Une main glacée couvre aussitôt ma bouche, m'empêchant de hurler ma terreur. Elle me serre tellement que je ne peux la retirer. Et... Et une autre poigne se fait sentir sur mon cou. Elle me prend la gorge mais sans m'étrangler. Puis deux autres sur les épaules. Et... Et encore deux compressent mes bras, juste en-dessous des aisselles. Et... Et... Et je sens de nouvelles mains sur mes poignets... Et mes chevilles... Et comme si cela ne suffisait pas, une étreinte apparaît sur ma taille, comme si quelqu'un me faisait un câlin par derrière... Sauf que là... Je n'avais pas envie d'être touché.

Une voix fantômatique surgit alors d'entre les ombres, murmurant mon nom à travers l'outre-tombe :

"Nuuun... Zio... Nunzio... Nunzio... Aide... Glacé... Peur... Peur..."

Je vais m'évanouir. L'étau des multiples mains se resserre et semble me transformer en glaçon. Je vais... Je... Tremble... Je pleure... Soudain, je trouve la force de me débattre et de décoller ces doigts ignobles. Je respire. Je respire tout l'air que je peux. Mais à peine les premiers retirés, le reste s'enfuit. Les coups ont cessé. Je tombe à genoux et pose mon avant-bras au sol. Une horrible quinte de toux surgit. Ma gorge me brûle... J'ai envie de vomir... Non... Non, je ne le ferais pas... Allez, ressaisis-toi... Il est parti... Il est parti et tout va bien... Tout...

Oh oui... Tellement bien que ton coloc est mort...

Je me relève en trébuchant et me précipite vers la porte d'entrée. Je la franchis et sors dehors. En pleine nuit de décembre, sous la pluie battante et le vent. Et là... Je la vois... Une apparition laiteuse, flottant sur le trottoir d'en face. Sans... Visage... Et dont les multiples bras squelettiques s'articulent en tout sens... Affreux... Dois-je rentrer dans la maison ? Courir le plus loin possible ? Non... Je ne peux pas lui abandonner le corps d'Alessio. Je dois aller le chercher... Peu importe si j'y reste. Allons-y. Gardant un contact visuel avec la chose, je retourne dans la cuisine. Quelle horreur... Allez. La porte suivante. Alessio... Je suis désolé... Si tu savais...

Je pousse le battant et retiens mon souffle. Dans la pénombre, je ne distingue rien. Que dalle... Bon allez, je n'ai pas le choix, il faut que j'attende l'éclair suivant. La lumière surviens. Mais... Mais je ne vois rien... J'étais pourtant sûr que le bruit sourd venait d'ici. Il n'est pas là... Mais... Où est-il ? Je me risque à l'appeler, dans le vain espoir d'obtenir une réponse, d'obtenir la preuve qu'il est en vie :

"A... Alessio ? Alessio réponds-moi..."

Rien... Je continue de fouiller. Toujours rien... Ma terreur reprend le dessus. Des pas... Des pas grinçent autour de moi. Debout au milieu de la pièce, je me retourne partout, analysant les environs pour prévenir la venue du spectre. Tout recommence, les pas, le violon, les frappes furieuses, les murmures... Je vais abandonner... Non, je ne peux pas... Et soudain, quelqu'un crie dans mon dos.

Complètement effrayé, je finis par m'effondrer sur le parquet. Avant que ma vision ne se trouble définitivement, je vois six visages penchés sur moi. Six...

Le soleil est déjà bien avancé dans le ciel lorsque je reviens à moi, entre mes draps frais. Attendez... Une minute...

"Alessio ? C'est toi ?

Son visage angélique se tourne vers moi et il s'approche, la mine inquiète.

- Bon sang, tu nous as fichu une de ces trouilles Nunzio. On savait pas que ça allait te choquer à ce point... Désolé c'était... C'était juste une blague. Très mauvaise. Je n'étais pas vraiment d'accord mais les autres ont insisté. Tu me connais... J'ai cédé facilement... Oh Nun' je suis désolé. Je... Tu vas bien ?"

Je le prends dans mes bras, les larmes coulant à flot. Arrêtez de rire. Je lui en veux, c'est vrai. Mais je suis si heureux de savoir qu'il est en vie.