Prologue : Une histoire de voleurs

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L’homme se laissa aller dans sa chaise en soupirant, non sans regarder attentivement chaque individu présent dans la taverne. Azoth détestait cet endroit, l’odeur était insoutenable et impossible de savoir si cela provenait des lieux ou des clients. Léo n’aurait pas pu choisir pire endroit pour se rencontrer, tout simplement parce que toute la basse ville était dans le même état.

De temps en temps il apercevait des têtes se tourner vers lui, il était le centre de l’attention.

Ignorant les autres clients, Azoth leva deux doigts pour faire signe à la serveuse, une jolie blonde dans la vingtaine, qui s’empressa de venir prendre sa commande. C’était l’avantage de bien s’habiller dans la basse ville, tout le monde n’avait d’yeux que pour vous, et pour votre besace. Déjà trois pickpockets avait tenté de s’attaquer à Azoth, comme si ses idiots aux doigts maladroits avaient la moindre chance. Il leur avait juste tranché un doigt à chacun d’entre eux, de quoi retenir la leçon.

— Je vais vous chercher ça tout de suite, dit la jeune femme.

Elle revint moins de deux minutes après avec une choppe en verre rempli d’un liquide ambré. Azoth la remercia en lui glissant un sona dans la poche avec discrétion. Ce n’était pas grand-chose pour le voleur, mais cette pièce représentait surement plus d’un an de salaire pour la serveuse.

— Ta générosité te perdra, lança une voix à sa droite.

— Je ne vois pas de quoi tu parles, répondit Azoth en portant la boisson à ses lèvres.

Dégueulasse, c’était honteux d’oser appeler ça une bière. Il regretta presque d’avoir donné autant d’argent alors qu’on lui servait une pisse de chat immonde.

— Tu n’as pas commandé pour moi ? ajouta le nouveau venu en s’installant à la table d’Azoth.

— Crois-moi tu devrais me remercier, je t’ai épargné une terrible expérience.

L’homme leva un sourcil et goutta à son tour la boisson. Il la reposa bien vite en esquissant une repoussante grimace, enfin repoussante était exagéré, Léo était sans doute le plus bel homme de toute la Cité-Monde. Aujourd’hui il portait une élégante veste blanche avec un col en fourrure, le faisant particulièrement ressortir au milieu de la saleté environnante. Ses cheveux longs gris était attachés en une queue de cheval et ses yeux cobalt pétillaient. Il était si beau que cela en devenait énervant.

— Tu te laisses pousser les cheveux ? Ça va te surprendre mais je trouve que ça te va bien, dit-il en souriant.

— Je n’ai pas eu le temps de les couper ces temps-ci, répondit Azoth en passant la main dans cheveux noirs de jais. Ces temps-ci je suis toujours occupé, la ville s’affole on dirait.

— Si seulement elle ne faisait que s’affoler, on frôle l’hystérie.

Tout en parlant il avait sortit une tasse de dieu sait où et il fit signe à la serveuse de lui apporter de l’eau, tout en insistant bien pour qu’elle soit potable. Il utilisa un sort de chaleur en posant son doigt sur le bord de la tasse et y ajouta un sachet de thé. Tandis que d’autres clients l’appelaient, Léo déposa un second sona dans la poche de la jeune femme.

— Tu viens de faire d’elle la personne la plus riche de ce coin de la basse ville, dit Azoth. Et c’était obligé ce petit cinéma ? Encore plus de monde nous regarde.

— Qu’ils ne se gênent pas, ils seraient idiots de ne pas profiter de ma présence.

Il but une gorgée de ton thé et laissa échapper un soupir apaisé.

— On peut en venir à la raison de notre présence ici ? Je te l’ai déjà dit je suis un homme occupé.

— Je me doute bien, répondit Léo. Maître voleur est un métier très prenant et je sais à quel poi…

— Abrège pitié, soupira Azoth.

— Continue comme ça et je vais finir par croire que tu ne veux pas me voir. Bref, tu as entendu parler de la grande expédition du septième étage ?

— J’aurais eu du mal à ne pas en entendre parler. Alors qu'on s'en fout ! ajouta-il en levant les épaules. C’était dans toutes les bouches depuis des mois, les gens feraient mieux de s’occuper de leur propre vie, à part aux riches cette histoire n’a rien apporté à personne.

— C’est là que tu te trompes.

— Vas-y, impressionne moi donc.

— Il y a trois jours, après avoir terrassé le maître de l’étage, quelque chose d’étrange serait arrivé à l’un des aventuriers de l’expédition. Il aurait vu son futur.

Un frisson le parcourut et Azoth manqua de tomber en arrière. Léo eut l’air satisfait de voir la réaction de son ami.

— Attends un peu, quoi ? Tu n’es pas en train de te moquer de moi j’espère ?

— Pas le moins du monde, j’ai pour preuve le fait qu’il ait été « invité » par le roi à le rejoindre au palais.

— Impossible, qu’est ce qui aurait pu provoquer ça ?

— Mes informateurs ne sont pas trop sûrs d’eux, mais visiblement il aurait été en contact avec un objet appartenant au maître d’étage, une créature absolument monstrueuse parait-il.

— Et ou est passé cette précieuse relique ? s'impatientait Azoth.

— Avec l’élu en question, dans la prison de l'Eglise, sous très bonne garde j’imagine.

— Je crois comprendre pourquoi tu es venu me voir.

Un éclair passa dans les yeux de Léo, un éclair qu’Azoth ne connaissait que trop bien. Un sourire carnassier, celui d’un homme sûr de lui, déchira le visage de son ami.

— Si tout est vrai, dit Léo. Celui qui récupère cette relique obtient le pouvoir de bouleverser l’ordre de la Cité-Monde tout entier. Azoth, avec ça nous pourrions devenir plus que des dieux.

— Léo… Tu vas trop vite, on ne sait pas si tout cela est vrai.

— Le roi-dieu à agit bien trop rapidement, même si mes informateurs ne sont pas formels, il se pourrait qu'il ne soit pas au courant. Mais dans tout les cas impossible que ce soit faux ! J’ai beso… non, nous avons besoin de récupérer cet objet, avant qu’il ne soit détruit ou que quelqu’un d’autre ne s’en empare.

Léo s’était levé et ses yeux perçants étaient plongés dans ceux de son ami. Azoth avala sa salive avec difficulté, des milliers d’idées se mélangeaient dans sa tête. Il pouvait sentir l’adrénaline lié au mystère et à l’aventure se déverser dans tout son corps.

Était-il réellement capable d’accomplir un tel exploit ? Personne n’était jamais parvenu à s’introduire dans le palais et à en sortir vivant. Non, la question n’était pas de savoir si c’était possible, la question était de savoir comment y parvenir. Si tout était vrai, alors celui qui possèderait cet artefact deviendrait la personne la plus puissante de la Cité-Monde, non, il ne voyait pas assez grand.

Celui qui détenait le pouvoir de créer des élus devenait la personne la plus puissante du monde entier.

Azoth se leva et se dirigea vers la sortie.

— Ou vas-tu ? demanda Léo, sa voix trahissant son excitation.

— Me préparer, j’ai un cambriolage qui m’attends.

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