Chapitre 96

5 minutes de lecture

Les mains dans les poches de son sweat-shirt et la capuche rabattue sur sa tête, l'individu remonta la charmante rue Léon Blum en regardant plusieurs fois autour de lui pour s'assurer qu'il n'était pas suivi. Il arriva dans le centre-ville où grouillaient les boutiques les plus cotées, puis continua sa route jusqu'au petit bijou du quartier, la librairie Laporte-Olicart. Il en passa l'entrée, rabaissa sa capuche et jeta des yeux inquiets autour de lui. Lorsqu'une voix l'appela, il tressaillit et se retourna, le cœur battant, puis soupira. Il esquissa un sourire gêné lorsque la gérante des lieux lui demanda où il était passé, et trouva un prétexte habile pour esquiver la question en se précipitant aux toilettes. Face aux miroirs étincelants, il tenta de reprendre son souffle jusqu'à ce que la voix qu'il avait tant crainte retentisse enfin derrière lui.

- Je ne croyais pas t'avoir donné rendez-vous aux toilettes... Est-ce dû à ta mère ou à ton envie irrépressible de me fuir depuis quelque temps ?

- Je ne te fuis pas...

- Bah voyons !

Le parasite s'approcha et jugea son acolyte avec dureté.

- Allons droit au but : où est-ce que tu en es ?

La personne interrogée joua nerveusement avec les manches de son sweat trop grand et se mordilla les lèvres.

- Je fais ce que je peux, mais ce n'est pas facile...

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Eh bien... Quand il dort, il répète son nom. Et quand on baise, bah... ça se voit qu'il ne pense qu'à elle, tu vois ?

L'autre fronça les sourcils.

- Sérieusement ?

- Ouais...

L'individu en sweat croisa les bras devant le regard inquisiteur de son intime.

- Je lui ai dit que je l'aimais, comme tu me l'as demandée.

- Et alors ?

- Et alors c'était une idée à la con ! Je te l'avais dit ! Personne ne tombe aussi vite amoureux d'un inconnu !

Une expression roide lui répondit.

- Qu'est-ce qu'on peut faire dans ce cas ? Il faut trouver un moyen de se débarrasser de lui pour mener à bien notre projet !

- C'est ton projet, tête de nœud ! Et si tu n'avais pas autant envie de détruire la vie de Fanny, on pourrait le laisser tranquille !

- Non ! Pas après tout ce que j'ai accompli, Laetitia !

Cette dernière dévisagea son bras droit, légèrement irritée.

- Pourquoi tu détestes autant cette fille ? Pourquoi tu veux la briser ? Qu'est-ce qu'elle t'a fait ?

La malveillante créature s'assombrit.

- Tu ne peux pas comprendre.

- Je peux toujours essayer, ajouta la jolie blonde en avançant lentement vers son acolyte.

Sa connaissance rumina quelques paroles indistinctes puis la fixa gravement.

- Je ne t'aurais jamais demandé de séduire Gatien s'il avait décidé de... Mais il a fait le mauvais choix en s'attachant à elle...

- Tu as de la rancœur contre lui ? s'écria Laetitia, bouche bée. C'est lui que tu veux faire souffrir en punissant Fanny ?

- Lui et tous ceux de son espèce...

- Mais pourquoi ?

L'autre s'amusa de son effarement.

- Il est temps que quelqu'un paye pour ses crimes.

- Et aimer Fanny est un crime ?

- Aimer un monstre, oui.

La jeune fille suffoqua.

- Tu adores ça, pas vrai ? Avoir le contrôle sur les gens... bruit-elle après un court silence.

- Dans la vie, il y a les dominants et les dominés... Si tu crois que je me soumettrai un jour à cette deuxième catégorie, c'est que tu ne me connais pas.

Laetitia baissa les yeux au sol. Son acolyte posa une main sur son épaule.

- Je fais ça pour nous, d'accord ? On forme une équipe, tu te souviens ?

L'étudiante acquiesça en signe de soumission, puis accepta - à contrecœur - l'embrassade qu'on lui proposait. Elle ne dit rien, mais fit de son mieux pour contrôler ses tremblements. Elle avait peur, peur de la situation dans laquelle elle s'était mise, peur des sentiments qu'elle commençait à nourrir pour Gatien, et peur de la réaction de son intime en les découvrant.

- Continue à lui faire croire que tu l'aimes et retiens son attention, reprit le démon. J'ai besoin de le tenir à distance le temps que je peaufine mon plan.

- Et après ? demanda Laetitia d'une voix frêle.

- Après, on s'occupera de Fanny... Ca brisera le cœur de ce pauvre Gatien et ça me sera très utile pour la suite.

La jolie blonde retint un soupir, avala sa salive et observa tristement son autocrate.

- Elle est si laide que ça ?

La vipère hocha la tête.

- Pire. C'est une abomination. Gatien aurait besoin qu'on lui ouvre les yeux, mais je sais que les mots ne servent plus à rien aujourd'hui... Il est temps de passer à l'action.

- C'est une vengeance morbide : la briser pour lui affliger plus de souffrances quand il tombera...

- Ce n'est pas comme ça que je vois les choses. Eh puis, tout ne tourne pas autour de lui... J'ai aussi des comptes à régler avec les trois harpies.

Laetitia se défit des bras de son intime et l'examina, intriguée.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Il faut que je m'occupe de Sophie, lança la redoutable créature en soufflant. Et de Mathilde...

- Mathilde ?

- Oui... dit l'autre en grinçant des dents. Valcrome m'a dit qu'elle avait l'intention de discuter avec la police. Il pense que sa plainte n'est qu'un prétexte pour parler de nous à ses collègues. Il essaye de retarder l'interrogatoire mais il faut, à l'évidence, que je remette les points sur les i pour ne prendre aucun risque.

- Qu'est-ce que tu vas faire ?

Son acolyte dévoila un sourire terrifiant.

- On va ressortir la caméra.

- Pour ?

- Pour raviver les vieux souvenirs ! Il faut quand même reconnaître que j'ai le sens des affaires, tu ne trouves pas ?

La jeune femme se tint nerveusement les bras.

- Sans doute... Et concernant Valcrome ?

- Tu auras ce que tu veux, fit la charogne en l'arrêtant d'une main. Un marché est un marché. Tu m'aides à piéger Gatien, et je ferai les présentations.

- C'est que... j'ai tellement peur.

- Il n'y a aucune raison. Je serai là pour t'aider, je te le promets... Seulement, on ne doit pas se précipiter... Une chose à la fois.

L'étudiante hocha la tête, inspira profondément et plongea son regard dans celui de son intime.

- Est-ce que tu vas les tuer ? demanda-t-elle après hésitation, en craignant la réponse.

Le monstre ne cilla ni ne détourna les yeux. Son assurance était telle qu'elle donna des frissons à Laetitia.

- Ce ne sera pas nécessaire, déclara-t-il d'un ton vague. Une fois que j'aurai tout arrangé, ils chercheront tous à se suicider.

La jolie blonde frémit, ce qui n'échappa pas à son despote.

- Est-ce que tu penses ce que tu dis ? s'enquit la première, blanche comme un linge.

- Oui, répondit l'autre avec sérieux. Et s'ils n'ont pas assez de couilles pour se foutre en l'air, ils devront faire face à une arme à feu...

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Rachelsans2LE ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0