Kaldor avait passé une excellente semaine de repos. Sa mère se plaisait dans son nouveau métier et en plus sa maîtresse de maison était très sympathique. Il avait revu une deuxième fois Élaëna, la nièce du Patriarche Faldin, qui avait essayé, en vain, de lui extorquer le but et la destination de la mission que lui avait donnée son oncle. Après un énième refus, elle l’avait quitté avec un air outré et il ne l’avait plus revue.

Le jeune Eldyrien savait bien ce qu’elle avait en tête, elle voulait les accompagner pour voir le monde. Il n’était pas misogyne, mais il fallait bien reconnaître qu’une jeune femme noble ne connaissait rien à la violence du monde extérieur à son cocon familial. Lui-même, pourtant provincial, ne l’avait que trop bien constaté.

Ce matin-là, le jeune homme s’était levé à l’aube. Finalement, la colère ressenti lorsqu’il avait appris qu’on le désignait pour une tâche précise, s’était muée en une hâte de partir à l’aventure et de découvrit la vaste Camaörie. Il avait une faim de loup et se précipita dans la cuisine. Sur la table, étaient disposées quatre tranches de pain, du beurre et un pot de miel. Sa mère se retourna pour lui souhaiter le bonjour et ôta la bouilloire sifflante du feu. Au parfum que dégageait la tisane, il s’agissait de verveine et de menthe. Le jeune homme entama son petit-déjeuner avec enthousiasme. Puis, vint l’heure de partir.

— Oh, comme je suis fière de toi, mon fils ! lui dit sa mère les yeux embrumés. Tu es devenu quelqu’un d’important.

— Par la force des choses oui, mais qu’y puis-je ? Puis-je lutter contre le destin ? Cela me permettra de venger la mort de papa ! Je retrouverai son assassin et lui ferai payer !

— Ne pars point avec le cœur empli de colère et de haine, mon chou. Oh ! Promets-moi que tu reviendras, lui dit-elle en le serrant dans ses bras, des larmes lui coulant des yeux.

— Je te le promets, maman !

Ils chassèrent leurs larmes. Elle lui donna un dernier baiser sur le front, telle une bénédiction, puis il s’en fut retrouver ses compagnons de voyage aux écuries du Temple.

Ils étaient déjà tous là quand il arriva : les quatre soldats de l’Ordre – Binlian, Adrim, Findol et Zèlyu – Valdir et le patriarche Faldin. Dans la cour de l’écurie s’affairaient une multitude de palefreniers, soldats et autres serviteurs. Cinq chariots étaient chargés de divers coffres en bois et panier en osier. Les palefreniers finissaient d’harnacher les chevaux de trait aux chariots et sellaient les autres pour Kaldor, ses compagnons et apparemment d’autres personnes.

— Ah Kaldor ! Te voilà, j’espère que tu sais monter à cheval, s'enquit Valdir.

— Vous faites bien de demander, parce que je ne sais pas. Et d’ailleurs, où aurai-je pu apprendre ?

— C’est pas faux… J’aurai dû m’en douter. Ce n’est pas dramatique, seulement un peu ennuyeux.

— Ne vous inquiétez pas Valdir, il aura du temps pour apprendre les bases, le convoi n’ira pas vite. À ce propos, quelle sera votre route ? demanda le patriarche Faldin.

— Nous allons profiter de la sécurité du convoi jusqu’à Rant, après nous bifurquerons vers Kalt. De là, nous prendrons un navire pour nous rendre jusqu’à Vilgel sur l’île des Trolls. Le voyage nous prendra au minimum un mois si tout se passe bien. Le plus dur sera de trouver la cachette de l’épée, parce que jusqu’à présent on ne nous a pas précisé son emplacement exact, résuma Valdir.

— Il est temps de vous mettre en route, un convoi n’avance pas vite, tout au plus une trentaine de kilomètres par jours. Que la quête de l’Ordre commence ! s’exclama le patriarche avec joie.

Valdir nota que le chef religieux s’était vite approprié la quête. Il n’en dit rien car sans l’aide de l’Ordre du Temple, ils n’iraient pas loin. Ils se mirent tous en selle. Kaldor n’était pas très rassuré en haut de sa monture. Puis le convoi se mit en route.