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Terry Torben

Terry Torben

À l’époque, Jean-Edouard De Nonce était un imminent diplomate, doué à un point tel qu’on n’aurait trouvé personne en ce vaste pays pour lui faire de l’ombre. Il faisait invariablement partie de toutes les tables de négociations, où il marchandait habilement les plus grands virages de l’histoire. Notre bonne vieille civilisation occidentale lui doit certainement beaucoup, bien plus que ne pourront jamais soupçonner les petites gens qui la peuplent, or Jean-Edouard connaissait parfaitement bien sa position, cet avantage certain d’œuvrer dans l’ombre. Il savait, avec une certitude inébranlable, que là se trouvait le véritable pouvoir exercé entre êtres humains.
Je me souviens qu’une fois, lors d’une soirée officielle arrosée avec une modération de bon aloi, un type m'étant totalement inconnu s’était bêtement mis en tête de le prendre à partie, c’est vrai quoi monsieur Jean-Edouard, il faut bien appeler un chat un chat, c’est tout de même un fichu métier de faux-cul que vous exercez, ne vous en déplaise ! Allez, nous sommes entre nous, entre amis, soyez un peu honnête : votre langue, vous l’avez taillée dans du bois brut n’est-ce pas ? Je sens dans votre haleine comme un petit arrière goût de… de sapin il me semble, non ? Me trompé-je… ?
Toutes les cravates présentes dans la salle se tournèrent aussitôt vers l’attaqué. Après un petit brouhaha de désapprobation, un silence de mort s’installa. On n’entendait plus que les bulles de champagne éclater en toute discrétion dans les verres à moitié pleins. Jean-Edouard s’était tout d’abord éclairci la voix puis, conservant un calme olympien, posa son verre à moitié vide sur la petite table en verre fumé lui faisant face. Il se leva, mesurant le moindre de ses gestes, à la manière de quelqu’un qui se savait observé puis, entrant subitement dans une colère froide, il entreprit séance tenante un puissant plaidoyer où il fut question d’honneur, de patrie, d’intérêts collectifs et d’Histoire, avec une grande "H" si on lui permettait ce joli mot, il vous en remerciait bien parce toute la magie de sa mission se cachait effectivement dans cette modeste petite lettre, par certain coté bien stupéfiante il fallait bien l'admettre. Chacun, les yeux ébahis, fut bien forcé de reconnaître les immenses talents d’orateur de cet homme empli de mystère fougueux, qui aurait sans aucun doute tout aussi bien réussi une carrière d’avocat si sa confrérie, pour d’obscures raisons, n’avait pas voulu de lui. L’odieux agresseur n’eut plus qu’à s’incliner, voire même à présenter quelques plates excuses, et on n’entendit plus parler de lui jusqu’à la fin de la soirée, qui traîna enfin tranquillement jusqu’au petit milieu de la nuit.
Cette maitrise parfaite de la langue, il la devait à ses vingt cinq ans de pratique, tout aussi acharnée qu’exemplaire. Aujourd’hui parfaitement à l’aise dans sa mission, unanimement reconnu par l’ensemble de ses confrères, il était intimement persuadé de ne plus risquer grand-chose. Sa vie était sur des rails : embarqué dans un train forgé de légendes, il filait tranquillement vers un avenir de plus en plus certain et finalement, si ce n’était une petite crise mondiale de-ci de-là, tout allait bien dans le meilleur des mondes, qu’il tentait encore de parfaire, ma fois, toujours du mieux qu’il pouvait.
Enfin… Je devrais plutôt dire: tout allait très bien… Jusqu’à ce que…
Car depuis quelque temps déjà, Jean-Edouard avait remarqué une petite boule qui poussait sur le côté gauche de sa gorge. Au départ, il s’agissait d’une légère grosseur, aussi faible qu’une piqûre de moustique, et cela ne l’inquiéta pas plus que ça. C’était indolore, presque invisible; il s’agissait donc d’un petit rien, qu’il suffirait de laisser passer tout seul. De toute manière l’histoire tombait mal, il traversait tête baissée une très forte période d’activité, une de ces turbulences qui demande une attention de chaque instant. À vrai dire les Africains lui donnaient un peu de fil à retordre, à cette époque il tentait tant bien que mal de ménager le Hutu comme le Tutsi, bien que ces derniers, il fallait bien avouer, commençaient déjà à fondre comme neige au soleil sous l’obstination génocidaire des premiers, et ce dans une indifférence quasi diplomatique. Néanmoins à l’époque l’affaire restait plutôt sérieuse, du coup il ne disposait pas du temps nécessaire à soigner de vulgaires petits bobos. Il restait certes vigilant, dans une juste mesure, mais à vrai dire sans excès. Son métier, par ailleurs très ouvert, ne supporterait pas, par contre, la moindre manifestation hypocondriaque, et Jean-Edouard comprenait parfaitement cela : comment confier le destin du monde entre les mains de quelqu’un qui se sentirait mourir à chaque seconde !
Du coup l’enflure livrée à elle-même s’étendit jours après jours, jusqu’à atteindre bientôt la taille d’un œuf de caille. Jean-Edouard se regarda un beau matin dans sa glace et fut… disons un peu contrarié. Cependant, se reprenant rapidement, il constata que l’affaire ne suppurait pas le moins du monde même si, dans un même temps, elle prenait une vilaine couleur un peu brunâtre. Tout cela ne serait pas plus inquiétant, si ce n’était que cette satanée excroissance devenait légèrement plus sensible qu’aux premiers jours : parfois, Jean-Edouard sentait jaillir une douleur profonde, remontant brusquement jusqu’aux vertèbres cervicales, privant notre diplomate de tout mouvement, tête renversée, durant de nombreuses minutes. Or la courbure n’est pas une posture à proprement dire idéale pour défendre les intérêts de notre monde, et en cet instant c’était ce fait précis, bien plus que les retombées médicales, qui tracassait le plus Jean-Edouard. Difficile d'affirmer si en cet instant, lorsqu’il tourna le dos à cet odieux miroir qui réfléchissait si mal, on pouvait déjà parler de négligence, ou tout au moins d’une sous-estimation malheureuse concernant un danger potentiel, mais le fait était que Jean-Edouard, aussitôt éloigné de son reflet, décida d’attendre encore un peu pour consulter. Son emploi du temps prochain devrait lui laisser plus d’amplitude pour s’occuper sérieusement de cette fâcheuse question. Il s’agissait de quoi… Disons d’un petit mois. Ou à peine plus… En tout cas certainement moins d’un semestre, si tous ces africains à tendance sauvage se décidaient enfin à manger du même pain à la même table, ce qui n’était, à cette époque, pas encore gagné…

