Partie XI

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Lorsque Eddy ouvrit les yeux, des rayons lumineux l'aveuglèrent. Il sursauta, se demandant quelle heure il pouvait bien être et combien de temps il lui restait pour virer Isidore avant que sa mère ne rentre pour le déjeuner. Jetant un coup d'œil par dessus l'épaule du brun, il soupira de soulagement en constatant qu'il était à peine un peu plus de neuf heures.

S'installant de nouveau au chaud sous ses couvertures, Eddy se prit à détailler le visage d’Isidore, endormi. Pas qu'il soit plus beau quand il dormait, mais au moins il était nettement plus supportable et ça, c'était déjà génial. Il fallait bien l'avouer — mais pas trop —, Eddy était plutôt satisfait d'avoir ce crétin — un objet de sexe masculin — dans son lit, presque autant qu'il l'avait été la première fois qu'il avait trempé son biscuit entre les jambes d'une donzelle. Pas que ça l'ait foutrement passionné, mais il s'était senti incroyablement mâle et viril après ça. Disons qu'il avait été capable de le faire et que ça l'avait bêtement rassuré concernant sa sexualité. Erreur !

Dans tous les cas, le mal était fait. Si Isidore s'était foutu de sa gueule, il avait de quoi satisfaire l'impasse en potins. Cette affreuse pensée en tête, Eddy sentit un frisson lui courir le long du dos. Il était désormais forcé de reconnaître qu'il avait un secret impossible à camoufler à la Terre entière puisqu'un de ses habitants avait levé le voile sur son intimité.

Eddy se posait la question de savoir s'il pouvait être en mesure de poursuivre normalement sa vie après cet échange de baisers passionnés. Il avait désormais l'étrange impression que la vérité était écrite partout sur les murs de sa chambre, voire pire : tout était entre les mains perfides du brun.

Isidore remua dans son sommeil, rappelant le jeune homme à la situation actuelle. Il gloussa doucement en contemplant le nez tuméfié du brun. Il l'avait bien mérité. Curieux, Eddy ne résista pas à l'envie de tripoter le pif encore gonflé d'Isidore. Ce geste fort peu bienveillant réveilla l'aîné, qui écarta brusquement la main du plus jeune.

— Ben dis donc, pour ce qui est des réveils en douceur on y repassera ! Qu'est-ce qu'il t'a pris, ça fait mal ! râla Isidore en se massant le nez.

— Désolé, j'voulais juste voir comment c'était, répliqua Eddy, confus.

— Ouais, ben pour voir, contente toi de tes yeux, bougonna le brun.

Quelques secondes passèrent, durant lesquelles le plus jeune sentit de nouveau la gêne l'envahir.

— Hey ! Salut ! s’exclama subitement son invité après s'être frotté les yeux, comme s'il venait de découvrir la présence de son hôte.

Eddy lui jeta un regard perplexe tandis que l'aîné s'approchait de lui pour l'embrasser sans ménagements.

— Babin, arrête, grogna le châtain en repoussant doucement le brun.

— Quoi ? questionna Isidore en fronçant les sourcils.

— Disquette ! On pue d'la gueule là, c'est le matin. C'est dégueulasse. Prends les bonbons sur la table, ronchonna Eddy en pointant du doigt une petite boîte.

— Rah ! La chochotte, j'te jure ! s’exclama le brun en secouant la tête mais en obéissant néanmoins.

— Ta gueule pélo. C'est pas toi qui a failli clamser en reniflant ton haleine de chacal, pesta le plus jeune, plus franc avec Isidore qu'il ne l'avait jamais été de toute sa vie avec qui que ce soit ; ce qui était certainement un signe à ne pas négliger.

L'invité tendit à son hôte une dragée et en saisit une lui-même.

— T’as l'air gentil, avec ton apparence de mouton-mignon-accro-à-la-mode-boulet-neuneu-mordu-de-sport, mais en fait, t'es sacrément chié, répliqua Isidore, le bonbon à la bouche.

— Crève, asséna Eddy.

— Seulement après un baiser fougueux. Sens ! J'ai l'entraille qui embaume le citron mentholé ! siffla le brun, goguenard, en expirant sous le nez du plus jeune — qui tourna la tête —, désabusé.

— Tu gaves direct, dès le matin, affirma Eddy, qui tentait de composer avec sa gêne, en mettant un gentil coup sur l'épaule d'Isidore.

L'aîné pouffa de rire, venant malgré tout se coller au plus jeune pour le bécoter consciencieusement. Mal à l'aise, son hôte se prit cependant à sourire bêtement et il attrapa le visage d'Isidore entre ses mains pour l'embrasser dans les règles de l’art.

— Attends ! dit le brun en s'éloignant d'Eddy. Il est quelle heure ? Tes parents sont pas là ? On a un peu de temps pour être tranquilles ?

