Mort aux vaches

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Damned ! Elle est là, une splendeur dans sa robe verte.

Elle est carénée comme une déesse.

Elle a un nom excitant, STINGER un nom provocateur, j'ai toujours été sensible aux noms et aux belles étrangères.

Oui je sais elle n'a qu'un an.

Mais quand on aime on ne s'attarde pas à ce genre de détail.

Je l'ai montée... Bordel... je suis sûre qu'elle vibrait de plaisir.

Ses deux conduits on peut appeler cela comme ça... je crois que je les ai caressés longuement.

Des jappements, du muscle, du punch, des aiguilles qui partent vites tout le temps à droite.

Bande de pervers de quoi croyez vous que je parle ?


De ma première routière, on est en 1990 et je viens de m'acheter une 750 Kawasaki chez Planel Moto à Carcassonne.

Il fait beau mais c'est le soir.

J'ai promis de rentrer sur Perpignan.

Mais bon je vais d'abord faire le beau sur le boulevard de Varsovie.

Une terrasse de café, un arrêt.

Béquillée je ne peux que l'admirer.

Aucun doute, aucune ambiguïté, cette bécane veut de la piste, des routes ouvertes la poignée dans le coin. Un demi, une clope, deux clopes.

Des gamins qui bavent devant mon monstre et qui regardent impressionnés les compteurs.

Je sais qu'elle peut prendre plus de 270 au compteur.

On allait pouvoir s'amuser sur l'autoroute.

À moi le grand ruban, je prendrai l'échangeur à Carcassonne Ouest.

En bas de la cote je sais qu'il y a un radar.

Mais comme il prend de face rien à foutre.

Une séance photo comme on dit avec les potes.

De toute façon je vais attendre la nuit.

Il me tarde d'allumer ses doubles optique et de foncer plein pot vers le sud.

Une pichenette et j'envoie ma dernière clope sur le trottoir.

Je vais tout de même pas salir un cendrier.

Je l'enfourche, je me rends bien compte que la donzelle n’est pas si exclusive que ça.

La position de conduite est sport.

J'ai pas l'habitude.

Je n'ai piloté que des trails et des enduros, mais je prends confiance.

La prise en main est d’une facilité déconcertante, elle ferait presque oublier ses gènes de pistarde. En ville, ça reste supportable, bien que les 230 kgs aient du mal à se faire oublier.

Normal, ma Xr ne pèse que 130 kgs et je la trouve déjà lourde.

Mais je sais que ce n’est pas dans cet environnement qu’une Superbike peut s’exprimer.

C’est dans les grandes courbes qu’elle vit, c'est là quelle fait une belle démonstration de sa stabilité à très haute vitesse.

Je bave déjà à l'idée du flash que je vais me prendre dans la gueule avant la sortie de Carcassonne-Est. J'en ai rien à braire de cette putain de limitation à 130. je laisse ça aux caisseux.

Quant aux poulets comme durait Luc : je les encules à sec et sans vaseline, sont pas prêts de me chopper ces cons.

Avec 106 chevaux et 230kgs c'est un boulet qui va passer devant la boite à image.

Et c'est vrai je passe en bas de la grande courbe à plus de 240 (plus tard j'ai récidivé avec ma Volvo mais c'est une autre histoire.)

La moto est stable un rail, un véritable rail, je tenterai bien un doigt d'honneur, mais j’ose pas lâcher le guidon, pourtant à peine je sens une légère vibration.

Je suis fou de joie, l'adrénaline est une drogue dure,

je suis excité comme une puce sur un labrador.

Pourtant moins de 500 mètres plus loin un second flash, mon sang se glace littéralement... Putain j'ai à peine aperçu l'estafette sur sur la bande d’arrêt d'urgence.

Je suis lent de nature, sauf en condition d'urgence.

Et si ça ce n'est pas une urgence... je sais pas ce que c'est.

Une estafette, ma chance pas de motards.

Ils pensent me cueillir à la tirelire, nul doute qu'ils doivent déjà sortir leur carnet à souche avec leur grand sourire de ravi de la crèche.

Mais moi je l'ai emmerde. Je roule vite moins vite que les ondes c'est évident, mais je suis un enduriste et ça je sais que ça va peut être me sauver moi et mon permis.

Une aire d’autoroute, ou plutôt une aire de service,

j'ai de la chance elle est déserte.

Je m'y engouffre je sais que j'ai un peu de temps devant moi.

Petite vitesse debout sur les cales pieds c'est pas top mais bon,

je longe le grillage, je suis sauvé.

Il y aussi un fossé profond qui court tout du long.

La moto descend et moi aussi, je la couche, moi aussi.

Tous feux éteints on attends elle me réchauffe.

j’entends le cliquetis métallique du moteur qui refroidit.

Deux fois, trois fois l'estafette passe lentement au-dessus de moi avec ses gyrophares bleus tournoyant.

J'entends même le crachotement de leurs radio et je devine qu'ils parlent de moi.

Quelque part j'éprouve une certaine fièrté d'être leur centre d'intéret.

Bon plus personne, J'ai une pince multi fonctions sous la selle de la kawa. Elle est pas génial mais ça devrait allez.

Je découpe le grillage à grosse mailles carrées et tant que j'y suis j'en découpe une large bande.

Je ne sais pas si vous avez remarqué ? mais souvent, il y a une petite route ou un chemin qui longe l'autoroute et là c'est le cas.

Maintenant l'angoisse fait place à une certaine jubilation, à une joie sauvage.

Je sens que je tiens le bon bout, la bande de grillage je la dispose comme une plaque de désensablement. Cela ne va pas être évident mais je suis prêt à tout pour avoir le plaisir de les baiser dans les grandes largeurs.
Il m'a fallut presque une heure pour sortir du bon coté du fossé, mais cela valait le coup.

En sueur, et hurlant de joie j'ai repris ma route. Dans l'aventure j'avais pourri un carénage.

Mais quel pied d'autant que comme je suis un pervers... j'ai repris l'autoroute à Lézignan-Corbière.

Et c'est vrai il y avait toute la basse court qui attendait que je sorte alors que j'y entrais.

Aucun remord, que du bonheur de les avoir fait tourner en bourriques.

Des poulets tournés en bourriques, la vache ! Que des ânes !

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