Chapitre 12 - Bri
Purée ! Quel crétin cet Allan. S'il croit qu'insister va me faire changer d'avis, il se trompe lourdement.
Mon regard est toujours fixé sur le corps de cette brune siliconée, au sol, visiblement K.O.. Merde. Je viens bien de la frapper?! J'ignorais que j'en serais vraiment capable le moment venu. Visiblement, je suis plus douée que je ne le pensais. Purée, je l'ai vraiment mise K.O. en un coup ! Oh purée ! Oh purée ! Oh purée !
Ok, il faut que je me calme. L'adrénaline coule dans mes veines et me rend quelque peu euphorique. Si je m'écoutais, je sautillerai sur place comme une gamine. Des sifflets, applaudissements et rugissements me ramènent immédiatement à la réalité. Mon regard parcourt les hommes devant moi, qui m'acclament et me félicitent.
D'un coup, je suis très mal à l’aise et mes joues me chauffent. Elles doivent avoir rougies. J'aimerais pouvoir fuir, me soustraire à toute cette attention, à cette tension que je ressens. Mais avant que je ne réalise vraiment ce qui se passe, quelqu'un me saute dessus. Nina. Je l'ai vue rager et avoir envie d'arracher les yeux de la bombasse siliconée. J'aurais pu la laisser faire, mais c'est à moi que cette fille en voulait. Et je voulais me prouver que je n'étais plus une victime. Que je me suis endurcie. Et que je suis, non seulement capable de mener le combat que je vais devoir mener contre lui, mais que je suis aussi capable de le gagner.
Alors, je ne pouvais décemment pas baisser les bras devant une espèce de bimbo décérébrée. Non. Je me suis promise de ne plus être une victime. Je me suis beaucoup trop entraînée pour ça. Trois heures journalières avec Darel, ancien militaire, reconverti en coach sportif, rompu à toutes les techniques de combat et maniement des armes. Mais plus que ça, il a été un véritable ami. Il m'a aidée à reprendre le dessus. À me dépasser. À tenter de briser cette emprise qu'il avait sur moi. Il m'a enseigné tout ce qu'il savait. Je lui dois beaucoup. J'aurais aimé poursuivre notre collaboration, mais avec la distance, c'est désormais impossible. D'ailleurs, il faudra que je le contacte pour savoir s'il aurait quelqu'un à me recommander ici. Je n'ai pas eu le temps de m'en occuper.
— Bri putain, me souffle Nina. Si elle t'avait touchée, je l'aurais butée cette poufiasse. Mais visiblement, je me suis inquiétée pour rien, ajoute-t-elle, en se détachant un peu de moi pour plonger son regard émeraude dans le mien. T'as écouté mes conseils. T'as pris des cours.
— Bien sûr. Qu'est-ce que tu crois. Mais je ne me serais jamais imaginée capable de les mettre en pratique, souris-je presque gênée.
— Putain ! Tu rigoles ! T'as carrément assuré ! Regarde-les, me lance-t-elle en désignant la bande de bikers qui m'acclament toujours. Ils sont sous le charme. Et ils peuvent ! T'as été une vraie lionne ! Féroce et déterminée ! Putain, je suis trop fière ! Et si Hunter avait été là, il t'aurait demandé de l'épouser direct. Y'en a un autre qui...
D'un coup, deux bras m'enserrent plus étroitement, me collant de nouveau à un torse dur. Et comme la première fois, des frissons me parcourent l'échine. Un visage se love dans mon cou et avant que j'ai le temps de dire quoi que ce soit, ses lèvres frôlent ma peau et la pointe de sa langue trace un sillon brûlant en remontant jusqu'à cet endroit hyper sensible derrière l'oreille, où il dépose un baiser avant de prendre en otage mon lobe entre ses dents et de le mordiller.