— Pas encore dix heures, on a le temps, répondit ce dernier avec un petit sourire, avant d'aller renouer ses lèvres à celles d'Isidore.

— J’aime bien comment t'embrasses, chuchota le brun entre deux baisers.

— Moi aussi, murmura Eddy, se serrant un peu plus contre Isidore.

— Toi aussi t'aimes bien comment t'embrasses ? Narcissique ! s’esclaffa l'aîné.

— Ferme ta gueule ! grogna le châtain.

Parti dans un éclat de rire, Isidore était plié en deux sous les couvertures. Face à cette bonne humeur des plus communicatives, Eddy gloussa aussi.

— T’es quand même vachement mignon, même si tu parles n’importe comment, reprit Isidore une fois calmé, glissant une de ses mains dans les cheveux du plus jeune.

Eddy se contenta de sourire, quelque peu dérangé par la situation ; et à défaut d'une réponse, il se contenta d'embrasser de nouveau son partenaire.

— T’es pas gêné par ce qui nous arrive ? demanda-t-il à Isidore, une fois le baiser échangé.

— Mmh ? Si, un peu… marmonna le brun en souriant.

— Moi, euh... c’est la toute première fois que ça m'arrive, avoua Eddy en fixant son invité dans les yeux, sérieux comme jamais, en rougissant légèrement et en esquissant une drôle de grimace.

— Pareil... confessa Isidore, hagard, ses grands yeux ouverts, en levant la tête de l'oreiller ; un des côtés de son crâne voyait pulluler des cheveux aplatis par une nuit relativement paisible, ce qui lui conférait un air des plus ahuris et un manque de style des plus complets aux yeux d'Edouard.

— On dirait pas, t'as l'air habitué... dit le châtain, avec suspicion.

— Faut bien compenser ton attitude et avoir du culot, répliqua le brun en lançant un grand sourire au plus jeune.

— J’ai pas peur, mentit Eddy.

Dans un sens, il n'avait pas vraiment tort. Ce qui le gênait réellement, c'était le fait qu'on puisse l'apprendre et que ça ruine bien des choses dans sa vie. Il se faisait chier à cultiver une certaine attitude pour avoir une certaine réputation. Il n'allait pas risquer de tout bousiller juste pour le sourire d'un zouave à l'intelligence douteuse.

— Si tu le dis, grommela Isidore en ricanant.

— Babin, t'es un vrai gamin. Pas chaud de rester sérieux deux minutes, soupira Eddy.

— Bien sûr que si... t’es juste pas drôle, alors je fais contrepoids, ronchonna le brun.

Le plus jeune ne dit rien et secoua la tête, rivant ses yeux au plafond et se concentrant pour vider son esprit.

— T’as aucune raison d'avoir peur, commença Isidore. J'ai envie d'être avec toi, et je crois que t'as aussi envie d'être avec moi. Et vu qu'on y connaît rien, pas de raisons de se foutre la pression non plus, au contraire. C'est super, parce que j'avais un peu cette idée en tête depuis un moment. Je te voyais, tout mignon, je t'aimais déjà bien, donc c'est bien tombé.

Isidore s’expliquait calmement, tout en jetant des coups d'œils au ciel partiellement bleu et aux rayons de soleil bienvenus qui s'invitaient dans la pièce.

— Ouais mais, on est pas seuls au monde, déclara Eddy.

— Je vois... toi et les autres, une folle histoire d'amour qui ne te permet pas de les tromper avec moi, c’est ça ? dit le brun, légèrement vexé.

Son hôte tourna la tête, embarrassé.

— Tu captes pas, t'es pas dans le truc, murmura le châtain, gêné.

— T’es pas obligé de raconter ça à toute la planète. Tu dis rien, et on te fait pas chier, assura l'aîné.

— Oui, mais les gens parlent quand ils voient des choses qui sont pas comme d'habitude, lança Eddy.

— Vis pour et à travers les autres va, t'iras loin, balança Isidore en se levant.

— Disquette ! Tu fais quoi là ? demanda le plus jeune en s'asseyant sur son lit.

— Je file, j'ai plus rien à faire ici. J'ai plus envie de rester, en fait. Je viendrai te rendre tes vêtements plus tard, déclara le brun en prenant ses affaires.

— Arrête ! s’exclama Eddy, outré. J'ai rien fait ! On parle ! Pourquoi tu joues ton bâtard ?

Isidore lui jeta un regard sévère.

— Fais pas ta pute, merde ! râla le châtain en quittant son lit, allant rejoindre son invité pour l'attraper par le bras.

L'expression sur le visage de l’aîné se fit un peu plus douce, quoique toujours amère.

Eddy prit Isidore dans les bras et ce dernier se laissa faire. Il l'embrassa et le brun répondit à son baiser, avec une sacrée dose d'assurance en moins.

