8 - L'académie d'Archlan

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1er jour de la saison de la faux 2447

La serveuse vint porter le petit déjeuner qui consistait de multiples fruits colorés, de légumes et d’écorce d’arbre au groupe. Habituée à des œufs, du pain et du jambon à ce temps de la journée, Azéna ne savait pas trop quoi penser de ce repas, mais mangea tout de même en laissant les écorces de côté. Les prunelles brillantes, Fayne semblait tout à fait comblée.

— Tu ne manges pas ton écorce ? demanda Vigoth en fixant Azéna avec curiosité. Il provient tout droit de la Forêt Étranglée en plein cœur du territoire des elfes sylvains. C’est un rare délice.

— Umm... Non merci, répliqua-t-elle en souriant bêtement. Je ne suis pas genre à manger des écorces d’arbres.

— C’est vrai. J’avais encore oublié que tu n’étais jamais venu à Nëowalds. En fait, tous les elfes mangent de l’écorce, car elle est très nutritive pour nous. Les humains, c’est juste pour leur plaisir.

— C’est plaisant à manger ?

Elle haussa un sourcil et s’imagina en train d’essayer de mâcher au travers de l’écorce. Elle grimaça.

— Je m’en passerai, continua-t-elle en terminant sa pomme verte.

— Petite dame capricieuse, se moqua Fayne.

Elle termina l’assiette de son amie à sa place, ne laissant que des miettes. Entretemps, la serveuse revint et fut surprise de l’appétit de ses clients.

— Ma parole, vous aviez faim, dit-elle en remplissant leurs verres d’eau.

— Merci beaucoup, sourit Leith en prenant une gorgée.

La travaillante lui offrit un sourire puis, elle ramassa les assiettes vides. Lorsque vint le tour de celle de Vigoth, elle ne put s’empêcher de démontrer de l’intérêt pour son accoutrement.

— Vous êtes un Gardien d’Aerinda ? questionna-t-elle.

— Oh, si. Vous n’avez rien à craindre avec moi dans les environs, rigola l’elfe lunaire, toujours aussi charmant avec la gent féminine.

La serveuse poussa un petit rire, le remercia pour son travail et retourna dans la cuisine.

— Tu sais que j’en suis une aussi, pas vrai ? demanda Leith avec impatience. Et bientôt, Azéna aussi.

— Je suis désolé, répondit Vigoth. Je vous aie volé toute la gloire.

— C’est quoi ce titre ? questionna la Kindirah en haussant un sourcil. Je crois que j’en n’ait assez merci beaucoup. Nul besoin d’un autre.

Vigoth rigola et lui donna une tape amicale sur le dos.

— Ne t’en fais pas, gamine. C’est juste un titre sophistiqué pour indiquer que tu es un dragonnier et que tu es dédié à protéger Aerinda contre le mal.

Azéna n’était pas certaine de comment elle se sentait face à ça. Cela semblait une lourde tâche, mais elle aimait participer à une aventure. Fayne lui accorda un subtil coup d’œil en signe d’encouragement. Elle était toujours là pour la supporter, cette vaillante Fayne. Elle apprécia son geste en silence.

Après le petit déjeuner, Vigoth l’aida à se préparer pour l’académie. Il rangea soigneusement tout l’équipement dans son sac à dos. Par la suite, ils installèrent la selle sur le dos de Tyrath qui renifla avec impatience, mais qui ne s’y opposa pas.

— Maintenant, tu pourras voler avec lui sans te faire mal, informa le grand maître.

Azéna cligna des yeux, incertaine de ce qu’elle devait répondre.

— Mais qu’est que tu attends ? demanda-t-il. Vas-y. Essaye ! Tu auras de l’avance sur les autres pendant le cours de vol.

— Cours de vol ? questionna-t-elle.

L’elfe lunaire la souleva et la déposa sur le dos du drake argenté qui s’agitait déjà avec enthousiasme.

— Attends ! Non, non ! C’est soudain ! C’est trop tôt pour moi ! hurla l’adolescente en panique.