Oh putain. Il fait soudainement chaud. Très chaud. Merde. Ce mec est un appel à la luxure, aux vices. Son corps parle au mien. Je suis parcourue d'une décharge électrique à chaque fois que sa peau entre en contact avec la mienne. Son parfum attise mes sens. Une odeur ambrée, masculine, virile, teintée de cuir, de whisky et de tabac… Je ne suis plus qu'une poupée de chiffon entre ses mains.
Mayday ! Mayday ! On me perd ! Purée Bri, ressaisis-toi ! Arrête ça tout de suite ! Plus de mec ! Plus. De. Mec !
Il faut que je le tienne éloigné. Être proche de moi le met en danger. Il est hors de question que ça se produise. J'ai une mission. Sortir Hunter de prison. L’innocenter. Et l'anéantir lui. Pour ça, je dois rester concentrée. Et ça va être difficile, si Anchor ne cesse de faire ça, de me coller à lui et de me provoquer. En même temps, curieusement, je me sens en sécurité, lovée au creux de ses bras. Il y a longtemps que ça ne m'était pas arrivé. Et puis, il y a cette soudaine complicité, comme si on se connaissait depuis toujours.
Purée, Bri ! Tu dérailles !
— Je devrais peut-être me méfier... T'as un sacré crochet du droit mon p'tit chat, me glisse-t-il doucement à l'oreille.
— Peut-être, réponds-je sur le même ton. Surtout, si tu continues de me coller à toi sans raison, ni permission.
— Tu mordrais, Pussycat ?
Sa proximité déclenche de nouveaux frissons. Oh purée. Je sens son souffle sur ma mâchoire. Nous ne sommes plus que tous les deux, le reste du monde s'efface. Je suis concentrée sur ses doigts, qui me caressent le ventre par-dessus la soie de mon chemisier. Chacune de ses caresses déclenche une série de frissons le long de mon échine et se répercute directement jusqu'à mon intimité. Mes jambes se serrent l'une contre l'autre. Je suis trempée. Je ne suis plus que lave en fusion. Mon sang bout et mon cœur brûlant pulse à mes oreilles. Une chaleur se répand au creux de mon ventre. C'est un véritable brasier. Purée. J'ai envie de ce mec. Vraiment envie. Au point de m'imaginer lui sauter dessus, là, maintenant.
Quoi ?! Attends un peu. J'ai envie d'un mec, moi ?! Oh purée ! Une première. Jamais un mec n'a provoqué ça en moi, même pas lui au début.
— Tu ne m'as pas repoussé. Et tu ne me repousses toujours pas mon p'tit chat. T'as même plutôt l'air très réceptive, me souffle-t-il taquin, avant de m'embrasser à cet endroit stratégique vers l'oreille.
Ok. C'est officiel, il me fait un putain d'effet. Beaucoup trop pour ma tranquillité d'esprit. Je ne peux pas le laisser croire que c'est possible. Parce que ça ne l'est pas.
— Peut-être par respect pour ton égo. Il serait rudement mis à mal devant tes frères, non ? J'ai cru comprendre que vous étiez de gros durs, des machos, réponds-je mi amusée, mi cassante. Il serait mal venu de te coller la honte devant tes “frangins”, non ?
Les caresses cessent d'un coup. Son souffle se coupe. Son corps se tend. Je viens de faire éclater notre bulle. Et bizarrement, je ne me sens pas mieux, même si je sais que c'est la meilleure solution.
— C'est la seule raison ? Tu es sûre mon p’tit chat ?
— Oui. Tu ne le sais peut-être pas, mais les mecs, ce n'est pas vraiment mon truc.
Quoi ?! Mais qu'est-ce que je raconte ?! Il ne manquait plus que ça !!
J'entends Nina presque s'étrangler de rire pas loin. Traîtresse.
— J'en crois pas un mot. Ton corps dit le contraire. Mais, si tu préfères te mentir Pussycat, pas de problème. Tu finiras par me tomber dans les bras. Personne ne me résiste bien longtemps.
