Chapitre 10 : La Mer
Le vent soufflait doucement, apportant l’odeur salée de la mer. Les vagues caressaient le sable doré, et au loin, un soleil radieux déclinait lentement, colorant le ciel d’une palette orange et rose. C’était un tableau paisible, presque magique. Le genre de moment où tu pourrais oublier tout le reste.
Mais Null n’était pas du genre à oublier. Et Théo non plus, pas complètement.
Ils avaient trouvé la plage en longeant une côte déserte, un endroit tranquille où personne ne semblait être passé depuis des mois. Les vagues, la chaleur, le sable sous leurs pieds… tout semblait les inviter à la détente.
Théo s’assit sur un rocher, enlevant ses chaussures, et tendit les bras en arrière.
— Ça, c’est la vie, hein ? Rien que l’air, la mer, et un peu de liberté.
Null n’eut pas immédiatement la même réaction. Il s’approcha de l’eau, pieds nus, les yeux fixés sur l’horizon. C’était un contraste. Lui, il avait l’impression de marcher sur des braises, constamment sur ses gardes. Ce ciel bleu parfait, cette mer calme… tout semblait trop beau. Un décor trop lisse.
Il n’y croyait pas.
— T’es pas bien, là ? s’étonna Théo, toujours en train de s'étirer, à moitié allongé sur le rocher. Null tourna la tête et répondit d’un ton presque froid :
— Je sais pas si c’est… assez. Un endroit paisible. Théo haussait les épaules.
— Ouais, mais… peut-être que la paix, c’est ça. C’est juste pas ton genre de l’accepter. Peut-être que, parfois, il faut juste être. Null baissa les yeux, contemplant l'eau. L’ombre, là, elle ne partait jamais. Elle le suivait discrètement. Quand il regardait autour de lui, elle était là, au bord de sa vision périphérique, toujours prête à se dissimuler dans les coins sombres. Mais cette fois, elle était plus proche.
L’ombre. Toujours là, avec ses yeux blancs. Étrangement, elle ne bougeait pas, mais Null la sentait grandir derrière lui, pesant sur ses épaules.
— T’as vu quelque chose ? demanda Théo sans bouger. Null fit un mouvement brusque vers la mer, comme pour se détourner de la sensation qui l’étreignait.
— Non, rien. Mais Théo le fixa un instant, ses yeux curieux.
— T’es sûr ? Null fronça les sourcils et se tourna vers lui, un peu plus fermement.
— Je suis juste fatigué, ok ? Je veux pas penser à tout ça maintenant. Un silence lourd tomba. Théo, plus observateur que Null ne le pensait, baissa les yeux sur le sable, réfléchissant.
— C’est toujours comme ça, hein ? Null se tourna vers lui, surpris par la question.
— Comme quoi ?
— Comme si t’étais toujours en guerre. Comme si… tu pouvais pas juste être là avec moi. Null resta là, figé. Il n'avait jamais réfléchi à ça de cette façon. Ses doigts se crispèrent autour de son épée, comme s’il se préparait à attaquer une menace invisible.
— J’ai toujours été seul, Théo. Toujours.
Le vent souffla plus fort, et la mer se fit plus agitée. Les vagues frappaient plus fort contre les rochers, et une brume fine commença à s’élever de l’horizon.
Théo se leva lentement et s’approcha de lui.
— Je sais. Mais ici, avec moi, t’es pas seul. Tu sais ça, pas vrai ? Null tourna lentement la tête. Il avait l’impression que Théo disait ces mots comme si tout ça allait durer éternellement, comme s’il pouvait le protéger de ce qui le traquait.
Mais le vent soufflait toujours, la brume montait, et…L’ombre. Null la sentait, plus proche que jamais, se faufilant dans la brume qui enveloppait le bord de la mer.
Et quand il se tourna pour regarder, l’ombre était là. Près. Elle ne bougeait toujours pas. Mais elle savait qu’il la voyait.
Les yeux blancs brillaient dans l’ombre grandissante de la mer. Null ferma les yeux un instant, un frisson glacé parcourant son dos.
Puis il souffla, presque imperceptiblement.
— Théo, on part. Maintenant.
Sans même attendre de réponse, Null tourna les talons et commença à marcher rapidement vers la plage, une urgence qui semblait envahir chaque fibre de son être. Théo, un peu perdu, se leva et courut après lui.
— Hey, attends ! Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi on… Null se retourna, les yeux fixes.
— On ne reste pas ici.
Théo cligna des yeux, mais il vit la peur dans le regard de son ami. Et pour la première fois depuis qu’ils s’étaient rencontrés, il n’insista pas. Ils coururent ensemble, traversant la plage déserte sous un ciel qui devenait de plus en plus sombre.
Dans la brume qui montait autour d’eux, Null savait. L’ombre les suivait, toujours. Et elle semblait même être...jalouse.
Annotations
Versions