Chapitre 2

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    Quelques fois, son père l’avait emmenée assister au départ des bateaux : là, dans la lumière de l’aube, sur une mer d’huile aux reflets roses et orangés, les équipages larguaient les amarres pour que leurs lourds navires s’élancent silencieusement vers l’Asie, le Chili, le Pérou, l’Amérique Centrale, l’Asie, les Etats-Unis, ou remontent la côte Pacifique colombienne afin d’approvisionner les quelques villages désolés qui peuplaient cette région sauvage mais splendide, inaccessible par les routes. Toutes ces terres lointaines, pourtant inconnues à l’enfant, nourrissaient son imagination foisonnante d’images colorées. La gamine s’imaginait alors se hisser discrètement à bord de l'un de ces cargos pour se cacher au fond d’une cabine et s’échapper avec ces quelques marins. Son père avait toujours refusé de l'emmener avec lui lors de ses expéditions en mer. Il partait parfois quelques jours, parfois des mois entiers. Il disait que ce n'était pas un endroit pour une petite fille comme elle, que c'était dangereux et d'autres choses encore qu'elle ne comprenait pas bien. 

    En rentrant de ces voyages, à la tombée de la nuit, il poussait la porte de la chambre de sa fille, avec toute la délicatesse dont ses lourdes jambes étaient capables, venait sur la pointe des pieds déposer un baiser sur ces joues rebondies. Observant d'un oeil amusé, la concentration avec laquelle elle faisait mine d'être plongée dans un profond sommeil,il attendait en silence le moment où elle se relèverait d'un coup dans son lit en criant pour l'effrayer et lui sauter au cou, ravie de sa blague. Alors, attendri par l'afflux de questions qui jaillissait tel un flot ininterrompu de la bouche de l'enfant, son père finissait par lui livrer par bribes des anecdotes de ses voyages. Elle comprit bien plus tard qu'il étoffait parfois à dessein ses récits d'histoires à dormir debout, de crainte de décevoir les yeux brillants qui le scrutaient avec dévotion et avidité. Mais il ne lui avait pas menti en lui contant un jour que, l'hiver venu, on pouvait apercevoir, en s'éloignant un peu des côtes, les baleines venues mettre au monde leurs bébés. Depuis, elle ne rêvait que d’apercevoir l’une de ces majestueuses queues fendant la mer avec grâce, s’élevant dans les airs pour mieux replonger avec nonchalance dans les profondeurs glacées du Pacifique. 

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