Une rencontre presque surnaturelle
À force de marcher à la recherche d'un bon sujet à immortaliser sur une pellicule, la petite photographe amateur s'était perdue dans la forêt. Elle était entrée dans une zone plutôt lugubre, où il faisait froid, humide, où le vent soufflant entre les arbres semblait se fondre en un murmure inquétant. La pauvre fille avait peur. Peur de ne jamais retrouver son chemin, peur de casser le vieil appareil argentique de sa grand-mère, qu'elle aimait beaucoup. Alors qu'elle sentait les larmes lui monter aux yeux, elle entendit un bruit profond, au loin. En fait, elle ne savait même pas si c'était proche ou non, le son s'éparpillait entre les chênes et les sapins. Elle alla tout de même dans une direction. Puis elle tourna à sa droite, rebroussa chemin, fit une pause, se remit en route, avant de trouver d'où venait ce qui s'avérait être un cri. À mesure qu'elle s'approchait, elle réalisait qu'elle n'avait pas peur de ce qu'elle entendait. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle trouvait qu'il y avait quelque chose d'apaisant à écouter cet étrange écho.
Ses pas faisaient craquer les brindilles et les feuilles sous ses chaussures de randonnée. Elle commençait à discerner des couleurs dans la forêt qui correspondaient à celles d'un bois en fin d'après-midi. C'était vraiment joli, et tellement plus rassurant. Encouragée, persuadée d'être sur la bonne voie, la photographe avançait droit devant elle. Les feuilles jaunes, rouges, oranges, réchauffaient son corps. L'automne, c'était une de ses saisons préférées. Parce que c'était, d'après elle, une saison chaleureuse. Malgré les signes évidents de la fin d'un cycle, de la mort des feuilles, c'était dans un panache de couleurs que cela se faisait. De ce fait, la jeune fille se disait que la mort n'était pas synonyme de malheur.
Alors qu'elle photographiait quelques petits insectes sur des lits de mousse, le cri se fit de nouveau entendre. Il était bien plus proche cette fois. La demoiselle revela la tête, et tomba nez à nez avec ce qu'elle pensait être impossible, pour elle, de vivre. Un grand cerf se trouvait devant elle. Il était seul, et ne semblait pas dérangé par la présence de l'humaine. La bambine mit quelques instants, voire une minute, pour se reprendre. Elle se demanda si prendre en photo ce magnifique Roi de la forêt était approprié, ou bien si elle devait le respecter en se contentant de le regarder. Restant sans rien faire, elle remarqua que le cervidé la fixait, comme s'il attendait quelque chose. L'enfant prit une photo de l'animal, et comme si ce dernier voulait faire comprendre que ce n'était pas ce qu'il attendait, il souffla du nez, laissant s'échapper une volute de vapeur dans le froid de ce début de soirée d'automne. Le Roi de la forêt se mit dos à la petite photographe, et se mit à avancer, d'un pas solennel, et la jeune fille le suivit, de loin tout de même. Elle avait l'impression de vivre un moment surnaturel, presque spirituel. Un tel animal ne se laissait pas approcher si facilement après tout. L'environnement autour rendait le cadre encore plus mystique et magnifique, les yeux de l'enfant en étaient remplis d'étoiles. Puis, elle sembla reconnaitre le chemin. Ses pas se firent plus rapides. La petite courrait, heureuse de ne plus être perdue.
Dans son bonheur, ses rires se mêlèrent au brame du cerf qui l'avait guidée hors de la forêt.
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