le retour des abeilles

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« Zlough »

Je me réveillai en sursaut. Je voyais de nouveau avec les yeux de Brice.

L'adolescent méditait, seul, chez lui, sa mère ayant pris l’habitude de squatter le bistrot tous les soirs. Il était ravi que cette garce de Juliette ainsi que sa génitrice soient mortes. La gamine l’avait bien cherché et sa génétrice aurait dû mieux éduquer son enfant : les petites filles ne devaient pas se moquer des grands garçons.

« Il a vraiment des drôles d’idées celui-là. Un peu arriéré comme réflexion. », pestai-je.

C’était ainsi qu’il concevait la vie et gare à ceux qui ne le respectaient pas. Il disposait d’armes redoutables comme en témoignait son attaque contre Juliette et Viviane.

« C’est sûr... qu’avec une armée d'abeilles, c’est plus facile ! », marmonnai-je.

« Au tour du p'tit nouveau maintenant ! », s'exclama Brice.

Hein ? Il va me faire quoi lui ?

Ce dernier l’avait humilié et fait lourdement chuter. Cela méritait une punition. Bon, pas aussi fort que pour Juliette, car lui ne l’avait pas fait exprès ; c’était juste un coup de chance… Mais assez fort tout de même pour lui lancer un avertissement.

Beh bien sûr. Ce mec est vraiment pas net.

Le nouveau devrait le respecter à l’avenir, quitte à baisser son niveau de jeu. Cela ne plairait peut-être pas à Vivien, mais qu’importe ; si Vivien était le boss, Brice était le second. Et l’heure était peut-être venue de le détrôner. Après tout, ce morveux ne possédait pas d’arme spéciale.

« Pour qui il se prend ce con ? Il n’est pas le seul à avoir des pouvoirs», me révoltai-je.

Brice décida d’agir quelques minutes plus tard. Il invoquerait de nouveau les abeilles, avec moins de fureur que la dernière fois.

Les insectes devaient simplement le blesser, et non le tuer : trois morts en deux nuits deviendrait trop risqué, même pour lui.

Il ne va pas prendre le risque de m'attaquer ? pensai-je.

Comme la veille, il ouvrit la fenêtre et se masturba… à nouveau, les insectes sortirent et s’envolèrent.

L’essaim était cependant plus petit que celui destiné à Juliette et Viviane.

« Zlough »

Heureusement je n’avais pas ouvert ma fenêtre, frileux de nature. J’attendis avec un peu d’appréhension l’arrivée des insectes et espérai qu’ils ne se miniaturiseraient pas comme la nuit précédente. Quelques instants plus tard, l’essaim cogna avec fureur contre les vitres.

Au bout de quelques minutes de ce bruit incongru, mes parents vinrent dans ma chambre.

« C’est quoi ce bou… »

Mon père ne termina pas sa phrase en voyant les abeilles s’agglutiner sur la vitre.

« Mon dieu, d’où est-ce qu’elles sortent, celles-là ? s’enquit mon père.

– C’est quoi ce cirque ? renchérit ma mère.

– Je ne sais pas... mais heureusement que je ne dors pas la fenêtre ouverte ! m'exclamai-je.

– Oui, mais nous, si. »

Maman rentra précipitamment dans leur chambre puis elle revint nous voir soulagée et observa avec nous les insectes.

« C’est bizarre qu’elles s’obstinent sur tes carreaux alors qu’elles auraient pu aller dans notre chambre, indiqua ma mère.

– Heureusement qu’elles ne sont pas très futées, c’est clair. Par contre, je ne comprends pas non plus. Ce n’est pas rationnel comme comportement, ajouta mon père.

– Ouais, c’est bien beau tout ça, mais j’espère qu’elles vont bientôt repartir. J’aimerais bien me rendormir, moi. », déclarai-je.

À ces paroles, l’essaim nous fixa avant de s’envoler vers une destination inconnue.

« Je crois que tu leur as fait peur, rigola mon père.

– Très drôle. Bon dodo maintenant ! concluai-je avant de remercier mes parents.

– De rien. De toute façon, on se demandait ce qui se passait, répondit mon père.

– Et on n’a plus à s’inquiéter maintenant, vu qu’elles sont parties. », termina ma mère.

Maman me déposa un baiser sur le front avant de rejoindre papa dans leur chambre.

« C’est tout ? Non, ce n’est pas possible, c’est trop facile. Il me réserve autre chose… », m'alarmai-je.

