Isabella
Arrivées sur le palier, Isabella et Claudia se séparèrent. La première me prit par la main et m’emmena dans une chambre, tandis que la seconde entraînait Dimitri dans une autre. Les deux sœurs chantonnaient gaiement.
« Par ici mon petit. Je vais te montrer quelque chose que seuls les privilégiés peuvent découvrir », susurra-t-elle suavement en laissant glisser son majeur sur la poitrine.
Je me laissai guider, envoûté par la voix et la grace d'Isabella. Ensemble, nous entrâmes.
« Je ne vois rien de spécial, commentai-je.
– Mais non, ce n’est pas là, me coupa la jeune femme avant de reprendre, toujours aussi mystérieuse :
Suis-moi, tu ne le regretteras pas. »
Elle me désigna une porte à moitié masquée par une armoire imposante.
« Ferme les yeux.
– Je suis obligé ?
– Oui gros nigaud. Tu ne risques rien. »
Je décidai de lui faire confiance malgré l'appréhension qui revenait.
La curiosité est un vilain défaut et même si cela sonnait faux, je voulais savoir ce qu’il y avait de si important dans l’autre pièce. De plus, j'étais sous le charme de l'adolescente : grande, de longs cheveux roux cascadant sur ses épaules, un grain de beauté au-dessus des lèvres mises en valeur par un rouge sensuel, des yeux bruns, des jambes élancées et un sourire éclatant et malicieux qui m'attirait !
« Tu peux ouvrir les yeux. », me murmura-t-elle d'une voix enjoleuse.
J’obéis, mais mis du temps à me repérer, car la nouvelle salle était sombre. Une veilleuse apportait le seul éclairage de la pièce. Je ne voyais plus Isabella. Le silence me glaçait. J'avançai précautionneusement, car l'obscurité baignait la pièce.
Je me cognais contre des pieds, de table ou de chaise. Des rires perçants, résonnant dans toute la pièce, répondaient à mes jérémiades, sans que je parvienne à déterminer leurs provenance. J'avais envie de leur hurler d'arrêter, mais les mots restaient bloqués dans ma gorge. Je continuais, difficilement, à progresser.
De nouveau, mes hanches percutèrent une table ou un bureau, je n’étais sûr de rien avec ce manque de luminosité.
Le choc me provoqua un cri de douleur. Je me massai lorsque je sursautais au son d'Isabella. J’avais beau scruter la salle, je ne l’apercevais pas. La panique, déjà tangible, me submergea.
« Tu aimes mon chez moi ?
Je respirai profondément avant de lui répondre, afin d'abaisser la tension ambiante. L'humour et la politesse m'aiderait à combattre le malaise qui s'infiltrait en moi insidieusement.
Malgré tout, cette fille m'hypnotisait, elle dégageait un tel charisme que j'en perdais tous mes moyens. La promesse, fanstamée, d'un plaisir intense combattait ma raison. Un mélange de répulsion et d'attraction se livrait bataille dans mon esprit. Je devais lui répondre avant de perdre complètement pied !
– J’ai du mal à voir la déco, il fait trop sombre, répondis-je, le plus calme possible.
– Laisse ma voix te guider et je te ferais découvrir mes trésors.
– OK. », soufflai-je.
De toute façon, je n’avais guère le choix ; si je voulais découvrir les trésors de cet endroit, il fallait bien que je continue à avancer.
« Essaie de marcher droit, il n’y a pas beaucoup de meubles, ça devrait être facile.
– Compris. »
Je me laissai conduire par la voix mielleuse d’Isabella. Je constatai en effet le peu de mobiliers, hormis ceux que j'avais bousculé et me demandai quelle pouvait en être son utilité.
À force, mes yeux s'habituèrent à la pénombre et je me dirigeai vers le seul point de lumière de la pièce. Ce dernier mettait en valeur une chaise en bois comportant des sangles pour les pieds, les mains et la tête. L'adolescente trônait dessus.
« Regarde-là. N’est-ce pas la plus belle chaise au monde ? On l’a trouvée dans un vieux pénitencier. »
Soudain, je réalisai que c’était une chaise électrique !
Celle que l’on croisait au bout des couloirs de la mort aux Etats-Unis !
« Super. J’espère que tu as vu des choses plus sympas aux US.
– J’ai adoré notre virée au Texas. Je te raconterai plus tard dans la soirée. Tu veux essayer ?
– Non merci. C’est gentil de proposer. Plus tard, peut-être. »
Isabella se leva de la chaise et m’invita à prendre sa place.