— Tu devrais bien t’accrocher aux reines, recommanda Vigoth avant de se tourner vers Tyrath. Va lui montrer le monde bleu, mon grand.

Ce dernier s’élança à toute allure. Il grogna, trop excité pour contenir ses émotions et prit son essor. Alors que son compagnon commençait à grimper en altitude, Azéna réalisa qu’elle devait s’agripper aux rênes et vite. Elle tapota à leur recherche, paniquée par leur absence. Finalement, elle se contenta de serrer le cou de Tyrath. Elle ferma les yeux, ne désirant pas voir le sol et se retint pour ne pas crier.

Après un instant en plein vol, elle réussit à se détendre un peu. Elle trouva éventuellement les rênes. Une série de grognements retentirent. L’adolescente réalisa rapidement qu’il s’agissait d’un rire, aussi étrange soit-il. Elle sourit, ne prenant le prenant pas à cœur.

Leith et Vigoth observaient le duo avec fierté tandis que Fayne resta bouche bée, apeurée pour son amie.

Tyrath piqua vers le haut. Azéna leva les yeux et n’aperçut que du bleu et du blanc : le ciel et les nuages.

— C’est ça qu’il voulait dire par le monde bleu ! s’exclama-t-elle.

Elle effleura un nuage. Sa main en ressortit humide. Les deux soleils lui réchauffaient le visage tandis qu’une brise lui donna une sensation de rafraîchissement. Mais le plus important était le sentiment de liberté absolu. Personne ne pouvait lui dicter quoi faire là-haut.

— Finalement, ce n’est pas si mal que ça, se venta-t-elle en bombant légèrement le torse et en en redressant le dos avec fierté. Je n’avais même pas peur.

Elle ferma les yeux et savoura le moment. Peu de temps passa et une secousse l’ébranla. Tyrath grogna en signe d’avertissement et tourna si brusquement qu’il se pencha un peu trop sur le côté. Sa cavalière ne put s’empêcher de glisser. Son cœur battant la chamade, elle grinça les dents dans son inquiétude. Tyrath poussa un rugissement de victoire et tourna son corps de façon à ce qu’il soit à l’envers. Azéna se retrouva ensuite suspendu dans le vide, agrippée aux épines de son drake d’une main et aux rênes de l’autre.

— Arrête ! hurla-t-elle, désespérée pour qu’on la remettre à l’endroit.

Un sourire malicieux au visage, Tyrath revint à sa position originale et contracta ses muscles puissants. Il serra les ailes contre ses flancs et piqua vers le sol. L’atterrissage se termina de façon abrupte et rude.

Azéna sauta immédiatement au sol. Ses jambes tremblaient et elle devait se concentrer pour ne pas tomber à la renverse. Le moindre recoin de son corps était sous le choc.

— Pas si mal que ça, n’est-ce pas ? ricana Vigoth avec joie.

— Au moins, tu possèdes de l’expérience, encouragea Fayne en donnant un petit coup sur l’épaule de son amie en signe d’encouragement.

— Ouais, c’est ça, souffla la dragonnière qui n’en n’était pas convaincue.

— Bon, assez perdu de temps, annonça l’elfe lunaire en faisant signe à Karia de le suivre. Nous avons un dernier arrêt à faire et après, nous partons.

Ils passèrent au Bras de Melèriar. Melanh’tash avait complétée la commande. L’armure en cuir fût enfilée parfaitement par-dessus l’uniforme de la dragonnière. Celle-ci était surprise du confort de son habit. Elle accrocha son carquois ainsi que son arc long elfique à son dos et remercia la forgeronne.

— C’était un grand plaisir, répondit Mel avec douceur. Veillez à ne pas détruire mon magasin lorsque vous sortirez. J’ai entendu dire que Tyrath et toi êtes des trouble-fêtes, accusa-t-elle avec un sourire taquin.

