Éden (#71)
En voyant la lumière, j'voulais faire marche arrière
Mais ma mère a pas permis que j'reste au stade embryonnaire.
Moi on m'a jamais d'mandé si j'voulais vivre comme un serf
Dont on célèbre l'obédience par une fête d'anniversaire.
On m'a dit : « Lève-toi et marche.
Reste dans les traces du patriarche. »
Mais les chemins d'antan s'effacent,
Alors pour pas perdre la face tout l'monde s'oriente au pile ou face.
Les rêveurs clament « Viens, on s'arrache !
On veut pas vivre comme des lâches. »
Mais les murs qui nous emprisonnent,
Quand on les passe nous empoisonnent.
Révolution. Corruption !
Information, prohibition.
On veut nous réduire en pantins par un ballet de tentations
Pendant qu'on tabasse le bonheur à coups d'excommunications.
Ta vie est ton fardeau !
Une mort prématurée prescrite par les Cieux.
Ta vie est ton fardeau !
À la sortie d’Éden les grands te crèvent les yeux.
Vautrés dans leurs palais d'ivoire et de défense,
Ils nous bombardent d'intox et sèment la démence.
On fuit comme des hamsters, toujours dans la même sphère,
Prisonniers de nos pairs, prisonniers de notre ère,
Des lois qui nous destinent à tuer notre père,
À adorer une mère et à juger nos frères.
Ta vie est ton fardeau !
L'enfant-patrie nourri aux dogmes se noie dans la réalité
Marionnette échouée, sa pensée est infirmité.
Le marginal reçoit la foudre des regards qui le lapident,
Son utopie réduite en pièces par l'empirisme qui nous vide.
Alors on serre les dents, et on se laisse aseptiser
En dignes fils d'Adam dont la conscience avait brisé
L'immortalité et les desseins du Tout Puissant.
On n'ose plus jouer les caïds par peur de périr dans le sang.
Mais l'Paradis est pas sur Terre et on rampe tous dans la misère.
Partenaires, secrétaires,
Adversaires, militaires,
Comme des nomades déboussolés tous paumés dans le désert.
Que des hics, plus de fric,
Tu récoltes que les critiques.
Allez trime, qu'on te brime !
Si tu t'exprimes c'est un crime.
Action. Répression !
Construction, démolition.
On te rabat les oreilles avec des putains d'mots en -tion,
Mais lorsque tu les appliques on balaye toutes tes ambitions !
Ta vie est ton fardeau !
Une mort prématurée prescrite par les Cieux.
Ta vie est ton fardeau !
À la sortie d’Éden les grands te crèvent les yeux.
Vautrés dans leurs palais d'ivoire et de défense,
Ils nous bombardent d'intox et sèment la démence.
On fuit comme des hamsters, toujours dans la même sphère,
Prisonniers de nos pairs, prisonniers de notre ère,
Des lois qui nous destinent à tuer notre père,
À adorer une mère et à juger nos frères.
Ta vie est ton fardeau !
Le phare est dans ton dos, lueur inaccessible.
La vie est un cadeau, c'est c'que prétend ta Bible.
Et puisque l'on existe par la seule grâce de Dieu
Comment pourrait-on, lui, le nommer « odieux » ?
L'arbre de la connaissance est pollué par la connerie,
La soif des peuples étanchée par son fruit pourri.
Le ver qui ronge nos âmes a travesti nos émotions,
L'étonnement des anciens piétiné par la révulsion.
La paix engendre la peine.
L'amour devient la haine
Et nous les hommes des bêtes
Sans têtes qui s'entêtent !
On se cogne le crâne aux limites du système,
On prie pour notre ego en crachant des blasphèmes.
Personne n'écoute personne. Seules les injures résonnent.
Dans ce puits de chaos ou plus nul ne raisonne.
Notre monde, terre brûlée, antichambre des damnés –
Échiquier sur lequel se jouent toutes nos destinées –
C'est l'Enfer que l'on creuse à défaut de bien croire
Sans se douter que l'Autre est en fait le miroir.
Ta vie est ton fardeau !
Ta vie est ton fardeau !
Embrasse ton fardeau,
Ne lui tourne pas le dos.
Ta vie est ton fardeau !
Attribuée au groupe AKA Poliss, cette chanson enragée traverse tout le Chapitre 6 de SMOOTHIE.
Les sœurs Iunger découvrent le titre ensemble à l'occasion de leur réunion puis, chacune de leur côté, l'écoutent ou l'entendent. Les paroles renvoient plus explicitement que la précédente à l'univers de l'histoire, aux expériences faites par certains personnages. Contestataire, ce presqu'hymne d'Aka Poliss fait aussi évidemment écho à la révolution initiée par Fate. Je vous dirai encore que le hasard fait bien les choses...
La musique crée un lien immatériel entre les membres de cette fratrie au bord de la fracture. Cependant, chacune des sœurs entretient bel et bien un rapport personnel avec la chanson, l'aime ou non, y projette un aspect plus ou moins intime de sa propre existence. Ce même fil qui relie est aussi celui qui divise. Un air de déjà-vu ?
L'interlude Spectus tourne, lui, autour de la conception de ce morceau par le groupe.
Annotations