Assieds-toi et regarde #2 : La forêt de la fatigue
Nous sommes assis sur un siège improvisé, un roc qui lutte contre la pente, là où tout autour ont chu le arbres aux troncs fins et crochus, comme des côtes grises trop modestes sur un éléphant de terre et calcaire si immense. Tout n'est que vert, gris et bruns et les arbres nus semblent se dresser, austère, dans une pudeur qui attend que l'on les rhabille. Ce ne saurait tarder : la verdure pousse le bout de son nez et aux nôtres poussent ses odeurs piquantes d'ails, tandis que les oiseaux discutent sans cesser, loin, haut, dans les colonnes immenses.
Le vent fait grelotter les feuilles mortes restées dans l'arbre juste devant, recroquevillées, sonnant comme si une pluie fine et virtuelle les martyrisaient en cadence.
Au-delà de la pente raide, un chemin blanc serpente sur un fond vert. Ses entrelacs semblent tous plats de cette altitude et courant jusque sur une grande route, barrant la fin du mont comme une cicatrice. Au loin, la plaine alterne entre verts et marrons comme les tâches des vaches qu'elle nourrit.
A droite, un tronc noirci par l'âge semble simuler une partie de mikado avec d'autres de ses compagnons atterrés, tenant par une mystérieuse gravité sur cette pente couverte des débris du dernier été.
Le ciel monochrome semble hésiter à délaver le paysage pour étendre sa noirceur digne des Stones. Nous devons partir sinon nous ne le pourrons.
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