Elle les salua respectueusement. Le groupe fit de même et se mit en route vers la lisière d’Agmeath. Vigoth était encore resté derrière pour profiter d’un moment seul avec Melanh’tash. Avec toute évidence, il était revenu avec un mal de fesses.

— Encore le légendaire coup de pied ? questionna Karia avec une pointe d’irritation. Tu devrais être plus polie envers les femelles. Tu sais qu’elles peuvent se prouver coriaces et ta vie pourrait en dépendre.

— Oh ne t’en fais pas, répliqua le dragonnier qui se frottait le postérieur. Un jour, ça va valoir tous mes efforts.

Sa partenaire soupira et s’avança pour prendre la tête du groupe, sûrement pour récupérer un peu de sa santé mentale.

Durant la marche, Tyrath bomba le torse en signe de fierté et lança des regards hautains en direction de Karia qui ne le prenait pas au sérieux. Azéna se remit de sa balade aérienne assez rapidement. Vigoth essaya de l’encourager en lui disant que plusieurs dragonniers vomissent durant leurs premières sessions.

— En plus, il arrive que ton dragon te jette au sol d’un coup violent de queue, raconta-t-il.

— Ce n’est pas du tout encourageant, lâcha l’archère qui sentit son cœur remonter dans sa gorge.

— Tu l’a eu facile, souligna-t-il. La prochaine fois, ça sera plus doux.

— J’espère bien. Je vais te rappeler à ta parole.

— T’en fais pas. C’est une promesse.

Il vérifia où était Leith et lui chuchota :

— Si ce n’est pas le cas, je vais t’aider personnellement à te sortir des ennuis. Une seule fois. Après, tu devras t’arranger toute seule.

Ils se serrèrent la main. Ce petit défi était excitant pour Azéna. Elle était assez confiante qu’elle allait l’emporter.

✦×✦

Le reste de la marche à l’académie était longue. Il n’y avait que des arbres, des clairières et de nouveaux paysages naturels qui ennuyaient Azéna à mourir. On n’y trouvait aucune trace de civilisation, sauf pour le chemin de terre qu’ils suivaient. Fayne et Leith examinaient les herbes de temps en temps, fâchant la pauvre apprentie dragonnière qui ne désirait qu’en finir avec ce voyage misérable.

— Sommes-nous presque arrivés ? se plaignit-elle pour la millionième fois.

Traînant des pieds et ne prêtant pas attention à la route, elle a se heurta au grand maître qui s’était arrêté.

— Cachez-vous et restez ici, ordonna-t-il.

Assoiffée pour l’action, Azéna ne l’écouta pas et le suivit à pas de loups. Fayne et Leith ne tentèrent pas de l’en empêcher, probablement lassées de son attitude. Vigoth s’écarta de la route pour s’enfoncer dans les sous-bois. Il se dissimula derrière un grand rocher, l’adolescente à ses talons. Il fronça les sourcils lorsqu’il se rendit compte qu’elle était près de lui.

— Je t’avais ordonné de ne pas me suivre, murmura-t-il en lui lançant un regard sévère. Bah ! Quoi qu’il en soit, il est trop tard à présent. Reste derrière ce rocher et garde le silence. C’est bien compris ? Ce n’est pas un jeu.

C’était étrange de le voir se comporter avec autant d’austérité. Il jeta quelques coups d’œil rapide de l’autre côté de la roche. Azéna n’osa pas l’imiter. Elle se raidit lorsqu’elle entendit des hurlements et des grognements animalesques.

— Qu’est-ce que c’est ? chuchota-t-elle.

Vigoth ne lui répondit pas. Il observait un groupe d’environ vingt-cinq hommes qui torturait un elfe de lune. Ceux-ci étaient habillés légèrement, de cuir, de peaux d’animaux et de fourrures. Ils étaient sales et des tachés de sang séché, laissant sous-entendre qu’ils n’avaient rien de gens civilisés.

