- Oliver, les dents ! crie-je à travers le couloir.

Je passe la tête à travers la porte de la chambre des filles. Ariana, Shirley et Savannah sont en pleine séance de papotage sur les garçons. Une ligne de plus à ajouter à la liste des choses que je n'ai pas pu faire durant mon adolescence...

- On mange dans dix minutes.

Elles hochent la tête en interrompant vivement leur discussion. Je ferme la porte derrière moi et ouvre celle d'en face.

- Chelsea, lâche Dwayne, s'il-te-plaît. On mange dans dix minutes.

Ces deux-là ont toujours été inséparables, un peu comme Alex et Sam. Sauf que leur relation à eux est beaucoup plus violente. Et ils sont plus jeunes. Et ils sont cousins, n'ont pas demi-frère et demi-sœur.

- Alors, comment va-t-il ? je demande à Bryan qui vient de sortir de la chambre de son petit frère.

Oliver et Anderson, ses colocataires habituels, ont déménagé dans ma chambre en attendant que Dylan se rétablisse.

- Ça va.

Je hoche la tête, soulagée que ça ne soit pas trop grave. Je me rends dans la chambre des petites. Mes princesses, comme je les appelle. En me voyant, Ivy se met à gazouiller dans son berceau. Je la prends dans mes bras et lui colle un bisou sur la joue avant de la reposer dans son petit lit. Elle est si mignonnes avec ses petites boucles brillantes.

Je me penche vers April et l'embrasse sur le front. Du haut de ses quatre ans, elle me pose une des questions que j'ai toujours eu peur d'entendre.

- Dis Ky, pourquoi ma maman, elle est jamais là ?

Je lui sers la seule réponse que je trouve honnête.

- Elle est très occupée, c'est tout.

Ses petits yeux verts s'embuent.

- Est-ce qu'elle m'aime ?

Une mauvaise réponse, qui ne serait pas à la hauteur de ses éspérances, pourrait la détruire. Je la serre très fort dans mes bras.

- Bien sûr, ma princesse. Elle t'aime comme elle aime Dwayne, Anderson et Ivy. Vous êtes ses enfants adorés.

Je vois bien qu'elle essaie de retenir ses larmes. Je lui chuchote à l'oreille :

- Est-ce que tu veux descendre un peu avec les grands ?

Son visage s'illumine d'un coup alors que je chasse une larme sur sa joue. Je lui prends la main. En passant devant ma chambre, je me rends compte que les garçons sont trop excités de se retouver tous les deux pour penser à dormir. Comme à chaque fois. Je leur mets exeptionellement un film et descends les escaliers avec April.

Dans la salle à manger, j'installe ma nièce sur une chaise. Les filles sont déjà attablées et j'entends Bryan descendre les escaliers.

- Je vais monter à manger à Dylan. Commencez sans moi.

Je choisis un plateau que je remplis avec une assiette, des couverts et un verre. En montant les escaliers, j'entends la voix de Bryan demander :

- Mais qu'est-ce qu'elle fait là, la petite princesse.

Le rire d'April résonne. Finalement, je ne suis pas la seule à l'appeler comme ça.

Dans sa chambre, Dylan fixe le mur, somnolant à moitié.

- Salut.

Il ne me regarde pas. Je m'assois sur le lit à côté. Et lui tends le plateau. Il le repousse en grognant. Ah, ce n'est pas la maladie à laquelle je pensais.

Je passe ma main sur son front, attendant qu'il se dévoile de lui-même. Au bout de cinq minutes, il soupire.

- Pourquoi elle fait ça ?

Et immédiatement, je comprends de quoi il parle. Sa mère préfère enchainer les maris et les grossesses que de s'occuper des enfants qu'elle a déjà. À vrai dire toutes mes sœurs le font. Pourtant, si elles apprenaient à les connaître, elles verraient que leurs enfants sont de magnifiques personnes. Les plus belles qu'il m'ait été donné de voir. Et je ne laisserais personne leur faire croire qu'ils ne sont pas dignes d'être leurs enfants.