— Est-ce un défi ? Parce que si c'est le cas, tu l'as déjà perdu Sexy Navy, réponds-je déterminée.
Il se détache de moi et soudainement j'ai froid. Son rire retentit. Et purée, même son rire est sexy, vous le croyez ça ? Je me rends soudain compte que si c’est bien un défi, il va être un supplice de tous les instants. Il est la tentation faite homme.
Mais, purée ! Moi... Moi, je suis la Reine des Glaces après tout. Les hommes me sont indifférents. Il me suffit de remettre mon masque. Et j'excelle dans ce domaine !
— Sexy Navy, hein ? dit-il avec cette voix et ce petit sourire à faire s'enflammer les petites culottes à plus de vingt mètres à la ronde.
— Je n’ai rien trouvé de mieux, l'allumeur, lancé-je en le défiant du regard. Mais si tu me laisses deux minutes, je devrais pouvoir le faire.
Il grogne. Ses frères sifflent, se marrent et se foutent de lui.
— Putain Sergent, on dirait bien qu'tu t'es dégoté une gonzesse qu'a des couilles et pas froid aux yeux !
— Elle va te mater enfoiré !
— Tes couilles sont en sursis !
— Vos gueules bande de connards ! gronde-t-il.
— Ça suffit, tonne Apocalypse. Nettoyez-moi ce merdier, ordonne-t-il à ses gars en désignant la copie brune de barbie en plus retouchée, qui commence à bouger. Vous, dans mon bureau, nous désigne-t-il.
Avant qu'il ait eu le temps de terminer sa phrase, je me retrouve chargée sur une épaule solide comme un filet de pommes de terre, sous les rires et sifflets des bikers présents et de Nina. Je crie, me débats, le frappe, mais rien à faire. C’est un colosse ce type. Taillé dans le marbre. Je ne fais clairement pas le poids.
— Tu croyais quand même pas t'en tirer aussi facilement mon p'tit chat.
Je l'insulte de tous les noms d'oiseaux possibles et imaginables, avant de m'apercevoir que j'ai une vue imprenable sur son postérieur. Et quel postérieur ! D'un coup, une idée me traverse l'esprit. Une petite vengeance. Alors qu'il monte les escaliers deux marches par deux, comme si je ne pesais rien, je le mords.
— Oh putain ! gronde-t-il, vilaine fille ! Ça mérite une bonne fessée !
— Non mais tu déconnes j'espère ! C'est toi, qui...
Au moment où le dernier mot franchit mes lèvres, sa main s'abat sur mon postérieur. Oh purée ! Je rougis violemment, autant de colère que de confusion. Son geste me ramène dans le passé. Et pourtant, il n'a absolument rien à voir avec les coups et la violence que j'ai subi. Et ça me déstabilise encore plus. Anchor s'aperçoit que quelque chose ne va pas. J'ai arrêté de me débattre et de le traiter de tous les noms. Autrement dit, je verse dans la véritable version du sac à patate. Docile et silencieux. Lorsqu'il me dépose au sol, je suis toujours complètement mutique, perdue et en colère. Je lui adresse un regard noir en me dégageant brusquement de ses bras. Il fronce les sourcils sans comprendre, sa bouche s'ouvre, mais il n'a pas le temps de dire quoi que ce soit, qu'Apocalypse, Shadow et Nina nous rejoignent, suivis d'autres bikers que je ne connais pas. D'un signe de tête, Apo nous invite à entrer. Nina, voyant ma tête, reste près de moi.
Le Président s'installe dans le fauteuil en cuir derrière son bureau, Shadow derrière lui, appuyé contre le mur. Anchor, lui, s'appuie nonchalamment contre le mur près de la porte, les bras croisés et le visage renfrogné. Apo nous indique deux fauteuils d'un signe de tête. Les quatre autres bikers se positionnent de manière à nous faire face. Avec la présence de ces titans, la pièce paraît beaucoup plus petite
Une fois installées dans de confortables fauteuils de cuir brun, qui font face au bureau d'Apo, je balaie la pièce du regard. C’est plutôt grand pour un bureau et bien agencé.
