Chapitre 5 — Chapitre écrit par E. L. Jones
50 nuances de grès
Les Montagnes du Nord étaient une entreprise impitoyable. Clitorhys n'avait malheureusement pas eu d'autre choix que de s'allier aux nains, mais vivre dans leur peuple s'avérait habiter une jungle où tous les coups étaient permis. Il leur fallait toujours produire, toujours plus de diamants, toujours plus de rubis, à des rendements optimaux sans quoi l'on s'arrangeait pour vous faire tomber plus bas que terre et afin que vous ne puissiez plus jamais être cadre de votre vie. Il traversa un instant l'esprit d'Araknida qu'elle pourrait intégrer ce système pour devenir une pédégère plus humaine envers ses salariés, mais son bon sens lui rappela que les femmes n'étaient après tout pas assez viriles pour être de bons supérieurs.
Alors qu'elle arpentait les galeries pour tout savoir de ce peuple dont la petitesse et le chapeau pointu nourrissaient ses fantasmes les plus enfouis, elle eut soudain une pensée pour Syphilis, ce formidable bad boy qui l'avait si promptement arrachée à sa condition ennuyeuse. Pourquoi ne recevait-elle pas d'avance de ce bel étalon ? Devait-elle davantage mettre de rouge à lèvres, de bleu à cils, pour se soumettre pleinement au joug inflexible du patriarcat ?
Il lui vint soudain l'idée téméraire d'aller espionner ce si mystérieux elfe. L'humaine se dirigea vers ses quartiers et regarda par le trou de la serrure. Tout son corps fut soudain saisi de convulsions et elle ne put retenir un petit hurlement de souriceau effarouché.
Syphilis était en compagnie de plusieurs naines, dont il tressait des nœuds dans les poils de barbe avant de les leur arracher pour fouetter leurs fesses roses. Que se passait-il donc là ? L'homme qu'elle avait tant aimé et fantasmé n'était-il donc qu'un vulgaire sado-masochiste ? Non, cela ne se pouvait, il y avait forcément une explication logique à tout cela !
« Syphilis ! cria-t-elle. Dis-moi que c'est une hallucination collective !
— Écoute, Araknida, je vais tout t'expliquer...
— Pas la peine, je vois clair dans ton jeu. Tu ne me mérites pas. Tu n'as jamais mérité personne !
— Très bien, je vais donc te l'avouer : je suis bel et bien un elfe bad boy BDSM.
— Oh, Syphilis ! Si tu savais comme je suis désolée d'avoir été si dure avec toi ! J'aimerais tant pouvoir me consoler !
— Tu n'as rien à te reprocher, Araknida, sinon d'être la mortelle la plus belle que j'aie jamais rencontrée.
— Alors pourquoi ne me fouettes-tu pas toi aussi ? Choséifie-moi, fais de moi ton esclave, puisque l'amour masculin semble obligatoirement passer par là !
— Non, Araknida, tu ne comprends pas. Je me réfugie dans le sexe et la drogue pour oublier la beauté des cheveux de ma bien-aimée Chlamydia. Elles, elles sont juste pour satisfaire mes désirs charnels, mais toi... (Il lui passa la main dans ses cheveux.) Tu es unique. Je ne veux pas faire de ta vie un enfer car je sais que je ne peux que te décevoir. Et puis je dois garder toute ma fidélité envers Chlamydia, car nous les elfes sommes attachés à nos valeurs...
— L'amour est une chose si belle ! Pourquoi vouloir le limiter ? Ne puis-je pas m'offrir à toi, le temps d'une nuit, pour repartir dès le matin telle la brise de la rosée ?
— Araknida... Les lanières de mon fouet égratigneraient ton si bel arrière-train, et je ne peux le tolérer !
— Alors initie-moi. »
Syphilis regarda l'énorme bouche pulpeuse. Un baiser d'amour véritable, voilà qu'il n'en avait pas offert depuis si longtemps... Il s'imagina l'extase qu'elle lui procurerait, ses ongles laminant sa peau tel un lion affamé, son fier bélier enfonçant ses forteresses cachées. Que de plaisir il retirerait de son corps ! Ce serait une véritable déclaration enflammée, plus pour son ego que pour elle il était vrai, mais quelle importance puisqu'ils ne formeraient plus qu'un ?
Ils s'apprêtèrent à se mordre réciproquement la langue tels les bêtes sauvages qu'ils s'apprêtaient à déchaîner quand le tocsin retentit.
« Alerte ! Les Montagnes du Nord sont assiégées !
— Vite ! s'exclama Syphilis. Il faut que je parte au combat !
— Syphilou... Reste encore un peu près de moi, dans ton alcôve si exquise...
— Je dois malheureusement partir.
— Alors je voudrais que tu saches une chose... Ce que j'ai appris avec toi, c'est à aimer la vie... Mais ce que je voudrais, c'est pouvoir te manquer. »
Syphilis lui lança un regard désolé avant de s'en aller vers son destin.
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