Chapitre 51G: janvier 1803

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Souvent le soir, nous nous retrouvions près de la cheminée du salon, qui restait l’endroit le plus chaud de la maison, et nous buvions un thé brûlant a l’abri des tumultes du grand monde, en passant ainsi tranquillement les longues soirées. Parfois, je prenais Alice sur mes genoux, bercée par le crépitement du feu et dont les petits yeux papillonnaient vite de fatigue, qui se tenait recroquevillée comme une fleur. Je discutais doucement avec sa maman en frictionnant ses petits pieds nus desquels les chaussons tombaient systématiquement.

Mon fils divaguait, faisant d’interminables allers-retours, s’asseyant parfois avec nous puis repartant, cherchant Jeanne, se demandant pourquoi la porte d’entrée n’avait pas été verrouillée pour la nuit, ou nous contraignant à respirer l’odeur infâme du tabac qu’il fumait attablé derrière nous, assis à la table du salon. C’était souvent Marie qui me poussait à aller dormir, lorsqu'elle baillait, buvait le fond de sa tasse de thé d’une traite et me souhaitait le bonsoir, en récupérant délicatement son aînée pour monter la coucher au passage, et que je me retrouvais subitement seule.

Cette nuit de janvier, je fus réveillée par de l’agitation dans la chambre des jeunes parents. Par la porte restée ouverte, je vis Marie sortir dans le couloir en robe de nuit, le visage blême et l’air désorienté, accompagnée par mon fils qui tenait la chandelle. Plus tard, une nouvelle agitation perturba mon sommeil, sans que je ne trouve l’énergie pour aller satisfaire ma curiosité. Le lendemain matin, ils restèrent tous les deux au fond de leur lit, ma belle – fille tremblante et mon fils transi de fièvre incapable d’aller travailler. Je chargeais donc Jeanne de prendre soin des enfants pendant que je veillais les malades. Alice voulu à plusieurs reprises voir sa mère, mais je lui interdisais pour ne pas prendre le risque qu’elle soit contaminée.

Léon – Paul, complètement dans le gaz, retourna à l’hôpital l’après – midi même pour ne pas risquer de perdre son emploi, et prétexta un accident sur la route pour qu’on ne le remplace pas en sachant son état. Marie, quant a elle, en fus remise le soir même, quand elle mangea correctement et sans vomir le rôti préparé par Jeanne.

Dès le mois de mars, Frédéric, sans même passer par le quatre pattes, commença à se lever sur ses jambes potelées et tremblotantes et s’appuyer sur les meubles pour se déplacer. Alice l’encourageait parfois en essayant de lui prendre la main, mais cela avait tendance à déséquilibrer l’enfant qui tombait lourdement sur son derrière, surpris. Pour l’instant encore, sa grande sœur Louise – Marie n’y prêtait guère attention, elle avait juste vingt – trois mois et ses préoccupations restaient ses repas et les bras de sa maman.

En avril, en plus d’une météorite qui passa tout près de nous et qui effraya les populations, les trois enfants Aubejoux changèrent d’âge. Alice eu quatre ans, Louise – Marie célébra son deuxième anniversaire et Frédéric passa le cap important de sa première année. La bougie que leur frère n’était évidemment pas parvenu a souffler divisa les deux sœurs, et elles se disputèrent en se tirant les cheveux leur droit à l’éteindre. Marie, excédée, mis finalement fin à la discorde en soufflant la petite flamme, et laissa fondre en larmes les deux enfants qui vinrent vers moi, devant me confondre avec le bureau des plaintes. Elles se turent subitement lorsque leur père intervint, en prenant cette voix sévère qui rétablissait l’ordre rapidement.

— ‘’ Ça suffit maintenant ! Si c’est ce que vous voulez, je vais vous donner une excellente raison de pleurer. Il s’adressa à son épouse qui essuyait le nez de son bébé. Allez les mettre cinq minutes dehors, ça les calmera.

—''Vraiment ? Il ne fait pas chaud…

—''Oui oui, allez.

Comme il devait en avoir marre d’attendre devant les hésitations de Marie, Léon – Paul attrapa les deux filles par les mains et alla les asseoir sur le perron, en les laissant pleurer de plus belle en refermant la porte. J’en eu mal au cœur. Ce supplice dura exactement une minute trente, jusqu’à ce que Marie n’ailles les chercher, redoutant peut – être la réaction de son mari qui la laissa faire sans rien dire. On réchauffa les enfants qui furent cependant vite remise de leur punition, sans preuve que cela leur apprendrait à ne plus se disputer.

Nous apprîmes par l’intermédiaire de Léon-Paul qu’Auguste comptait bientôt se remarier. Si il refusait de lui en dire sur l’identité de sa future épouse, l’assurance, c’est que ce n’était pas a cœur joie que mon neveu allait refaire sa vie. Son unique but en se remariant, c’était de pouvoir faire revenir ses deux enfants dont l’éloignement même minime devenait de plus en plus difficile à vivre pour la benjamine, et de permettre à l’aîné de reprendre ses études subitement interrompues.

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