- Bonjour Monsieur Himan. Installez-vous.

- Merci Docteur.

- Myra n'est pas avec vous ?

- Impossible de la faire bouger de sa chaise. Je m'en excuse.

- Inutile, ce n'est pas grave. Mais pourquoi êtes-vous venu déjà ? Excusez-moi mais j'ai tellement de patients que je ne m'en sors bientôt plus !

- J'ai la garde de ma petite-fille depuis quelques jours et je ne sais pas comment faire....

- Pour quelle raison en avez-vous la garde ?

- Ses parents sont tous deux morts et je suis le seul qui est accepté de l'héberger. Il faut dire que j'y ai été contraint : personne ne voulait d'une malade mentale dans les pattes. Y compris moi. Mais tous les autres ont leur propre famille.

- Toutes mes condoléances. S'occuper d'une personne atteinte de troubles mentaux est très lourd à gérer pour l'entourag. Tout change : notre rythme de vie, nos habitudes, notre liberté parfois...

- Si mon fils avait su prendre la bonne décision....

- Qu'entendez-vous par là ?

- David et sa femme savait que Myra allait avoir des problèmes mentaux. Samia aurait pû avorter mais ils en avaient tellement voulu et bavé pour avoir cet enfant qu'ils n'ont rien voulu entendre et ont décidé de le garder.

- Vous savez Monsieur Himan, s'ils auraient voulu avorter, ils auraient fait de l'eugénisme en quelque sorte. Ne trouvez-vous pas ça injuste ?

- Peut-être, mais ne pensez-vous pas que Myra aurait-été plus heureuse sans être obligée de vivre ainsi. Quelle avenir voulez-vous qu'elle est : elle est incapable de se débrouiller seule !

- Je n'aurais normalement pas eu le droit de vous faire part de ma vision des choses sur ce point. Certains enfants ont certes moins d'avenir que d'autres mais je reste convaincu qu'ils ont tous quelque chose à apporter dans ce monde. Ce n'est que ma vision, et je ne renie nullement la vôtre. Encore une chose, Myra à certes des problèmes et ne pourra jamais être totalement autonome, cependant, même si cela est bien plus long pour elle, elle peut apprendre. C'est ce que ses parents s'efforçaient de faire chaque jour et c'est ce travail entrepris que vous devez continuer avec elle.

- J'entends, mais je n'ai pas le temps pour tout ça. Myra demande une attention de chaque instant mais je ne peux pas lui donner.

- Avez-vous essayé ?

- Je... Il n'existe pas des centres de placement ? Parce qu'avec mes problèmes de vue je sais qu'il m'est impossible de m'occuper convenablement d'elle.

- Votre petite-fille a subi récemment un choc à cause de l'accident et de la mort de sa mère. Je pense que l'éloigner de sa seule famille restante pourrait lui être nuisible.

- Dites-moi quoi faire alors.

- Je n'ai malheureusement aucune recette à vous donner. Et personne ne le pourra. Myra à des difficultés de prononciation. Principalement avec les sons "Ch", "r" et "l". Elle a également des problèmes divers concernant l'autonomie et un retard mental. Je ne crois n'avoir rien oublié. Le retard mental entraîne un ralentissement et des difficultés d'apprentissage. Cependant, comme je vous l'ai dit, elle peut finir par arriver à faire de gros progrès si elle est bien encadrée. Et je la connais depuis assez longtemps pour vous dire qu'elle est tout à fait capable de vivre en société. Surveillée certes, mais le placement ne presse pas. Je crois que le plus gros souci que vous avez est votre peur de mal faire et peut-être aussi votre manque de confiance en vous. Mais ça ça arrive à tout le monde. Même aux parents ayant des enfants sans souci. Vous êtes quelqu'un de bien Gustave, je vous connais également assez pour le dire, et vous serez trouver votre manière de fonctionner avec la petite. Je ne me fais pas de souci là-dessus.

- Myra ne m'aime pas. Elle serait mille fois mieux dans un centre. Pouvez-vous préparer un dossier.

- Si c'est votre demande je ne peux pas m'y opposer. Sachez toutefois qu'une place dans ce genre de structure est très coûteuse et aussi difficile à obtenir. J'insiste encore en vous disant que ça ne me paraît pas la meilleure alternative.

- C'est ma seule requête. Au revoir Docteur Astier.