7. La voie ferrée direction Sud

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Je m’éveille avec un appétit d’ogresse. Les moustiques ne me touchent plus, beaucoup moins intéressés par mon sang anémié qu’à mon arrivée. Mon ventre grogne, alors je prends la direction du trône pour commencer cette sixième journée.

Six, ça commence à faire long. Et malgré mes jambes engourdies, je compte bien aller voir si la gare de provenance du train n’est pas plus proche que celle de l’arrivée.

Mes selles sont moins liquides qu’hier, cela me met d’excellente humeur. Je cale le reste de choucroute dans le sac, maintiens le couvercle fermé grâce un torchon. Il n’y a pas une minute à perdre.

Après un café, et des biscuits apéros, je suspends mes vêtements aux dossiers de mes chaises et à mes poigneés de fenêtres. Petit t-shirt rose et short en jeans, casquette et lunettes de soleil, sac sur les épaules, j’affronte les premières lueurs du soleil.

Le son des cailloux sous mes semelles me fait un effet familier. Les mouvements dans les buissons ne m’inquiètent plus. J’ai bien noté hier que la faune est farouche.

Les deux premières minutes me donnent l’impression de ne pas avancer. Les trois heures qui suivent, mon corps fourbu par la veille s’est mis en mode automatique. Mes idées se perdent, multiples, dispersées, partagées entre les questionnements et les bons souvenirs de ma vie française.

Une vipère recroquevillée sur les cailloux chauds ressent mon approche et sinue pour se glisser sous le rail. Je bondis sur le rail opposé en criant. Sa tête triangulaire m’observe, prête à m’attaquer si je continue à avancer. Ma phobie des serpents me paralyse des orteils aux sourcils. Quand mes yeux se lèvent pour trouver un détour d’une centaine de mètres, plusieurs autres vipères brunes se révèlent. Elles paressent, les unes auprès des autres.

Je n’ai pas encore marché une demi-journée. Peut-être la gare est-elle à quelques kilomètres de là. Mon cerveau me commande de marcher en équilibre sur le rail, mais mes tripes mes hurlent que je risque de tomber. Même si je parvenais dans un sens, je serais forcée d’y repasser à contre-sens.

Il est bientôt midi. J’aurais fait demi-tour dans une heure de toute façon. Commandés uniquement par ma peur, mes talons font demi-tour.

Je finis ma bouteille d’eau et ma choucroute à mi-trajet.

Lorsque je parviens à la station, je me filme, en archive pour ceux qui trouveront mon corps.

— Me revoici au point de départ à cause d’un nid de serpent. Donc il est impossible de s’échapper à pieds. Je suis claquée. Il ne va pas me rester beaucoup de conserve. Demain, ça fera une semaine. Si en venant me rendre visite, Papa et Maman ne parviennent pas jusqu’ici, ou ne me sortent pas du coma, et bien j’attraperai le train de dimanche. En attendant, je vais prendre une douche. C’était Fanny Gaultier, en direct de nulle-part.

Je gagne l’appartement pour m’abriter du soleil trop fort. Une fois déshabillée, avant de passer sous la douche, je monte sur ma balance. Je n’aurais jamais perdu de poids aussi rapidement.

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