triste nouvelle
Quelques instants plus tard, Brice ne bougeait plus.
Pauline le regarda tendrement, avant de le détacher. Elle le porta à l’extérieur, au fond du jardin, puis l'y déposa.
« Il pèse son poids le saligaud. », pesta-t-elle.
Elle s’avança vers la grange pour récupérer un bidon d’essence, en versa le contenu sur le corps et craqua une allumette.
Ensuite, elle s'allongea et regarda le cadavre de Brice s'embraser ; elle ferma les yeux pour ne pas pleurer et essaya de penser à leurs moments heureux sans y parvenir. La mort de son enfant était nécessaire, il avait échoué, mais tout de même... ça aurait pu se terminer autrement !
Elle savait que les vers étaient la dernière étape de sa mutation. Elle avait voulu profiter de ces ultimes moments avec son fils, même si, sans doute, il ne l’avait pas compris.
Une vague de colère la submergea brusquement.
Son enfant unique était mort, car un inconscient l’avait provoqué !
Tout va être de ma faute maintenant. Elle le tue et pour se donner bonne conscience elle rejette tout sur moi.
Le petit nouveau avait tenu tête à son fils ce qui l’avait conduit à sa perte, et ça, elle ne lui pardonnerait jamais. Demain, elle prendrait sa revanche. Le petit nouveau allait souffrir avant de mourir. Foi de Pauline.
« Super. Quand je vois comment elle a assassiné son fils, je me demande ce qu'elle va me faire», frissonnai-je.
À cette idée, Pauline se détendit et regarda une dernière fois son fils.
En se rapprochant du cadavre, elle réprima un haut-le-coeur et se pinça le nez pour atténuer l'odeur de souffre qui s'en dégageait. Puis, lorsqu'elle s'habitua à cette puanteur, elle chercha dans sa poche une petite boîte et y déposa quelques cendres de son fils.
« Repose en paix mon petit. Tu resteras toujours avec maman. »
Pauline regagna sa maison, se lava les mains et monta dans sa chambre avant de poser la petite urne improvisée sur la table de chevet.
Enfin, après avoir enfilé son pyjama, elle se coucha.
« Demain sera un autre jour. Profite bien de ta journée le petit nouveau, car ce sera la dernière… Je peux te l'assurer ! »
Génial, ça promet pour la suite. Comment je fais pour dormir, moi ?
M'apercevant que j'étais couvert de vomi, je décidai de tout nettoyer, et descendis dans la salle de bains chercher de l’essuie-tout ainsi que des produits d'entretien.
Avec un peu d'huile de coude, ma chambre était redevenue propre et je me recouchai. J’eus du mal à m’endormir en pensant à cette soirée de dingue, mais le sommeil finit par me happer.
*
J’avais également vomi en voyant les lombrics sortir du corps de Brice et obstruer ses voies respiratoires. Ils m'ont laissé dans ces souillures jusqu’à la fin du passage.
Ensuite, un docteur entre, me pique et patiente jusqu'à ce que le produit agisse, avant d’inviter d'un signe de la main l’infirmière et l'un de ses comparses.
Les deux hommes me libèrent de mes sangles. Ils me relèvent, puis me tiennent par les épaules. Avec leur soutien, j’arrive tant bien que mal à marcher jusqu’à la chaise. Mes pas sont lents et crissent sur le carrelage, des crampes gênent ma progression et mon souffle se saccade. La sueur coule de mes tempes, descend le long de ma nuque, jusqu'à mon torse et pourtant je grelotte.
Enfin, j’arrive à destination et me laisse tomber sur le siège. Pendant ce temps, l’aide-soignante change les draps. Peu après, ils m’allongent de nouveau avant de m'attacher.
L’infirmière m’avait prévenu : les images de ce soir avaient été beaucoup plus glauques que les précédentes : j’avais assisté à un inceste qui s’était transformé en meurtre horrible. Brice avait connu d’atroces souffrances, et était mort d’une manière lente et particulièrement douloureuse. Ces vers dans sa bouche, j’en gardais encore des frissons.
Je ne reviens pas sur le gamin qui décidément traverse tout cela avec un calme olympien : sur le coup, il vit la douleur des autres. Il est choqué, mais rapidement, il oublie tout et se rendort paisiblement…
Les médecins partent et me laissent avec la seule présence féminine que je connaisse ici. Elle prend ma main pour me calmer. Malheureusement, ce n’est pas aussi simple que ça, je suis bouleversé par ce que je viens de voir.
Elle garde ce contact un certain temps, ce qui me permet de me ressaisir. Elle me rassure, me dit que tout va bien, que tout est terminé.
Mes tremblements continuent de plus belle, elle décide alors de me donner un léger calmant et un verre d’eau que je peine à avaler. Elle est obligée de me tenir le gobelet et me fait boire de petites gorgées.
« C’est bien. Détendez-vous. C’est fini. »
Elle tapote mon oreiller après m’avoir redressé la tête, ensuite elle me cale de nouveau contre le coussin.
« Je vous avais dit que les images seraient plus violentes. Vous n’étiez pas assez préparé cette fois. Je pense qu’ils vont adoucir les prochaines visions. Certains ont peut-être pris du plaisir, cependant ils ne représentent pas la majorité. Rien ne sert de griller les étapes. Ils ont tenté, mais ne se sont pas rendus compte que vous n’étiez pas encore prêt pour la dernière épreuve. Du coup demain sera sans doute un peu moins désagréable, toutefois ne vous attendez pas à une promenade de santé. Nous en parlerons plus tard. Pour l’instant vous devez vous reposer. »
J’acquiesce silencieusement. Je tente de trouver son regard pour qu’elle m’aide, mais elle garde ses distances.
« Ne vous méprenez pas. Je ne suis pas ici pour vous aider à vous enfuir. Je suis là pour prendre soin de vous à chaque fin de journée, savoir comment vous allez, comment vous réagissez à la drogue et à vos passages. N’attendez rien de plus de moi. Ce n’est pas mon job. J’aime mon travail et je suis de tout cœur avec eux. Ne l’oubliez jamais. »
Je hoche la tête, je comprends sa position, même si elle voulait m’aider, elle ne le pourrait pas. Ils la surveillent, donc elle doit faire semblant d’approuver leurs méthodes. À moins qu’elle ne me dise la vérité et qu’elle soutienne activement leur projet. Après tout je ne la connais pas plus que ça !
« Je vois que vous avez compris. C’est bien. Votre rythme cardiaque est redevenu normal. Je vous en félicite. Je vais vous faire une piqûre pour la nuit. Je sais que vous n’aimez pas trop cela, mais au moins vous pourrez récupérer un peu. »
De nouveau j’approuve de la tête. Je n’ai plus qu’à attendre. Je ferme les yeux et sens un picotement. Dans quelques instants avec l’aide de leur calmant, je dormirai…
Un autre jour se lève, de nouveaux « souvenirs » vont m’assaillir. Normalement ceux-ci seront moins violents que la veille. À moins que l’infirmière ne m’ait menti… Avec eux il faut se méfier de tout. Je ne peux pas faire grand-chose pour l’instant, saucissonné comme je le suis.
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