Azéna osa jeter un coup d’œil et identifia un homme d’une taille impressionnante dont la masse musculaire était plus volumineuse que le reste des tissus sur son corps. Il avait de longs cheveux noirs en broussailles et un regard aussi froid et dur que la mort. Ses yeux ébène fixaient l’elfe de lune qui était couché sur l’herbe devant lui. Il était prêt à décapiter la pauvre victime de sa hache de guerre géante qu’il tenait d’une main sans difficulté.

Les membres de la tribu chantaient. Leurs voix étaient graves et rauques.

Nous faisons pleurer les dragons jusqu’à leur dernier souffle.

Nous faisons de leurs entrailles des rivières rouges.

Nous nous marrions dans leur mort.

Nous sommes le Sang du Dragon !

La jeune dragonnière tourna le regard et aussitôt qu’elle entendit la tête tomber au sol, elle frissonna. Les barbares hurlèrent leur victoire et le chant recommença.

J’aurai dû écouter Vigoth, se dit-t-elle.

Le grand maître lui fit signe de le suivre. Le duo rejoignit leurs compagnons sans que les barbares ne les remarquent.

— On devra quitter la route et passer autour d’eux, déclara Vigoth.

— Qui sont-ils ? demanda Azéna avec intérêt.

— Des hommes du Sang du Dragon et je crois que celui qui porte la grosse hache est leur chef de guerre.

— Ils sont encore vivants ? demanda Leith avec frayeur. Je croyais qu’on les avait chassés pour de bon.

— Apparemment, ils sont revenus et cette fois, ils sont bien plus puissants et vicieux que la dernière fois, répondit Vigoth avec une touche d’inquiétude. Ils tuent beaucoup de dragons dernièrement et agressent beaucoup de voyageurs.

— Il faut faire quelque chose.

— Nous faisons tout ce que nous pouvons, malheureusement. Ils sont difficiles à contrôler. De plus, leur nouveau chef de guerre s’avère beaucoup plus sauvage que le dernier.

✦×✦

Le reste du voyage fut tranquille. Le mystérieux dragonnier et son dragon noir les traquaient toujours des cieux.

— Ils nous suit toujours, fit remarquer Vigoth.

— Que suggérez-vous ? demanda Leith.

— Ils ne nous embêtent pas alors je suggère qu’on les laisse tranquille. Il est préférable de ne pas mettre les jeunes en danger.

✦×✦

Vers la fin du trajet, les inconnus firent demi-tour et disparurent pour de bon. Le groupe fut accueilli par une énorme porte qui faisait au moins vingt fois la taille d’un homme. Celle-ci était reliée à d’immenses remparts qui allaient révélées ce qu’Azéna devinait allait être une cité. Chaque dix mètres virevoltait doucement un grand drapeau beige décoré d’une silhouette noire d’une tête de dragon. C’était sûrement l’emblème de la cité. Vigoth sourit avec toute la fierté qu’un parent éprouverait envers son enfant.

— Bienvenue à Atgoren, refuge des dragonniers et de leurs dragons. Bienvenue à votre nouvelle maison.

Un énorme cadenas en forme de dragon barrait l’immense portail en fer devant laquelle Azéna et compagnie attendait.

— Qui va la ? demanda l’un des gardes qui patrouillait au sommet de la grande muraille.

— Grand Maître Vigoth ! s’exclama le second garde. Tu es aveugle Fuywen !

Ce dernier était assis sur le dos d’un énorme dragon vert tandis que le dénommé Fuywen l’était sur un dragon plus petit aux écailles brunes. Ils étaient équipés de longues lances, d’arcs elfiques, d’armure de plaques d’excellente qualité, de longues capes ainsi que de tabards à l’image des drapeaux.

— Sire, est-ce sécuritaire de laisser Tyrath passé sans renforcements ? demanda Fuywen.

Tyrath le foudroya du regard et montra les dents. Par précaution, Vigoth lui fit signe de se calmer et le jeunot lui obéit, mais ses yeux restèrent embrasés par la vigilance.

— Ne vous inquiétez pas, rassura-t-il. Il a trouvé sa dragonnière. Son tempérament devrait s’adoucir.

