Elle était moi... j'étais elle

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Je laissais alors tomber tous mes efforts jusque là de proprement remettre mes lunettes sur le bout de mon nez rougi par le froid.

Je les essuyai alors du mieux que je pouvais, contre la matière plus épaisse de mon pull en laine alors que le vent frappait contre mon visage, mais des bourrasques j’étais prête à en essuyer tant que je parvenais au bout de cette forêt. De plus je ne voyais rien à l’instant, enfin… je ne voyais que très peu depuis que j’avais décidé d’emprunter ce sentier lourd de promesses de mon plein gré. Alors un peu ou pas de vision… qu’est-ce que cela pouvait bien changer après tout ?

Je continuai et c’était la seule pensée qui me traversait l’être.

Vers où ? Et pourquoi ? Je pense le savoir sans trop le savoir alors je continuai en cette raison.

Le silence autour de moi pesait si lourd que je commençai sérieusement à me demander si toute cette histoire n’était pas une énorme blague. Après tout, combien avais-je entendu de personnes revenir de cet endroit avec des mots et un témoignage poignant ? Personne.

Comparé au nombre qui vous encourageai à vous lancer dans ce pèlerinage à la quête d’un désir cher, véritablement personne. Et cet inverse des choses aurait peut-être je le craignais, dû me lancer sur la possibilité que je m’étais faite avoir comme l’idiote enfant naïve au fond, que j’étais venue retrouver en ces lieux.

Il était là mon vœu au cœur de ce lieu magique : l’enfant intérieur que je n’avais pas connu. Celui qui négligé, déprivé de moments mémorables autres que dans la peine et l’amertume, avait construit l’adulte qui sous des couches de vêtements dignes d’un explorateur polaire, marchait un pas après l’autre dans la neige, sans rien y voir.

Je ne voulais que guérir en toute honnêteté. Je ne demandais pas d’autre compensation, le matériel ne saurait satisfaire une âme brisée je le crains. Je m’étais projetée avec des sommes faramineuses déjà à l’avance quand je m’étais demandée, pourquoi ne pas tenter l’aventure dont ces personnes parlent tant.

J’avais trouvé assez amusant comme j’avais vite réalisé que riche ou non, mon quotidien me semblerait le même, simplement plein de luxe et d’une validation des autres qui surviendrait comme le joli bonus qui l’accompagne.

Non décidément ce n’était pas le matériel.

Je n’avais pas pris longtemps avant de comprendre, j’avais appelé ma mère, appelé mon père. Je pars. Leur avais-je dit. Sans attendre leur réponse, j’avais raccroché, téléphone à la main, me mirant dans la glace de l’entrée alors que depuis mon retour de mon travail, je réalisai que je ne me voyais plus dans ce reflet. Je sais qu’il n’aurait pas compris.
Je sais que très peu auraient compris, de ceux qui m’entourent. Et j’en avais assez d’attendre leur réponse et leur permission.

Je ne l’ai dit à personne d’autre que mon fiancé.

C’était ce que j’avais décidé de chercher, car je ne la connaissais pas, mon enfant intérieure et que j’avais l’impression d’avoir depuis au fil du temps, toujours été vide sans elle.

Mais maintenant je me retournai, j’entendais le vent dans les arbres, qui semblaient en ce lieu me murmurer et m’évoquer de leur naissance et de leur histoire. Ou devenais-je folle après tant de temps ici ?

Je remettais mes lunettes du mieux que je pouvais, malgré toute la surface couverte par l’air du froid sur les verres.
Je soufflai et me trouvai si stupide, je devrai repartir et faire comme si je n’avais jamais essayé, quand bien même l’envie de ne pas abandonner demeurait en mon être, j’avais encore plus peur de rentrer honteuse.
Et c’est là que je l’entendis, cette petite voix qui brillait d’une innocence que j’aurai toujours voulu pouvoir conserver.

