Chapitre 17 - Muzia la rouge (partie 2)

4 minutes de lecture

Une douleur à l’épaule gauche réveilla Kaldor. Un plafond en bois sculpté fut la première chose qu’il aperçut. Il se demanda où il se trouvait et pourquoi il était dans un lit. Dans ses souvenirs, il campait avec ses compagnons dans une clairière. Il s’assit sur le lit dans lequel il était allongé. À sa gauche, il aperçut Binlian, Adrim, Findol, Zèlyu et Élaëna, allongés dans leurs lits. Il voulut se lever mais la douleur à l’épaule lui rappela qu’il était blessé. Il ne se souvenait plus comment.

— J’aurais pu guérir ta blessure, mais je suis bien trop fatigué de les avoir soignés. Rassure-toi, ils vont bien. Ils sont seulement sonnés, expliqua Valdir, assis dans un coin de la pièce.

— Que s’est-il donc passé ? Je me souviens que nous étions dans une clairière, pas que nous avions décidé d’aller dans une auberge.

— Un servombre nous a attaqués avec l’aide de quelques bandits. J’ai créé un bouclier protecteur autour de nous ce qui a atténué les effets de la fumée noire qu’il avait invoqué. Sans cela, nous serions restés inconscients des mois, voire morts. Une fois les effluves mortelles dissipées, il était parti. Enfin, je vous ai placés sur vos chevaux et conduis à cette auberge, Le lion qui danse.

— Il faudrait m’apprendre à faire un bouclier. Cela me serait très utile pour la suite de l’aventure, suggéra Kaldor.

— En effet, de plus ce n’est pas bien complexe. Il suffit de rassembler les éléments d’air présent autour de soi et de les fixer solidement entre eux. Le plus difficile est de maintenir le tout lorsque que l’on reçoit des coups. Plus l’esprit et la volonté sont forts plus ta protection tiendra.

Leurs amis se réveillèrent le lendemain, ce qui étonna le jeune homme. Valdir expliqua ce fait par la différence de robustesse entre les Humains et les Eldyriens. Kaldor, de par sa jeunesse, n’avait pas résisté comme son mentor face au sortilège. Leurs compagnons restèrent un moment silencieux, déboussolés par leur mésaventure et un terrible mal de tête.

— C’est pire que d’avoir bu un tonneau ! maugréa Adrim, brisant le silence.

— Et tu sais de quoi tu parles, railla Valdir.

Une fois le déjeuner pris, l’Eldyrien pressa le groupe à se préparer pour le départ. Il leur rappela qu’avec cette attaque, ils avaient perdu deux jours. Il voulait être à Muzia avant la fin de l’après-midi. Il leur expliqua que l’auberge se trouvait à une douzaine de kilomètres de la capitale et qu’un bateau les attendait au port de la ville. « Encore faut-il se dépêcher, si nous ne voulons pas louper l’embarquement », avait-il précisé sentant venir les questions sur le comment de la chose.


Les sept compagnons poussèrent les chevaux au galop et arrivèrent enfin en vue de Muzia, capitale du royaume de Muzin. Kaldor et Élaëna ne l’avait jamais vue et restèrent bouche-bée. La ville fortifiée était bâtie sur une vaste colline, elle-même effleurée par un grand fleuve, la Camar. Les faubourgs entouraient la ville, à bonne distance des remparts.

Ce fut surtout ceux-ci qui captèrent l’attention des deux jeunes gens. Ils étaient peints en rouge. Un rouge qui se rapprochait de la couleur du sang. Quand la jeune femme en fit la remarque, Valdir expliqua que selon la légende, il s’agissait du sang des ennemis déchus du royaume. Devant la mine dégoutée d’Élaëna, Adrim sauta sur l’occasion.

— Tu vois les petits objets arrondis au sommet de chaque merlon ? lui demanda-t-il.

— Euh oui, mais nous sommes encore trop loin pour que je puisse voir de quoi il s’agit.

— Eh bien, ce sont les crânes de ces ennemis.

— Mais c’est horrible ! dit-elle, horrifiée. Comment peut-on être aussi barbare ?

— Juge celle qui, il y a quelques jours, nous faisait l’éloge de la peine de mort, lui rappela Adrim.

— Ce… Ce n n’est pas la même chose, là c’est un massacre de masse !

La voix de la jeune femme monta dans les aigües. Kaldor commençait à la connaître pour savoir qu’elle était prête à éclater. Il tenta de la calmer en lui rappelant que ce n’était qu’une légende pour faire peur aux ennemis.

Arrivés plus près, ils purent constater que des crânes blanchis par le soleil trônaient sur les merlons des remparts écarlates, comme l’avait expliqué Adrim. Cette ville portait bien son nom : Muzia la rouge. En approchant, Kaldor se sentit oppressé par le décor de cette massive muraille et imagina qu’elle renfermait une ville aux rues étroites et étouffantes. Il se rendit compte qu’il retenait sa respiration. Il inspira et expira calmement puis, agita ses épaules pour chasser sa tension.

Dès que ses compagnons et lui passèrent la porte sud à double herse, la surprise le cueillit. Il avait eu tort car, il contemplait à présent de larges rues pavées et des bâtisses de calcaire écru aux toits rouges. Au loin, un rayon de soleil perça les nuages, illumina le temple blanc de Kaelliom et embrasa sa statue dorée. Le bâtiment religieux de Muzia semblait égaler celui de Temple-ville. Valdir les mena vers le port fluvial et sa petite forêt de mats.

— Quel navire avez-vous trouvé pour nous amener sur l’île des Trolls ? Et comment avez-vous fait ? Par un messager ? questionna Kaldor, curieux.

— Tu verras bien, éluda Valdir, toujours aussi mystérieux. Dernière chose, Kaldor rabat ta capuche sur ta tête, tu es bien trop reconnaissable. Ne rendons pas la traque du servombre plus facile, veux-tu ?

Son mentor semblait capable de maintenir une parfaite illusion pour paraître humain, même en combattant, et Kaldor était loin d’être aussi compétent. L’idée de devenir un jour comme Valdir, l’emplit soudain d’appréhension et de peur. Peur de ne savoir comment les gens normaux le percevraient et peur de lui-même. Comment être sûr s’il ferait bon usage de ses futures capacités ? Ou qu’il ne tuerait pas ses amis accidentellement ? Pourrait-il sortir vivant cette quête ? Oh, comme il voulait que tout redevienne comme avant… normal.

Annotations

Vous aimez lire Arnvald ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0