire aux lèvres. Heureux de montrer notre amour à tous. Heureux d'être ensemble.

Au loin des flashs crépitent et nous sortent de notre cocon. Des paparazzi sans aucun doute. Dans les jours qui viennent nous ferons la une de ces magazines que ma princesse déteste. Depuis que ces foutus photographes ont capté que je n'étais plus célibataire, ils prennent un malin plaisir à prendre une tonne de clichés. En à peine un mois, nous sommes devenus le couple le plus en vogue du moment. Comme d'habitude, Jen n'est pas très à l'aise. Elle se crispe contre moi, mais ne camoufle plus sa tête dans mon cou comme au début. Elle la pose juste sur mon torse. Elle n'a plus peur de montrer à la Terre entière qu'elle a volé mon coeur et n'est pas prête de me le rendre.

Enveloppé par notre petite bulle, je prête à peine attention à mes groupies qui m'appellent sans relâche pour attirer mon attention. Ma belle ensorceleuse semble plus s'en inquiéter que moi. D'un baiser sur mes lèvres, doux et terriblement sensuel, elle marque son territoire. Je sais qu'elle reste encore jalouse de toutes ces femmes qui me convoitent. Son manque de confiance en elle me travaille quelques fois. D'autant plus qu'elle n'a rien à craindre. Je ne vois et ne désire qu'elle. Elle. Et seulement elle.

Sur ce plan-lá, je me vois mal lui dire quoi que ce soit. Je suis loin d'être mieux qu'elle. Quand un gars s'approche un peu trop prêt, j'ai tendance à la serrer dans mes bras, pour bien montrer à mon pseudo rival, qu'elle est déjà prise. Foutu sentiment ! Si aimer est une pure merveille, la jalousie est mesquine et cruelle. Rien ne peut blesser autant qu'elle. Son seul avantage, c'est que Jen craque à chaque fois que je crispe les mâchoires. Elle n'arrête pas de me dire que je suis trop mignon lorsque je suis à la limite de voir rouge, avant d'éclater de rire. Et moi raide dingue, je fonds littéralement sous ce son si pur à mes oreilles.

Quelques minutes plus tard, nous sommes assis, l'un à côté de l'autre, mon bras autour de ses épaules, sa tête posée sur l'une des miennes. Le capitaine du navire est prêt à larguer les amarres. Durant un peu plus d'une heure, nous allons parcourir une partie de la Seine, en découvrant les plus beaux monuments de la capitale Française. Je pense que ce sera sympa à voir. Du moins, si j'arrive à détourner les yeux de la femme que j'aime.

Tandis que nous avançons sur ce fleuve, je cherche moyen de lui annoncer ce que je lui cache. Puis-je le lui avouer maintenant alors que je désirais faire de cet instant un moment romantique ou bien vaut-il mieux attendre d'être installé au restaurant ? L'inconvénient de ce dernier, c'est qu'elle pourra se barrer alors que là, je ne crois pas qu'elle devienne folle au point de sauter dans cette eau bien trop polluée. Mais j'ai la frousse. Une frousse horrible, qui me tord les entrailles, de la voir se casser dès que le capitaine aura jeter l'ancre. Pourtant, je suis conscient que si je ne lui dis rien, elle finira par l'apprendre autrement. Je n'ai pas le choix. Faut juste que je trouve le putain de courage de me lancer.

— Tu m'as l'air bien songeur ? me fait-elle savoir.

Lorsque je tourne la tête vers elle, elle fronce les sourcils, sûrement d'inquiétude face à mon silence.

— J'ai un truc à te dire, lui avoué-je, peu sûr de moi.

Un immense sourire se dessine sur ses lèvres. La voir aussi rayonnante fait battre mon cœur un peu plus vite. Pourtant, l'heure est grave et il ne devrait pas réagir ainsi. En quelques mots, je pourrais la perdre pour de bon.

— Moi aussi, me déclare-t-elle avant de se mordiller la lèvre.

Bordel, qu'est-ce que ça la rend sexy ainsi !

— À toi l'honneur, l'invité-je à se lancer.

Un ange passe durant lequel tous ses sentiments pour moi transparaissent dans son regard. Si elle continue ainsi, je serais incapable de lui dire quoi que ce soit. Seul mon corps sera foutu de parler pour moi.

— Je t'aime, Jayden Miller.