« Zlough »

C’est reparti pour un tour. Une nouvelle fois avec Brice.

« Il ne dort jamais ce con ? », m'énervai-je.

L’essaim retourna dans son propriétaire ; insatisfait !

Brice voulait un avertissement plus fort pour le nouveau : ses abeilles s’étaient contentées de tambouriner sur les vitres et cela n’avait même pas fait sursauter son ennemi. C’était bien trop peu.

Brice devait regagner son contrôle. Ses alliées devaient piquer son rival ; pas le tuer certes, mais au moins le faire souffrir…

« Génial. Je vais avoir droit à une seconde attaque. », marmonnai-je.

Une fois encore, Brice éjacula un essaim, à peine plus gros que le précédent, mais beaucoup plus excité.

« L’heure de la vengeance a sonné p'tit nouveau. Tu vas apprendre à tes dépens que tu dois me respecter ! »

Brice s’adressa ensuite à son armée :

« Ne me décevez plus. Brisez cette vitre et piquez tous azimuts. »

Tout à l'heure, j'étais confiant, j'avais perçu – merci mon sixième sens – que les bestioles ne m'attaqueraient pas ! Mais là...

Le groupe de Brice n’allait pas tarder à rappliquer. Il allait sûrement se miniaturiser pour passer par les clinches ou alors, comme le suggérait Brice, casser les carreaux et m’affronter… Cette fois, je n’allais pas échapper aux piqûres. Je paniquais, car je ne voyais pas comment me débarrasser de ces apinés. Il ne m’était même pas venu à l’idée de prendre une bombe insecticide !

Je tentai de me lever de mon lit, mes jambes flageolèrent et je dus m’appuyer sur le meuble pour ne pas tomber. J’entendais leur bourdonnement. Il ne me restait plus que quelques minutes avant l'attaque. Je devais trouver quelque chose et vite. Hélas, je demeurais ankylosé, mes pieds aussi lourds que du béton.

L'heure fatidique arriva : les insectes s'approchèrent puis tournèrent en un cercle ordonné...

Je me dirigeais péniblement vers les carreaux, en traînant mes pieds sur le sol, hypnotisé par l’essaim.

D’autres abeilles venues je ne sais d'où s'ajoutèrent au groupe et agrandirent la spirale contre les vitres. Des centaines d’yeux me fixaient…

Elles vont se miniaturiser pour rentrer dans ma chambre comme elles l’ont fait la veille avec Juliette. Mais barre-toi donc, me disait ma tête tandis que mon corps restait scotché devant ce spectacle.

Machinalement, je mis mes mains sur les vitres et une chose incroyable se produisit : une aura d’une lumière aveuglante illumina l'obscurité. Au sein de cette phosphorescence se dessina un regard malicieux et bienveillant, vert noisette, qui recouvrit entièrement les carreaux. Il happa les abeilles et tel le flûtiste de Hamelin, entraîna l'essaim dans une symphonie voluptueuse, les guidant sereinement vers la maison de Brice.

Qu'est-ce que c'est cette conner...

« Zlough »

Je tombai par terre douloureusement, n’ayant pas prévu le jump-look et me retrouvai avec l'adolescent, dans une colère noire.

« Mais qu’est-ce que vous faites ? Ne revenez pas, vous n’avez pas fini votre mission. Vous devez piquer ce petit con. À l’attaque ! »

Pourtant l’essaim ne l’écouta pas et rentra au bercail, guidé par l'aura mystérieuse. Brice sut alors qu’il avait perdu. Il se plaça devant la fenêtre, l’ouvrit et attendit sagement le retour de son armée.

« Vous avez fait du mieux que vous pouviez. Je ne pensais pas que le petit nouveau possédait un pouvoir. À moins qu’il ait reçu l'aide de quelqu’un ? La prochaine fois, il n'aura pas cette chance ! »

Le rituel achevé, il se calma en regardant le paysage. Comme à chaque fois que la colère le submergeait, il laissait son esprit vagabonder sur l'horizon. Il s'imaginait alors vivre loin de cette bâtisse, coulant des jours heureux avec son père. Il était conscient du côté chimérique de ces pensées, mais elles finissaient par le canaliser. Plus tard, il se rhabilla et se coucha. Il n'avait pas envie que sa mère le voit nu, s'il lui prenait l'idée de soulever les couvertures : cela lui rappelait de trop mauvais souvenirs.

« Zlough »

Comme Brice, je ne comprenais pas comment était apparue cette aura, mais en tout cas, elle m’avait bien aidé.

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