Derrière Shadow et Apo, trônent fièrement des centaines de photos du club, des bikers lors de soirées, sorties en bécanes ou d'autres événements. Ils ont tous l’air souriants et heureux, presque comme une famille.
Les murs sont recouverts de bois brut, qui s’assemble bien avec les poutres métalliques, qui structurent le bâtiment. Le bureau est également fait de bois et de métal. Il est assez imposant. Des affiches embellissent les murs. Des affiches vintages représentant des pin-ups sur des motos et quelques affiches de Harley Davidson. Et derrière nous, des armoires de rangement en métal brut, que j’ai aperçu en entrant.
— Tu voulais qu'on parle de la situation d'Hunter. On t'écoute, commence Apo.
— Euh… pardon, mais pourquoi est-on aussi nombreux ?
— C'est vrai, tu ne connais pas Crow, Rift, Jam et Deep.
Chacun hoche la tête à l'entente de son prénom et je leur réponds de la même manière.
— À nous sept, huit avec Hunter, nous formons une sorte de haut conseil du club. Le conseil restreint. On ne leur cache absolument rien. Tu peux avoir confiance en chacun des membres ici présents, me répond Shadow avec douceur et bienveillance.
— La confiance, ça se gagne. Ça se mérite, rétorqué-je.
Pour toute réponse, il hoche la tête. Comme les autres hommes.
— On est d’accord, affirme Apo. Mais Hunter est en taule et on n'a pas vraiment le temps de prendre le thé et de faire la causette, alors accouche ! Je garantis la fiabilité de mes hommes.
— Ils sauront tenir leur langue, peu importe ce que tu as à dire, complète Shadow. Ce qui se dit dans ce bureau, reste dans ce bureau.
Je promène mon regard sur chacun d’eux, les scrute avec attention avant d’acquiescer.
— Très bien. Hunter vous fait confiance. Nina aussi. Je ferai de même. Mais si l'un d'entre vous… commencé-je durement avant d'être coupée par ma lionne.
— Bri, explique-leur, s'il te plaît. Sinon, je le fais.
Ok, le moment de vérité est arrivé. Même si je ne peux pas tout leur dire, il faut qu'ils sachent qu’ils sont en danger tant que je serai parmi eux.
— Très bien. Mais avant, je veux votre parole que quoi que je dise, vous ne ferez rien.
— Hors de question, lâche Anchor, l'air sombre.
— Pourquoi ?
— Si tu nous le demandes, c'est que tu sais déjà que ça ne va pas nous plaire. Et tu voudrais qu'on reste bien tranquille, comme des putains de clébards bien dressés. Autant nous couper les couilles et nous les faire bouffer au p'tit déj. C’est non.
— Ne me tente pas.
— Oh putain, la ferme tous les deux ! Allez baiser un coup, ça vous détendra ! nous coupe Nina à qui j'adresse un regard noir, pendant que les mecs se marrent.
— Ok, ce que Bri va vous dire ne va pas vous plaire, c'est clair. Mais elle est la mieux placée pour savoir quoi faire. Agir comme des cons, n'est pas une option. Elle veut juste être sûre que vous ne ferez rien de stupide, comme foncer dans le tas ou jouer à celui qui a la plus longue. Ça ne veut pas dire qu'elle veut vous laisser à l'écart. Pigé ?
Anchor maugrée quelque chose d'incompréhensible, mais acquiesce.
— T'as ma parole, grogne Apo.
— La mienne également, ajoute Shadow.
Tous les autres suivent. Anchor se contente d'hocher la tête.
— Très bien, lâché-je résolue. La cible n'était pas Hunter. C'était moi.
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