Elle se tenait devant moi, dans la simplicité qui rend une enfant touchante. Elle ne comprenait pas alors qu’elle s’arrêtait à ma hauteur et m’observait avant de comprendre.
J’eus les larmes aux yeux sans autre appel et laisser échapper un « Merde. Fichues lunettes », alors que je mettais un genou dans la neige pour me permettre d’être à sa hauteur.

Je pense qu’elle m’a reconnue, et même si je l’ai senti comme un pincement au fond de mon cœur, je l’ai également reconnue tout en me souvenant de ces moments qui j’aurai souhaité n’aient jamais été perdus au fond de ma mémoire.

« Je suis tellement tellement désolée ». Finis-je par lui dire à cette pauvre gamine qui m’observait sans broncher.

« J’aurai voulu que tu puisses ne pas peiner à me reconnaitre mais de nous deux je crains d’être celle qui te reconnaisses le moins. »

Lui disais-je comblée par ce sentiment si tordant qu’il me faisait serrer du poing. J’avais en face de moi mon vœu, mon enfant intérieur et je savais depuis le début que tout à la fin de cette quête ma plus grande peur aurait été de constater comme depuis, j’avais changé.

Elle ne dit rien alors que je pleurai mes peines et que je m’excusai pour toutes les années à venir qu’elle ne connaissait pas encore et que je ne pouvais pas lui épargner. Car elle était moi et j’étais elle au fond.

«Tu as tenu jusque-là c’est le plus important». Me répondit-elle sur ce ton si nostalgique.

Je la regardai alors qu’elle s’effaçait peu à peu et que je comprenais doucement qu’elle disparaissait, mais elle n’en avait pas l’air d’en prendre conscience tant son simple sourire demeurait imperturbable.

Peut-être ne disparaissait-elle qu’à mes yeux ?

«Merci de ne pas m’avoir oubliée et d’avoir continué pour moi. Merci d’avoir appris à pleurer, à souffrir, à ouvrir ton cœur à la vie quand cela a été si dur que tu as perdu tout espoir. Merci d’avoir aimé et d’accepter d’être aimé malgré les blessures et la peur, continue de vivre tant que tu le veux. Repose toi quand tu ne t’en sentiras plus la force.» me dit-elle.

«Ne m’oublie pas je te prie, je vis à travers toi en ces lieux»

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Et je me réveillais.

Dans mon lit ? Non celui d’un hôpital.
On m’expliqua assez vite que j’avais été retrouvée inconsciente dans la neige au milieu des bois. Je me souvenais de ce qui était arrivé. Mais n’était-ce qu’un rêve ?

J’y réfléchis par la suite pendant les quelques jours que je passai en soins et je sentais le poids de mon cœur qui s’était apaisé.

Je sortis de là quand mon fiancé vint me ramener lorsqu’il en fût le temps, et sur le chemin du retour je lui demandais une simple faveur. Je crois qu’il avait compris.

Là au milieu de cette même forêt aux vertus mystérieuses, je marchai sans trop savoir où et je m’arrêtai instinctivement.

Je me souvenais de ce que les gens disaient, des choses qu’ils avaient vues, entendues. Choses qui m’avaient été étrangères car c’était dans le silence que s’était faite ma quête.

Et je le vis. Au milieu d’autres arbres, un qui je savais était spécial. Je le sentais.

Je détachai l’écharpe rouge de mon cou et la nouait contre le tronc de ce dernier et laissait mes doigts le frôler dans un sourire doux amer.

«Merci».

Et je repartis dans le silence, l’arbre symbolisant un rêve que je considérais accompli. J’étais venue dans le but de retrouver cet enfant en moi, j’en repartais grandie et consciente que je ne l’avais jamais perdue et qu’elle avait toujours été là dans la peine et la douleur. Dans les bons comme les mauvais moments. Elle ne m’avait jamais quittée. Et elle n’avait pas besoin de le faire. Car je ne regrettai pas tout ce qui m’avait emmené là, car sans eux je ne saurai ni ne serait celle que je suis.
Elle était moi… j’étais elle.

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