Sans perdre de temps, ils s’empressèrent d’ouvrir les portes en manipulant une clef avec de la magie. L’énorme clef fut lévitée jusqu’à la gueule ouverte du cadenas et y pénétra. Elle pivota et le dragon de fer ferma ses crocs sur elle. Ses yeux ternes s’illuminèrent et le portail s’ouvrit lentement.

— Vous avez remis la procédure du cadenas en place ? demanda Leith alors qu’ils traversèrent de l’autre côté des remparts colossales.

— C’est mieux avec le danger qui rôde, répondit Vigoth.

— N’y avait-il pas un mot de passe jadis lorsque le cadenas est en place ?

— Il y en a encore un, répliqua-t-il d’un ton nonchalant.

— Alors ? Comment se fait-il qu’ils ne vous l’aient pas demandé ?

— Je suis si souvent sortie qu’ils se sont lassés de le faire. Aussi, avec une demande spéciale et avec les privilèges de grand maître, c’est facile de s’en libérer.

Il sourit, amusé par ce qu’il venait de dire. Leith, de son côté, était toujours aussi déçue du grand maître. Fayne et Azéna observaient les merveilles d’Atgoren. Il y avait très peu de bâtiments, mais ils étaient énormes et construits avec tant d’amour et gravés de tant de détails que ceux de Nothar étaient réduits à une allure rudimentaire.

— Cette cité dans son entièreté a été adaptée aux dragons, expliqua Vigoth. Pour protéger nos habitants ainsi que les apprentis des académies, nous avons trois couches de murs dont le Grand Mur qui encercle Atgoren, un deuxième, qui est composé de deux murs séparés qui encerclent une des deux académie dénommés les murs externes, puis une troisième qui fait partie des académies comme telles. Celles-là sont tout simplement appelés les murs intérieurs.

— Donc, il y a le Grand Mur qui protège la cité, les deux murs extérieurs qui protègent l’enceinte d’une académie, résuma Leith. Cette dernière est fusionnée à deux autres murs.

— Atgoren est bien protégé, comparé à Nothar, nota Fayne. J’imagine le métier de dragonnier est dangereux.

— Je me questionnais sur l’usage d’une si grande porte, partagea Azéna. Oh, les toits sont équipés de plusieurs perches. C’est impressionnant !

Peu de temps après, Vigoth s’arrêta devant deux nouvelles portes reliées aux murailles extérieures, le tout très semblable à celles qu’ils venaient de traverser, mais en versions plus petites. Retenu d’épaisses chaînes, le cadenas en forme de I ce qui représentait le nom de l’académie, reposait tranquillement devant les portes. Heureusement pour le grand maître, celles-ci étaient déjà ouvertes et plusieurs personnes pénétraient à l’intérieur de l’enceinte.

— Je dois vous quitter, annonça-t-il avec déception. Après tout, ce matin, c’est la cérémonie qui marque le début du cycle d’entraînement et je dois y être présent. D’ailleurs, vous feriez mieux de vous dépêcher, car elle commence dans environ quinze minutes. Les portes d’Archlan sont à proximité. Suivez le chemin.

— Vraiment, Grand Maître, vous n’êtes pas très responsable pour quelqu’un qui ait obtenu un tel rang, grogna Leith avec inquiétude. Vous rendez-vous compte des responsabilités qui viennent avec votre titre ?

— Ils sont habitués et d’ailleurs, cette académie me tient à cœur. Ne vous inquiétez pas. J’ai tout simplement une façon de travailler qui est différente de la norme.

Il grimpa sur sa dragonne blanche et partit en direction de l’académie d’Isriss. Leith ne semblait pas être convaincue de ses dires. Dans un soupir désespéré, celle-ci continua son chemin en compagnie d’Azéna, Fayne, Tyrath et Shirah.

Enfin, ils trouvèrent une copie parfaite de l’entrée de l’académie d’Isriss à l’exception du cadenas qui était en forme de A. Les gardes les accueillirent en baissant la tête légèrement. Leurs dragons les imitèrent.