« Tu verras, c’est très confortable. »
Toujours sous son charme magnétique, j'obéis aveuglément !
Brusquement, une force invisible m'obligea à fermer les paupières.
Le vide m'envahit et je me retrouvai projeté ailleurs, au centre d'un immense couloir blafard, éclairé par une lueur rouge vacillante dans le lointain.
Soudain, des ectoplasmes se matérialisèrent... et foncèrent vers moi !
Ils m'encerclèrent, marmonnant des paroles incompréhensibles. J'y décelai plusieurs sentiments : de la peur, de la tristesse, de la colère, de la folie. Je commençai à étouffer. Je tentai de donner des coups de poing pour les éloigner, mais ils passèrent à travers eux !
Les chuchotements se transformèrent en un vacarme aigu et une douleur lancinante martela l'intérieur de mon crâne. Je ne comprenais toujours pas leur discours... lorsqu'une gifle me sortit de ma torpeur.
« Aïe !
– Qu'est-ce que tu fous ?
– Rien.
– C'est pas le moment de rêver, s'indigna Isabella. Tu viens ? Il est temps que je te montre ma surprise.
– Tu peux m'aider à me relever ? demandai-je timidement.
– Oh, le gros bébé a besoin d'aide ? »
Je hochai la tête. Les fantômes m'avaient vidé.
« Merci, balbutiai-je.
– Tu es très chanceux. Rares sont ceux qui ont ce privilège. Comme tu as été gentil avec moi, je vais te montrer le chemin jusqu'à l'antre des délices. »
Compréhensive, l'adolescente prit ma main, me releva et m’emmena jusqu'à cette salle. Avant d'y entrer, elle me prévint :
« Ferme les yeux, l'éclairage est plus fort, là-bas. »
Heureusement qu’elle m’avait prévenu, car même les yeux fermés, la lumière piqua mes cornées.
Elle m’orienta dans la pièce, non sans mal ; à plusieurs reprises, je manquais de trébucher. L'intensité lumineuse me faisait perdre mes repères, de plus le sol était glissant, et sans son aide, je me serais étalé.
Isabella me maintenait fermement et mon esprit, un brin malade, s'imaginait ses hanches, puis ses seins, se frotter contre mon corps, sorte de préliminaire aux délices évoqués, je percevais des gloussements répondant à cette attente, et une raideur parvint au niveau de... lorsque soudain, une douleur vive me transperça ; on maintenait fermement ma tête dans de l'eau, sans doute dans un bocal : je sentais du verre contre mon crâne !
Putain elle me fait quoi là. Je vais m’étouffer, ou me noyer, si elle continue.
J'aurais dû me défendre, mais une force invisible me paralysait !
Je fermai ma bouche pour éviter d’avaler le liquide, tentai de reculer et de m’échapper de l’étreinte de la jeune fille, mais ne le pus. Je parvins à discerner ces propos :
« Comment trouves-tu ma surprise ? Elle est cool non, hurla-t-elle, avec un rire strident. »
Je ne pouvais pas lui parler sans risquer la noyade, ce qui l'agaça.
« Tu ne réponds pas, c’est pas bien. Déjà que tu n’es pas très bavard ».
Et pendant qu’elle râlait, elle continuait de me maintenir le crâne sous l’eau…
« Allez, encore un petit effort… ».
Je commençais à manquer d'oxygène : ma peau devait bleuir à vitesse grand V !
Heureusement, elle retira ma tête hors du liquide un court instant avant de l’y replonger furieusement. Mes forces m'abandonnaient peu à peu. Par chance, j'eus droit à un répit : le temps de tousser pour recracher un peu d’eau et de respirer une bouffée d'air salvatrice avant de refermer ma bouche. Elle fut obligée de me soutenir, car mes jambes se dérobèrent et une migraine violente m’attaqua.
« Comme c’est marrant ce petit jeu. Mais ne t’inquiète pas, ce n’est que le début… »
Elle continua ce petit manège trois ou quatre fois, mes poumons se compressèrent, mon coeur battait la chamade et mon crâne semblait être sur le point d'exploser.
Je contractais également ma bouche afin d'éviter que mes lèvres s'ouvrent et que le liquide me submerge, tel un tsunami dévastateur. Voyant que je ne supporterais cette situation bien longtemps, elle décida de stopper.
« Je crois que c’est bon pour cette fois. »
Je ne répondis pas ; j’étais encore groggy.
« Je vais te montrer quelque chose. »
Elle est cinglée cette fille ! Je ne la connais même pas !
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