— Ça va pas ? T'as un problème ? questionna le châtain en fixant l'aîné dans les yeux.

— Non, ça va, répondit Isidore en se dégageant doucement de son étreinte.

Le plus jeune constata bien évidemment que c'était faux, mais il n'osa pas insister.

— T’as faim ? s’enquit Eddy, cherchant à dissiper le malaise.

— Non, c'est bon. Merci, répliqua son invité.

— Ton ventre grogne, le gronda piteusement Eddy, qui au final préférait voir Isidore se moquer de lui plutôt que de sembler si morose.

— T’en fais pas. Je voudrais surtout pas déranger et en plus de ça manger votre nourriture, dit simplement le brun, avec une pointe de sarcasme qu’Eddy ne détecta pas.

— Oh, ça va. J'suis chez-moi, j'nourris qui j'veux, grommela le châtain en prenant son invité par la main et en le traînant hors de la chambre.

Ayant discrètement amené Isidore dans la cuisine et l'ayant forcé à prendre place autour d'une petite table, Eddy s'employa à préparer rapidement un petit déjeuner relativement copieux. Le brun lui semblant un peu trop chétif, son hôte avait inconsciemment l'intention de le remplumer. Puis, prenant place près de son invité, le châtain resta un instant interdit en le voyant grailler comme un porc, engloutissant le tout sans trop réfléchir, alors qu'il donnait l'impression d'avoir un appétit d'oiseau. Eddy en fut cependant satisfait.

La scène s'étant déroulée sans un mot — un exploit pour nos loustics —, Eddy s'empressa de remettre un peu d'ordre dans la cuisine et de ramener Isidore à l'étage. Après tout, son frère était censé être encore à la maison, il l'avait oublié — la panique l’envahit lorsqu’il réalisa ce fait. Ceci dit, comme il ne se levait pas avant midi, a priori ils n'avaient couru aucun danger.

— Alors, ça va mieux maintenant ? demanda le châtain, une fois qu'ils furent de nouveau dans l'intimité de sa chambre.

Le brun hocha la tête avant de prendre la parole.

— Dis moi, t'es sûr qu'il n'y a personne chez-toi ? Ton frère bosse aussi ? questionna-t-il en réponse.

— Non, il dort, j'crois, avança le plus jeune.

— Alors Monsieur prend des risques ! s’exclama son invité, les yeux écarquillés et un sourire malicieux aux lèvres.

— En fait, je l'avais oublié... avoua Eddy, confus.

Isidore ricana bêtement et son hôte s'en trouva rassuré. Tout s'arrangeait.

Le brun s'approcha du plus jeune et l'embrassa brusquement, sans plus de cérémonies. Eddy le plaqua contre lui et lui mordit les lèvres, désireux de goûter un peu plus son partenaire. Isidore lui rendit la pareille, tout en lui agrippant les cheveux. Usant de sa force, Eddy accula l'aîné contre un mur. Un gloussement facétieux s'échappa des lèvres du brun, qui s'accrochait au châtain avec un contentement évident.

Les baisers alternant entre plus ou moins féroces — dents contre lèvres — et plus ou moins doux — langue contre lèvres — Eddy décida alors de glisser sa bouche sur le cou d'Isidore et le mordit, soulageant ensuite la légère douleur d'un coup de langue. Les faibles soupirs de l'aîné démontraient au plus jeune que la situation n'était pas pour lui déplaire.

Les mains sous le teeshirt du châtain, Isidore le caressait sans ménagements, remontant tranquillement le long de son dos, et passant de l'arrière vers l'avant.

— Tu veux bien l'enlever, c'est pas pratique, marmonna le brun en tirant sur ledit teeshirt.

Eddy acquiesça et ôta l'objet incriminé.

Passant ses mains sur le torse de son hôte, Isidore sourit, charmé par l'ambiance et par le jeune homme qu'il avait sous les yeux. Quant aux mains d'Eddy, plaquées contre le mur de part et d'autre du brun, elles ne servaient qu'à enfermer l’aîné dans un cocon sensuel.

— Tu vas me dévorer tout cru ? demanda Isidore, l'œil pétillant.

— Ça se trouve, ouais... répliqua Eddy en passant distraitement sa langue sur ses lèvres.

— T’as de la chance, je suis un produit tout frais ! dit le brun, rieur, en resserrant sa prise sur le corps du châtain.

— De quoi ? fit simplement le plus jeune, entre deux baisers dans le cou de son invité.

Isidore ne répondit pas, se contentant de rire faiblement.

— Enlève ça, toi aussi, grogna subitement Eddy en désignant le teeshirt du brun.

Les joues rouges et un petit sourire gêné aux lèvres, Isidore rendit la situation plus équitable en se mettant au niveau de son hôte.

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