4 - Mia
- Allonge-toi et tiens les barreaux du lit.
Je m’exécute rapidement. Je ne pose pas de questions, je fais ce qu’il dit.
- Je vais te mettre un bandeau sur les yeux.
Il sort un tissu noir de sa poche et me le noue derrière la tête. Tout d’un coup je ne suis que sensations. Je sens ses doigts caresser la peau de mon cou. Je frémis. Ses doigts ne deviennent plus qu’effleurement. Et tout mon corps est en transe. Il en redemande, il en veut plus. Il se tord sous son toucher.
Je ne connais pas cet homme. Je viens juste de le rencontrer. Il est censé me faire découvrir le monde du BDSM et pourtant mon corps est déjà complètement ivre de lui. Il y a une alchimie entre nous. Elle n’est pas visible, mais entièrement palpable. J’ai confiance en lui. Je ne devrais pas. Il y a cette aura autour de lui qui me donne cette facilité à m'abandonner à lui. Et s’il fait quelque chose qui ne me plait pas, il y a toujours les règles. Alors tout est sous contrôle. Je peux me laisser aller comme je le souhaite.
J’appréhende déjà ses caresses sur mes seins, ses baisers et son corps contre le mien. Et tout cela sous son contrôle. Sentir son souffle sur la pointe de ma peau. Mon intimité me pousse à me caresser mais je n’en fais rien. Je veux que ce soit lui qui me fasse du bien. Je veux qu’il passe sa main dans ma culotte et qu’il me caresse. Qu’il attise mon désir. Qu’il me pénètre de ses doigts doucement et m’interdise de jouir pour mieux s’amuser de mon corps.
Je ne sens plus ses doigts sur moi et n’entends aucun mouvement autour. Je sais qu’il n’est pas loin, je hume son odeur de musc. Je compte les secondes. Toujours rien. Mais il attend quoi ?
- Monsieur ? je chuchote.
Pas de réponse. Et s’il est parti ? Me laissant là, ainsi. À cette pensée, une pointe d’humiliation se fait ressentir. Mon cœur bat à tout rompre. Mes mains commencent à trembler et mes yeux à s’embrumer. J’ai peur, peur d’être abandonnée.
J’hésite à lâcher les barreaux du lit pour enlever le bandeau de mes yeux et rendre réelle ma solitude. Je décide finalement de me lancer. Je retire le bout de tissu. Ces derniers prennent du temps à s'adapter à la lumière.
Habituée à la lumière, mon regard cherche Nilson. Il est dans un coin de la pièce, bien installé dans un fauteuil. Ses lèvres ne forment plus qu’une ligne droite :
- Pourquoi m’as-tu désobéi ?
Tout en me posant la question il discerne les larmes qui ont coulé sur mes joues, produits de ma peur. Il se lève et s’avance vers moi.
- Tu ne me fais donc pas confiance ? Réponds-moi en toute sincérité.
- Je vous fais confiance mais j’ai peur. J’ai eu peur qu’au final je ne vous plaise pas. Je suis désolée de vous avoir désobéi mais j’étais complètement déboussolée.
- D’accord. Et pour que ça ne recommence plus, je vais te punir. D’accord ?
Je hoche la tête. Il va me punir je n’ai pas le choix : il commande. Je suis complètement soumise à son pouvoir.
- Très bien, à quatre pattes sur le lit, tout de suite.
Je me soumets à son ordre, vidée de doutes. Je fixe le mur en face de moi et patiente calmement la douleur.
- Mia, dis-moi pourquoi je te punis.
- Parce que j’ai désobéi à votre ordre, monsieur.
Je chuchote. J’appréhende cette expérience. Je suis venue ici pour ça, pour cette douleur et devant le fait, je suis presque prête à prendre mes jambes à mon cou.
- Très bien. Ton mot de sécurité sera pour l’instant rouge. Tu ne le prononceras que si tu ne peux plus supporter les coups. De toute manière, pour ta première punition je ne serai pas trop méchant.
Pendant qu’il me parle, il me caresse la croupe. J’en ai des frissons. Puis il se baisse pour déposer un baiser entre mes reins. Il détache mes portes jarretelles afin d’avoir un accès total à mes fesses, qu’il continue à caresser gentiment. Et sans crier gare, sa main se décolle et s'abat très vite sur ma fesse droite. La douleur est intense et mon cri est strident. Je n’ai pas le temps de souffler que la deuxième claque me pétrifie. Avant la troisième fessée, il se remet à caresser mes fesses. Cette nuance entre la tendresse et la dureté de ses coups détend un tant soit peu mon corps. Deux autres corrections ont suivi les trois premières.
Les fesses en feu, je m’étale sur le lit. Mon corps se soulève sous les sanglots, je cache mon visage entre mes mains. Il doit surement nager dans les larmes. Je ne sens et ne ressens plus rien. J’ai juste besoin d’être seule. Je suis venue dans ce club pour trouver cette paix intérieure. En même temps, je suis soulagée de ne pas m’être trompée et je réalise enfin que l’autodestruction est terminée pour moi. Je peux tourner la page en la substituant avec la soumission.
- Monsieur ?
Je sais qu’il n’a pas bougé de sa place. Il ne me touche pas non plus. Il doit surement me regarder.
- Oui, Mia ?
- Est-ce que je… je peux être seule une minute s’il vous plait ?
- Non. Relève toi.
- S’il vous plait monsieur, dis-je suppliante.
- Très bien. Rhabille-toi et rejoins-moi à l’entrée.
La séance est terminée ? Pourquoi ? Je veux juste être seule un moment et ne pas arrêter la séance. Non ! Je veux continuer !
Je me relève et le regarde. Je n’ai pas besoin de parler pour qu’il comprenne mon non-dit :
- Je comptais terminer la séance sur cette punition quoi que tu demandes. Avant je voulais te parler mais nous discuterons dans la voiture. Je vais te laisser, prends ton temps.
Je hoche la tête.
Avant de repartir, il remet son masque et ne m’adresse même pas un regard ; j’ai un pincement au cœur. Je l’ai déçu. Un soupir s’échappe de mes lèvres. Je me tourne sur le dos. La douleur de mes fesses me rappelle ce qui vient de se passer. Je laisse le supplice envahir mon corps. J’aime cette sensation. Pendant cinq minutes je reste ainsi, à fixer le plafond noir.
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