Chapitre 5. Révélations.
Nous rentrons dans une salle remplie de cages à tailles humaines, je fronce les sourcils, essayant de reconnaître ce qu'il y a à l'intérieur. On dirait que c'est rempli de personnes âgées, me dis-je en voyant une série de cheveux blancs. Avec une épouvante grandissante, je m'aperçois que c'est environ une quarantaine, voire une cinquantaine de gens comme moi. Quand ils remarquent qu'il y a des visiteurs, tels des animaux, ils se précipitent sur les barreaux au plus proche de nous, ils voient que je suis comme eux. Etrangement, pour une raison que j'ignore, lors de mon passage devant chacun d'eux, ils baissent la tête. Au fond de la salle il y a une cage vide. Mon regard se pose sur la jeune fille d'à peine cinq ans qui est enfermée à ma gauche, en voyant mon épaule elle pose sa main sur sa bouche pour ne pas crier. Nous nous arrêtons devant la dernière cage celle qui est juste à côté de celle de la petite fille. Au bord de mon champ de vision je vois un homme ouvrir la porte métallique et s'écarter, laissant le passage libre.
Après, tout va très vite. Les gens en blanc, qui jusqu'a présent s'étaient montrés méfiants, arrivent en masse derrière moi. Ils me poussent, ne manquant pas de me taper l'épaule ce qui m'arrache quelques larmes de douleur et j'étouffe un cri. Poussée une dernière fois violemment pour me faire rentrer pour de bon, je tombe en avant, instinctivement je mets mes mains en avant. Ma réception brutale et imprévue se répercute dans mes épaules et manque de me déboiter celle blessée. Ma tête me tourne et mes oreilles bourdonnent.
La fillette se penche vers moi et me tends sa coupelle d'eau. Faiblement, je bois une gorgée. Elle est fraiche : ça fait du bien. Je vais à la grille, pour lui rendre lorsque je distingue une tâche rosée dans l'eau, je regarde au plafond, rien. L'eau continue de se colorer en rouge. Je mets du temps avant de me rendre compte que c'est mon propre sang qui la colore. J'ai honte, je ne peux pas lui rendre. J'essaye de voir si elle peut parler.
— Eh, petite, est-ce que je peux mettre ton eau sur mon épaule ? Ça ne te dérange pas ?
_ Non, vas-y. me répond une voix fluette et aigüe.
_ Merci.
Je dois me mordre les lèvres pour ne pas hurler. L'eau sur ma blessure qui vient de se rouvrir est plus que fraiche, elle est glaciale. Elle est même tellement froide que je préférerais que l'on me coupe le bras plutôt que de supporter cette insoutenable douleur. Je ne veux pas mourir ici !
— Ne t'inquiète pas, ça va passer crois-moi.
Je reconnais la voix de ma voisine de cellule.
_ Il y a pire ou c'est ça qui est pire ? demandais-je d'une voix tremblante, contraire a mon habitude.
_ Tout dépend de ce qu'ils attendent de toi.
Je comprends immédiatement le sous-entendu : même si ce n'est pas pire, je ne suis pas au bout de mes peines. Je la relance :
— Au fait, c'est quoi cet endroit ?
_ Un laboratoire scientifique protégé par l'Etat. Et c'est un peu une prison pour notre espèce.
_ " Notre espèce " ? On est quoi ?
_ Ta transformation n'a pas commencé alors je ne peux rien te dire pour l'instant.
_ Tu as quel âge ?
_ 6 ans pourquoi ?
_ Tu parles comme une adulte pourtant.
_ Oui, j'ai appris plein de choses grâce aux expériences que l'on a faites sur moi.
_ Tu penses qu'ils vont m'en faire ?
_ Bien sûr, personne n'échappe à ça !
_ Que vont-ils me faire ?
_ Ça dépend je te dis. Enfin, vu ton état et le leur, soit tu vas être un légume : c'est à dire, m'explique t-elle devant mon air interrogateur, qu'ils vont te trafiquer le cerveau pour que tu deviennes débile, soit tu vas être une machine de combat et affronter les autres, qui ont, disons le, beaucoup plus d'expérience que toi. Ils s'amusent à créer des combats et vous tester.
Je reste interdite devant ce qu'elle a dit. Je change de sujet :
— Je ne suis pas venue seule, je suis venue avec un ami, il s'appelle David, ses parents et ma mère. Sais-tu où ils sont ? Que vont-ils devenir ? Les reverrais-je ?
_ Ton ami a dû être transféré dans une salle comme celle-ci mais pour les hommes. Quand à vos parents je ne sais pas. Il peut leur arriver n'importe quoi ici, on est à l'abri de rien. Ici ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent de nous. Mais ! Attends une seconde, tu as bien dit " ses " parents, les deux ?
_ Oui, enfin, pas vraiment, c'est sa belle-mère.
_ Ahh je me disais aussi que ce n'était pas normal sinon.
La porte d'entrée s'ouvre.
— Je pense que c'est pour toi, au fait quel est ton nom ?
_ Sélène et toi ?
_ Moi c'est Raven, c'est joli Sélène comme prénom !
_ Merci ! C'est un dérivé de Séléné la déesse de la Lune. Je suis née lors d'une éclipse de Lune.
_ Quoi ! s'écrie t-elle, Tu es vraiment sure ?
_ Ben, oui, pourquoi ?
_ Attends, tu n'es pas au courant de la prophétie ?
_ Non, il n'a même pas cinq jours j'ignorais qu'il existait des gens comme moi, à part David. Ma mère ne m'a jamais rien sur moi et sur mon père, alors non je ne la connais pas.
Raven prend un air un peu outré que je ne connaisse pas tout ça puis se redresse, une expression fière sur son visage enfantin avant de déclamer la prophétie, probablement apprise par coeur :
— "Lorsque la Lune enfantera,
Le portail s'ouvrira,
Le peuple persécuté, au bout de quinze années
Retrouvera sa liberté.
Elle retrouvera l'être perdu,
Et la Vérité lui sera rendue.
Sa transformation commencera,
Et l'aventure, enfin, débutera."
_ Ouah ! Et tu crois que c'est moi l'enfant de la Lune ?
_ Oui : tu n'as pas la Vérité, tu n'as pas encore fait ta transformation et en plus c'est bien connu que quelqu'un qui nait lors d'une éclipse de Lune est l'enfant de celle-ci ! Pour l'être perdu toi seule peut savoir de qui il s'agit. Donc maintenant que tu es ici il faut que tu trouves le moyen d'ouvrir un portail pour nous délivrer et tout ira bien.
_ C'est si simple que ça ? Il fallait le dire avant !
Je me concentre, j'essaye de visualiser un portail. J'appelle à toute l'imagination dont je suis capable. Je rouvre les yeux. Rien. Les gens qui sont rentrés distribuent de l'eau et de la nourriture. Elle s'est trompée, ils ne sont pas là pour moi mais pour nous tous. C'est très silencieux comme endroit. Notre conversation n'est pas passée inaperçue, surtout quand elle a déclamé la prophétie. Je réalise que celles qui peuvent me voir m'observent. Certaines sont étonnées, d'autres impressionnées et d'autres encore me regardent de haut. Au lieu de me donner à manger comme tout me monde (alors que j'ai méga faim) les deux hommes qui sont rentrés un peu plus tôt, déverrouillent ma porte et me disent de sortir. Je lance un regard effaré à mon amie (oui, maintenant que je connais ce mot je vais appeler comme ça tout ceux qui sont gentils avec moi ^^). Elle me regarde avec fierté et respect mais avec un petit air de " Je te l'avais bien dit ! ".
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