J’apprécie beaucoup la franchise de Thalia. Elle est comme moi, elle ne sait pas mentir. Elle est cash dans sa manière de s’exprimer mais c’est ce qui me plait. Je suis comme elle, d’ailleurs.

— Alors, toujours plongée dans tes passionnantes lectures, Ali ?

— Pas trop le choix si je veux comprendre ce que les éditeurs recherchent de nos jours.

— Si cela t'ennuie à ce point de lire, pourquoi est-ce que tu t'infliges cela ?

— Parce que j'aimerais comprendre pourquoi des horreurs sans nom réussissent à avoir des milliers de lectrices. Et comment je pourrais faire, moi, pour parvenir à convaincre un éditeur.

— Tu sais, au départ, je trouvais ça amusant de te voir écrire. Mais si cela ne t'amuse plus, je ne vois pas pourquoi tu continues ?

— Pour améliorer le niveau pitoyable actuel. Écoute ça : je lis pour le moment un bouquin a été écrit par une gamine qui ignore tout des entretiens d'embauche. S'il suffit d'une bonne grosse engueulade avec ton futur patron et un chemisier blanc presque transparent pour décrocher un poste quand on n'a aucune expérience professionnelle, ça se saurait ! Non mais écoute ! La fille a vingt-deux ans, elle a passé les deux dernières années de sa vie à faire la fête aux Etats-Unis et le mec lui dit qu'il l'embauche parce qu'elle sera la personne idéale pour être sa secrétaire. Je sais bien que je suis trop rigoureuse mais tu es bien placé pour savoir que ce n'est pas crédible.

Thalia soupire. Elle a pris récemment la direction du magasin d'informatique de son père. Elle ne s'est pas retrouvée à vingt ans directrice d'une entreprise multinationale. Même si son père a fondé le magasin, mon amie a dû prouver qu'elle avait le potentiel pour prendre sa succession. Elle a grimpé les échelons, elle a acquis de l'expérience. Pas comme l'autre crétin de playboy dans le bouquin.

Pourtant c'est ce qui plait apparemment. Et tant pis si le patron a raté ses études à l'université et qu'il n'y connait rien dans la gestion d'une entreprise.

— Tu devrais arrêter de lire ces merdes, Ali. Écris ce qui te plait, comme tu le sens. L’essentiel c’est quoi, de parvenir à écrire un roman et de le terminer. Moi, je m’en fiche que tu gagnes ou pas ce concours. Et j’aimerais bien en apprendre un peu plus sur l’énigmatique Josh. Tu comptes publier quand la suite de ton histoire ?

— Demain. J’ai vingt-cinq chapitres écrits à présent, c’est pas mal. Il faut juste que je réalise la quête du jour. Ce qui m’ennuie, c’est que sur le forum, quelqu’un expliquait que, plus tu publies de chapitres, plus les quêtes sont longues.

— Ils veulent que les auteurs s’investissent non ?

— Oui, et qu’il y ait une véritable entraide entre eux. Sauf qu’on est sur une plateforme de concours. Je suis certaine que ça doit surtout se tirer dans les pattes entre ceux qui squattent les premières places.

— J’aimerais bien que tu y arrives. Ceux qui se hasarderont à s’attaquer à toi risquent gros.

Thalia éclate de rire. Elle me connait bien. C’est clair que si je parviens, par je ne sais quel miracle, à me hisser dans les premiers du concours, ceux qui viendront m’emmerder le regretteront amèrement, c’est une certitude !