" Arrête de sourire, connard !"

Une gifle ne fit pas disparaître le sourire mais les yeux brillèrent de rage. Verts et profonds, d'une merveilleuse couleur émeraude.

La gifle fut suivie d'un coup de poing et le sourire dévoila les dents.

" Amateur."

Nouveau coup.

On fit cesser le passage-à-tabac.

" Nico ! Arrête ! Nous avons des questions. Il faut qu'il parle, hurla-t-on en espagnol.

- N'est-ce pas ?"

L'homme, ignorant le sang coulant de son arcade sourcilière, se redressa de son mieux, malgré les bras bloqués par des menottes et intensément douloureux.

" Nom ?, interrogea le nouveau venu dans un français de bonne qualité.

- Lequel ?

- Amusant. Celui connu des forces de police ?

- Alors ce sera Arsène Lupin.

- Vraiment ?

- Vous me connaissez ? J'en suis flatté !

- Qui ne connaît pas Arsène Lupin dans notre milieu ?

- Nous ne sommes pas du même milieu ! "

La gifle ne partit pas mais le canon d'une arme de gros calibre apparut, menaçant à souhait.

Il accentua le sourire goguenard.

L'Amazonie et ses trésors cachés. Par quoi commençons-nous ?

Les bêtes sauvages ? Derniers jaguars cachés du monde, les papillons et les anacondas...

Les Indiens ? Tribus vivant de chasse et de pêche comme aux premiers jours du monde...

Les beautés du paysage ? Arbres centenaires, d'une hauteur d'immeuble moderne...

Ou les chasseurs d'or et de bauxite ? Camps illégaux, vivant de rapine et de meurtre...

Ou les défricheurs ? Véritable organisation officieuse, destructrice et efficace...

Ou les trafiquants de cocaïne ? Assassins et corrupteurs, briseurs d'âme...

L'Amazonie qui se meurt et qui brûle dans l'indifférence. Par quoi commençons-nous ?

Par dénoncer les scandales à la face du monde !

" Il n'y a rien à voler ici, monsieur Lupin !, s'amusa le narcotrafiquant en baissant son arme.

- Plus que vous ne croyez, monsieur Palves.

- Vous me connaissez ? Je suis flatté !

- Votre nom ne m'est pas inconnu. Lorsque j'étais chef de la Sûreté..."

Palves se mit à rire et Lupin se joignit à lui.

Quelque part, quelqu'un surveillait et on préparait l'attaque.

Lupin pensait à tout.

Lupin pense toujours à tout.

Toujours, toujours, toujours !

Toujours ?

" Malheureusement, vos amis et vous êtes entrés dans une zone interdite.

- C'est une de mes spécialités, monsieur Palves.

- Certes. Mais ici c'est chez moi, on n'entre pas !

- Où sont mes amis ?

- Ha ! Epineuse question, non ?"

Palves sortit un cigare. Véritable caricature de guérillero, il l'alluma et se mit à fumer.

" Vous êtes riche, Lupin. Trouvons un arrangement !

- Mhmmm. Vous parlez d'or.

- A combien estimez-vous votre vie ?

- Trop cher pour ma bourse, rit Lupin.

- Voyez votre valeur à la baisse !

- A combien estimez-vous votre empire ?"

Palves s'étouffa avec son cigare et Lupin lui asséna :

" On doit toujours couper un cigare avant de le fumer, sinon on passe pour un rustre."

Cette fois, la gifle partit.

Toujours !