Chapitre 2 : Enès - Partie 3
Dix heures du matin. Je ne savais plus ce que je vous racontais, car je me suis assoupi pendant quelques heures. Cela ne faisait rien. Reprenons à zéro : à peine je me levai, je remarquais que Tec n’était plus dans la chambre. Il avait probablement dû se lever plus tôt que moi.
Malgré le jour levé, l’intérieur était sombre dû à la tempête qui cachait le soleil. Alors quand je sortis de la chambre pour accéder au salon, la lumière allumée m’explosa la rétine. Argh, cela était dur de se lever après une nuit aussi peu réparatrice.
Je vis Tec sur un fauteuil en train de lire des documents. Dix heures du matin et déjà en train de vouloir résoudre l’énigme des trois meurtres. Courageux. Theia et Mattéo, quant à eux, préparaient le petit déjeuner. Du chaud pour se réchauffer sous ces douze degrés qui régnaient. Une paire de bacon chacun et un peu d’omelette. Je détestais les petits-déjeuners salés, mais je ne rechignais pas. Je pourrais manger un bœuf tant j’avais faim.
Assiette à la main, nous nous réunîmes autour de la table basse, envahie par les dossiers, et sans réfléchir, nous nous remettions au travail.
Suspect numéro un : le mari.
— Bon. Faisons la liste des suspects. Commençons par le mari. Le plus probable à mes yeux.
— Il aurait tué sa femme, répondit Mattéo. Car il était violent. Sa fille aurait débarqué. Sous le coup de la panique, il l’aurait tuée aussi. Puis, par culpabilité, il se serait suicidé.
— Oui, mais ça n’explique par les traces de nourriture dans son corps. Ni les traces de boue à l’entrée du chalet. Ni la fenêtre cassée. Tout était nickel à l’intérieur du chalet. Il n’y a pas de traces de débat. S’il les avait tuées, il y en aurait forcément.
— OK. Écartons-le dans ces cas-là. L’amante.
Suspect numéro deux : la maîtresse.
— Le garagiste, rit-il. Comment aurait-elle su qu’ils étaient en vacances ici ?
— Eh bien, le mari lui a dit, tout simplement. Genre : « Désolé, chérie, je ne serai pas disponible pendant un mois. Je pars en vacances avec ma femme et ma fille. », imitai-je d’une voix sarcastique. Elle aurait vrillé de jalousie.
Personne ne semblait convaincu. Je ne l’étais pas non plus par ma propre théorie. Et pourtant, personne ne connaissait son identité. Elle était la coupable parfaite. La maîtresse qui réalisait que son mec ne quitterait jamais sa femme pour elle. Elle péterait un câble et tuerait tout le monde par vengeance. Cela paraissait plutôt crédible. Mais… Peut-être notre instinct nous disait que cela ne pouvait pas être elle. Affaire à suivre.
Suspect numéro trois : la femme.
— Et la femme ? ajoutai-je. On avait vite balayé cette théorie, mais… Qui sait si cette histoire nous réserve des surprises.
— Elle n’aurait jamais tué sa fille. Suspect suivant.
Bon. Personne ne croyait en cette hypothèse. Alors que ! On se doutait tous que le coupable était la personne la moins attendue. Que tout avait été créé de toute pièce pour faire croire au suicide du mari. Mais qui y croyait vraiment ? Personne. En tout cas, pas nous quatre. Nous étions persuadés que cette affaire était plus compliquée que cela. Qu’il y avait forcément quelque chose qui nous manquait. Mais si jamais on résolvait cette histoire par : le mari est coupable, il a tué sa femme parce qu’il était violent, puis sa fille pour effacer tout témoin, puis il s’est suicidé par culpabilité. Nous serions déçus. Nous attendions beaucoup plus que cela. Tout le monde attendait beaucoup plus que cela. Voilà pourquoi nous avions été engagés, nous, les meilleurs de notre domaine.
Suspect numéro quatre : l’ex du mari.
— Et son ex, au mari ? Il lui a volé tout son argent.
Theia me regarda avec dédain, peut-être parce qu’elle était une femme et qu’elle ne supportait pas qu’on accuse une autre femme. Dans tous les cas, elle me jugeait d’un regard noir, du genre, c’est trop facile. Toujours l’ex. Oui, mais bon, était-ce de ma faute si elle avait un mobile. Je haussais les épaules, l’air de rien, pour dire : « Ce n’est pas moi, c’est l’enquête » et éviter que cette affaire devienne personnelle.
— Et elle, comment aurait-elle su qu’ils étaient ici ?
— Tout le monde le savait. Tous leurs proches. Elle avait encore des contacts avec sa mère. Elle a pu lui dire.
— Humpf, gémit-elle. Elle aurait parcouru tous ces kilomètres juste pour tuer son ex ?
— C’était le meilleur alibi, ces vacances. Un mois avant que nous découvrions leurs meurtres. Leur état est trop dégradé pour définir une heure concrète de leur mort. Elle a fait un aller-retour, puis elle est retournée à son travail et hop, un alibi.
— Et pourquoi aurait-elle tué sa femme et leur fille ?
— On ne sait pas ce qu’il s’est passé. Peut-être voulait-elle se venger en lui prenant ce qu’il avait de plus cher à ses yeux. Puis, elle a été démasquée donc elle l’a tué aussi. Peut-être que c’est l’inverse. Elle a tué son ex, puis sa femme l’a aperçue. Pour garder son identité, elle les a tuées aussi. Vraiment, tout est possible.
— Tout comme le garagiste.
— Oui, tout comme le garagiste.
En conclusion, jusque-là, la maîtresse et l’ex du mari semblaient être le coupable le plus probable dans cette histoire. Seulement, si les choses étaient aussi simples, cela se saurait. Nous avions déjà deux potentiels coupables et nous n’avions pas encore fait le tour des suspects. Génial. Quand je vous disais que ça nous occuperait sur tout le « week-end » dans ce chalet.
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