Préambule
Pour commencer, et pour être tout à fait honnête, vous devez savoir que je suis un connard. Je ne suis pas le pire de tous, loin de là, et je suis même globalement un chic type d’après mes amis, mais je suis aussi un connard, et c’est surtout cette facette de moi que vous allez côtoyer au détour de ces quelques pages. Je suis solitaire, asocial et misanthrope. Je n’ai aucune patience, je hais le genre humain et – crime suprême – je n’aime pas les enfants (même si ça n’a rien à voir). Je parviens généralement à faire bonne figure mais, au fond de moi, je suis un insupportable misanthrope et un odieux cynique. Je n’aime pas les gens en général, et j’ai une haine profonde pour les incompétents qui m’entourent – tout particulièrement au travail. Ces pages leur sont dédiées – c’est un hymne à leur médiocrité. J’y étalerai tout mon fiel pour me soulager. Mais, au-delà de mon indéniable mauvaise foi et de mon inévitable parti pris – que je souhaite placer en préambule afin qu’on ne vienne pas me gonfler avec de vaines polémiques (ceci est un cri du cœur, pas un essai de sociologie du travail) –, vous devez savoir que le flot d’insultes que je m’apprête à déverser est, de manière générale, justifié. Chacun pourra en juger à l’aune de son expérience personnelle, et le lecteur curieux pourra se reporter aux quelques références données à la fin du texte, pour aller vérifier que je ne dis pas (que) des conneries : l’incompétence en entreprise est un art qui ne manque pas de maestros. Je souhaite ici rendre hommage à tous ces artistes qui s’ignorent, à tous ces managers prétentieux et à tous ces chefs de projet inutiles qui sont responsables du délitement de notre industrie.
Pour que ma parole ait un minimum de poids, il me semble nécessaire d’en dire un peu plus sur ma personne, ainsi que sur mes compétences réelles (ou supposées). Je ne suis pas un génie, je n’ai pas fait Polytechnique et je ne suis pas non plus titulaire d’un doctorat en psychosociologie, mais je pense pouvoir dire que je ne suis pas le dernier des abrutis. J’ai un diplôme d’ingénieur généraliste (classé dans les trois premiers à vue de nez) ainsi qu’un diplôme d’ingénieur en génie atomique de l’INSTN (idem). J’ai décliné (stupidement) une thèse au SEA (Secrétariat à l’Énergie Atomique). Je travaille depuis maintenant dix ans dans un grand groupe, où l’on m’a proposé d’être chef de section adjoint – j’ai cependant décliné : cela ne m’intéresse pas. Et, récemment, c’est uniquement parce que la personne que j’aurais pu être amené à remplacer savait pertinemment que je n’en avais rien à cirer que mon nom n’a pas été proposé pour devenir chef de projet. Quand les financements sont disponibles, je publie de temps à autre des articles scientifiques dans des revues d’ingénierie. Je suis un scientifique par vocation, et ce n’est pas par accident ou indécision que je suis devenu ingénieur. Je lis une quarantaine de livres par an, principalement de la littérature scientifique (cosmologie, physique des particules, neurosciences, anthropologie, biologie évolutive, etc.) mais je lis également de la philosophie, de la poésie et des classiques, et je ne rechigne pas à me plonger dans des essais d’analyse économique ou politique ni à lire des articles de sociologie d’entreprise. Tout ça pour dire que je ne suis pas le premier blaireau venu, et que ce que j’ai à dire pourrait bien mériter un minimum d’attention de la part de ceux qui contrôlent nos entreprises. Même si, je le répète : ceci n’a pas la prétention d’être un essai de sociologie en entreprise. C’est juste le cri du cœur d’un chic type un peu connard sur les bords, qui n’en peut plus de voir tant d’énergie et de pognon foutus en l’air, sacrifiés sur l’autel de ce que certains osent encore appeler management d’entreprise.
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