— Bienvenue à l’académie d’Archlan ! s’exclama l’une des gardes avec un rayonnement dans sa voix.

Alors que le groupe passa devant une dizaine de gardes en suivant le chemin principal, ils aboutirent dans l’enceinte d’un immense château. Azéna l’observa avec attention et remarqua qu’il s’agissait plutôt d’un fort à sept tours. Six d’entre elles longeaient les murailles. Le tout reliait à son milieu : la septième tour. Celle-ci s’avérait deux fois plus large et haute que ses petites sœurs et à son sommet était fiché un drapeau avec l’emblème de l’académie. L’archère devina que ce devait être là où le grand maître et les autres membres de l’équipe résidaient. Alors, les petites tours devaient constituer le dortoir où les apprentis dormaient.

Dans ce cas, où se trouvent les salles de classe ? se questionna-t-elle.

En sondant plus profondément la structure, elle comprit qu’il n’y avait pas que les tours et la muraille qui formaient le fort, mais aussi des salles et des corridors cachées à l’intérieur. Éberluée, elle réalisa que le palais de ses parents adoptifs n’était peut-être pas un si grand labyrinthe après tout.

— La structure de l’académie est complexe, rayonna-t-elle en détournant le regard dans tous les sens pour scruter son entourage. Ça va être intéressant de tout explorer.

Il y avait environ une centaine de personnes qui attendait qu’on ouvre les portes de l’académie. Parents et enfants jacassaient, d’autres s’avéraient émotionnels. Azéna devait être la seule à ne pas attendre avec sa famille. Cette réalisation lui donna légèrement la nausée.

Elle remarqua que tous les apprentis possédaient les mêmes uniformes qu’elle, mêmes ceux qui n’étaient pas encore liés à un partenaire ailé. Il y avait des dragons de toutes les couleurs, allant de blanc à noir en passant par rouge, vert, gris, brun et même bleu. Mais le plus beau, d’après Azéna, était le sien. Tyrath ressortait de la foule grâce à ses yeux améthyste qu’aucun autre des siens ne semblait posséder ainsi que ses écailles d’un argenté sublime.

— Tyrath ! Tu as enfin trouvé ta dragonnière ! remarqua un homme d’un timbre céleste.

Lorsqu’Azéna tourna la tête, elle aperçut un visage qui lui était familier. Ces cheveux et yeux...

— Vigoth ? questionna-t-elle en haussant un sourcil avec incrédulité.

— Je présume que vous avez rencontré mon petit frère, répliqua l’elfe de lune qui était monté son dragon. Je m’appelle Terenas et voici mon dragon Rendar du clan Nusx.

Rendar était le plus grand dragon qu’Azéna avait jamais vu. Il était du muscle pur, une bête qui faisait la trembler la terre sous chacun de ses pas. Il grogna et une bouffée de fumée sortie de ses naseaux. Ses prunelles transperçaient l’âme et rappelaient ce qu’il était vraiment dans l’état sauvage : un prédateur alpha. Terenas portait un ensemble élégant, sûrement dût à son rang à l’académie. Il sauta en bas de l’immense dragon cramoisi et s’approcha d’Azéna pour lui serrer la main.

— Terenas Jarthen. Je suis le grand maître de l’académie d’Archlan. Je vous souhaite la bienvenue, en passant.

— J-je... m’appelle... ehh..., balbutia Azéna en fixant le grand maître avec incrédulité. Azéna Kindirah. Euh, excusez-moi, vous êtes son jumeau, à Vigoth, je veux dire ?

— Non, ria-t-il doucement en relâchant sa main. En réalité, je suis né une décennie avant lui. On se ressemble par pur hasard. Néanmoins, les gens nous confondent parfois.

