La pluie battait sur l'armure de l'elfe aux cheveux blancs. Elle ruisselait sur sa peau pâle et nettoyait le sang sur le métal de ses lames. La guerre était loin d'être achevée et de nombreuses vies allaient se terminer ici, dans la tourbe poisseuse du champ de bataille, le visage à moitié enfoncé dans le sol, d'innombrables blessures parsemant leur corps immobile. L'averse, l'odeur du sang et de la mort empestaient autour de lui.

Mais il avait déjà connu l'horreur des combats. Sa cicatrice parcourant entièrement son visage lui rappelait combien il avait perdu ce jour-là. Et il se battait aujourd'hui comme un démon, voulant sauver le peu de vies encore présentes. Un cor retentit soudain au loin. Son fils. Son propre enfant était en danger. Il s'élança et le rejoignit. Ils combattirent côte à côte. Quelle folie lui avait dicté d'emmener son aîné au coeur du chaos ? Pourquoi donc avait-il décidé de l'envoyer à une mort certaine ? Il ne voulait pas le perdre. Mais il manquait de soldats et son souverain avait recruté ceux qui avaient choisi de le rejoindre.

Il protégeait à tout prix son enfant. Se laissant blesser à sa place. Tentant de lui épargner un bien triste sort. Mais le chagrin est lié aux désastres de la bataille. Un puissant homme se dressa entre lui et son être le plus cher. Il empoigna la gorge du jeune garçon et le souleva dans les airs. Puis, d'un geste cruel, lui brisa la nuque. Le craquement sinistre résonna dans les oreilles du guerrier aux cheveux de neige. Et il vit le corps de son fils s'écrouler au sol, le regard vide, une larme perlant sur la joue. Sa vie était brisée. Plus rien ne comptait. Non. Il ne devait pas mourir. Pas avant que cet assassin soit renvoyé au Néant. Et de sa main. Accablé de désespoir, le champion elfe se dressa contre le géant et lutta pour venger une mort injuste. Il virevoltait, tranchait la chair du meurtrier. Il grondait, combattait avec furie. Cet affrontement semblait éternel. Aucun ne cèderait sa place à l'autre.

Un rayon de soleil les illumina un bref instant, faisant briller l'armure dorée du commandant balafré. Ce dernier sauta d'un petit promontoire, fondant sur son adversaire dans une dernière manoeuvre, l'épée en avant. Il ressemblait à un ange tombé des cieux, guidé par la lumière. La lame fit un croissant dans l'air et siffla. Victoire. La tête de l'homme roula à terre et son cadavre s'effondra.

D'un pas lent, l'elfe se dirigea vers le corps de son fils. Il lâcha ses armes et tomba à genoux, le chagrin s'emparant de lui. Il pleurait sa mort. Peu importe que la guerre soit finie. Il serra dans ses bras son enfant et hurla sa peine. Soudain, un soldat de l'armée ennemie lui transperça le corps. La lame ressortait de sa cage thoracique. Les yeux hagards, il accueillit le trépas sans regrets. Il suffoqua et s'allongea aux côtés de ses combattants. Et de son aîné.

Enfin. Il allait revoir les siens.