Un putain de feu d'artifice explose sous ma cage thoracique. Mon cœur se met à danser la rumba alors que ma conscience vient de s'éteindre. Il n'y a plus que ces trois mots sous mon crâne. Elle m'aime ! Je viens de prendre un aller simple pour les étoiles, où je reste en apesanteur, grisé par cette déclaration. La tête loin de mes préoccupations précédentes, je me jette sur elle et l'embrasse comme un dément. Elle m'aime ! Même si je n'en ai jamais douté, je n'arrive toujours pas à y croire !

Dans mon euphorie, j'en oublie que nous nous trouvons à l'arrière d'une vedette et qu'il suffirait que le capitaine tourne la tête pour nous voir en train de flirter sans retenu. Heureusement que Jen a opté pour un pantalon. Sans, je crois que j'aurais bien été foutu d'aller plus loin. Comme rempart, il n'y a pas mieux pour que je retienne mes ardeurs. Mais ça n'empêche pas mes mains de venir s'emparer de son sein... Oh bordel ! Elle n'a même pas mis de soutif. Elle veut vraiment me rendre barge ! Fou de désir, mais obligé de me contenir, je malaxe son sein, pince son téton, tout en laissant ma langue se glisser dans sa bouche. Sous mes caresses, ma belle ensorceleuse pousse des gémissements et se frotte contre ma queue bien tendue.

Un toussotement dans notre dos met un terme brutal à notre échange. Je me redresse aussitôt tandis que Jen, rouge de honte, camoufle son visage de ses mains. Elle n'a jamais dû se laisser de cette façon dans ce genre d'endroit. Moi, non plus d'ailleurs. Mais, je dois admettre que ça me plaît. Beaucoup même. Quand je rentrerai à Chicago, je passerai le permis bâteau et nous offrirai un yacht. Je pourrai ensuite lui faire l'amour aussi souvent qu'elle le souhaitera sur le lac Michigan. Rien que d'y penser, j'ai encore plus hâte de la retrouver, alors que nous nous sommes même pas encore quitter.

Perdu dans mon rêve éveillé, je n'ai pas fait gaffe que le capitaine nous parlait. Ce n'est qu'en voyant Jen debout que je capte que notre petite balade est terminée. Je me lève à mon tour et la suis sur la berge. Des fans, encore et toujours, viennent à notre rencontre. Si d'habitude, Jen m'accorde du temps avec eux sans rechigner, cette fois, elle semble bien moins apprécier. Est-ce à cause de ce que nous venons de faire ou bien, elle aussi, réalise, que le délai qui nous est accordé se fait de plus en plus court ?

— Est-ce qu'on peut éviter ça cette fois ? Je veux juste être avec toi pour le peu de temps qu'il nous reste.

Je remarque Tim à quelques mètres de là et d'un signe de tête, je lui demande de venir me filer un coup de main pour qu'on puisse se rendre jusqu'à la bagnole sans être dérangés. En moins de deux minutes, il nous ouvre un passage. Les fans n'ont que le choix de nous foutre la paix.

— Tout va bien ? questionné-je Jen après avoir refermé la portière derrière nous.

— Oui.

Je ne suis pas con, ni dupe. La tonalité de sa voix ne me laisse aucun doute. Elle est triste.

— J'avais prévu de t'emmener au restaurant, mais si tu veux, on peut rentrer à l'hôtel et manger dans la chambre.

— Non, on s'en tient à ton idée. Ce qui compte pour moi, c'est qu'on reste un maximum tous les deux.

D'un tendre baiser sur sa joue, j'accède à son souhait. J'indique ensuite au chauffeur l'endroit où j'ai réservé une table. Le Meurice d'Alain Ducasse. Le restaurant le plus cher de cette capitale. Rien n'est trop beau pour elle. Je serai prêt à me ruiner si elle me le demandait. Quoique, même sans demande de sa part, j'en serai bien capable. Elle mérite tous les trésors du monde.

— On dirait que tu avais tout prévu pour que ces dernières heures soient parfaites.

Je lui lance un sourire énigmatique, avant de hocher la tête.

— Je voulais vraiment les marquer.

En réalisant que j'en fais peut-être un chouïa de trop, je me mordille la lèvre.

— Tu crois que c'est trop ?

Elle pose ses lèvres sur ma joue avant de me répondre :

— Non, tout est parfait. Tu es certain que je ne pourrais pas t'oublier comme ça.

Et elle a plutôt pas intérêt de le faire, j'en suis bien trop amoureux.

*orage supercellulaire : orage qui s'accompagne de phénomènes violents tels que les tornades ou la grosse grêle.

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