Azéna remarqua les différences entre son interlocuteur et son frère. Les expressions générales de Terenas s’avéraient plus sévères que ceux de son frère qui expérimentait la vie de façon beaucoup plus détendue et joyeuse ; de même fut pour sa voix. Ses cheveux étaient peignés et tressés à la perfection contrairement à que ceux de Vigoth qui vivaient constamment au cœur d’un combat. Leur beauté et leur charme discernable, ils s’exprimaient sous des facettes opposées. La sagesse était en le regard de Terenas tandis que la rébellion fut dans celui de son jeune frère. Malgré tout, il semblerait que les divinités veillaient sur les deux.

Le grand maître d’Archlan sourit ; un sourire qui brilla dans sa bienveillance.

— Je suppose que tu as des questions.

Sa supposition prit l’adolescente au dépourvu mais lui rappela qu’elle recherchait effectivement des réponses.

— Pourquoi as-tu enchainé Tyrath ? demanda-t-elle avec un brin de sècheresse dans son ton de voix.

— Azéna ! coupa Leith. Patience. Il s’expliquera lorsqu’il le désirera.

— Ce n’est rien, répliqua Terenas avec la plus grande des politesses. Allez s’y, mademoiselle Kindirah.

— Comment Tyrath a-t-il été amené jusqu’à Nothar ? questionna cette-dernière, toujours aussi impatiente.

— Je peux vous répondre, mais dans les plus brefs délais alors les détails devront être sacrifiés, car la cérémonie va débuter sous peu.

Toute l’attention d’Azéna était maintenant concentrée sur ce qu’allait dire son interlocuteur.

— Le père et la mère de Tyrath sont deux dragons gris très redoutés, commença-t-il avec méfiance, comme s’il avait peur que quelqu’un ne l’entende. Ceux-ci ont causé de nombreux problèmes et sont éventuellement tombés amoureux. Évidemment, nous ne pouvions pas empêcher un amour entre deux dragons. Le problème n’était pas leur relation, mais l’enfant qu’ils produiraient. Car, vous voyez, les dragons ont une forte tendance à hériter du caractère de base de leurs parents. Lorsque Tyrath sortit de son œuf, sa mère était absente pour des raisons de sécurité. Alors, il fut élevé par une dragonne blanche qui a tenté de lui montrer de différentes valeurs du mieux qu’elle le put. Malheureusement pour nous, notre dragonnet gris s’est avéré difficile.

Il marqua une pause et jeta un coup d’œil en direction des autres dragonniers afin de s’assurer qu’il n’était pas en retard puis redirigea ses yeux pour rencontrer ceux de Leith puis Azéna.

— Quoi qu’il en soit, il refusait tout contact avec les nouvelles recrues potentielles. Après quelques années, nous nous sommes rendus à l’évidence qu’il s’était surement lié à quelqu’un d’autre durant sa tendre jeunesse ce qui aurait expliqué son comportement agressif.

Ses yeux bleus se posèrent sur Azéna. L’adolescente ressenti le besoin de s’échapper de son regard perçant, mais il le détacha avant qu’elle ne puisse réagir.

— Sept jours plus tôt, continua-t-il, alors qu’un garde effectuait sa patrouille matinale, il a remarqué que notre jeune dragon gris était porté disparu. Personne ne l’a vue s’enfuir mis à part deux gardes de nuit qui ont été sauvagement attaquées par Tyrath en tentant de l’empêcher de partir. Cela ne m’étonne pas puisqu’il est très indépendant, têtu et déterminé.

Il lança un sourire au drake argenté qui le fixait de ses petits yeux méfiants.

— Quoi qu’il en soit, je dois vous quitter. Il est temps que la cérémonie débute. Ravis de vous avoir rencontrée, Dame Kindirah et bon succès dans vos études.

L’elfe de lune enfourcha son dragon. Le mâle rouge foudroya Tyrath du regard, le laissant savoir qu’il était le maître ici. Le jeunot grogna et souffla une brise entre ses crocs en signe de défiance. Un sourire malicieux et hautain se dessina sur le coin de la bouche de Rendar alors que son dragonnier tira sur ses rênes. Il obéit et s’envola pour aller se percher sur les murailles de l’académie près de l’entrée principale.

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