Tout cela partait d’une bonne intention. Faire passer ses obligations professionnelles avant sa propre santé était certes tout à son honneur… Cependant, le temps passant et la protubérance progressant, Jean-Edouard fut bien obligé de reconnaître que cela ne passerait pas tout seul. Vint alors un temps où l’inquiétude s’immisça sournoisement dans son petit quotidien, gênant considérablement le bon déroulement de son travail. Il devint très difficile de conjuguer paix dans le monde et paix de l’esprit. Si bien qu’un soir, de retour d’une journée particulièrement difficile – la troisième guerre Balkanique faisait rage et commençait à tirailler l’Europe en tous sens -, il ouvrit alors son agenda bien avant les six mois escomptés, passablement résigné. Il accepta à contre cœur le rendez-vous que lui fixa son docteur, qu’il coinça difficilement entre un déjeuner de négociation un peu séré à Dayton, dans l’Ohio, USA, incontournable bien sûr, et une entrevue avec Madame Lucette Quelquechose, ministre déléguée du gouvernement Balladur avait-il cru comprendre, sensée œuvrer pour les droits de l’Homme et pour l’action humanitaire. Il ne savait pas trop pourquoi mais celle-ci, une fois confortablement installée dans son fauteuil, avait subitement émis l’ardent désir de partager avec lui une bonne bouteille de vin Français, ainsi que quelques idées autour de la construction de l’idéal humain. Or Jean-Edouard, qui avait horreur de servir au mieux de carte de visite, au pire de bouche-trou, jugea que Madame, pour avoir de telles idées saugrenues, ne devait pas être du genre très, très débordée. Du coup, au cas où son affaire prendrait mauvaise tournure bien entendu, il pourrait très certainement repousser cette entrevue sans que cela pose réel problème. Avec la médecine, comme on a toujours coutume de le dire, mieux valait prendre quelques précautions...
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Terry Torben
L'avenir est vivant. Il possède une âme bien plus vaste que la notre, qui fait son ouvrage dans des étendues dépassant notre entendement. Nous allons toujours vers lui, c'est notre seul chemin. Parfois - très rarement - un peu comme s'il s'adressait à des enfants turbulents, il envoie quelques signes, des clins d’œil, qui soumettent à notre raisonnement la marque, peut-être, d'une intelligence de loin supérieure à la notre. Cette histoire montre aussi que l'avenir possède un certain penchant à l'ironie, totalement incompréhensible au commun des mortels. Nous ne verrons de lui qu'un qu'un trait de cruauté. Une cruauté épouvantable qu'on appellera "Destin".
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Terry Torben
[Sculpture : Jón Gunnar Árnason, "Sólfar"; "Le Voyageur du Soleil", Reykjavik]

Une société, ce n'est qu'un rassemblement de personnes qui partagent une même langue et une même culture. Généralement, ce rassemblement se réunit à intervalles réguliers pour choisir parmi eux un représentant, sensé être l'incarnation d'une idéologie partagée par les plus nombreux.

Un Capitaine rassurant en quelque sorte, capable de maîtriser à bout de bras n'importe quelle galère...
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Terry Torben
[Couverture : Sculpture de Gavin Worth - http://www.gavinworth.com/ ]

La vie n'est qu'un rêve obsessionnel. Quant à la nuit... La nuit, elle, peut parfois être porteuse d'éveil...
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Terry Torben

- Mais enfin John, c’est n’importe quoi ! Sort un instant de ta logique, merde ! Regarde où ça te mène ! Parce que c’est bien joli ce que tu dis, elle me manque, tout ça, je peux pas vivre sans elle… Ok, c’est bien ! Jusque-là pas de problème mais regarde-toi ! Regarde un peu ce que tu deviens ! Ecoute : tu pourrais rester encore avachi dans ton fauteuil pendant un siècle, à ingurgiter bière sur bière et à chougner comme un bébé sur ton sort, tu peux me croire, c’est pas comme ça que tu la ramèneras à la maison. Tu peux continuer à tourner les choses mille fois en rond dans ta fichue cervelle mon bonhomme, tes petites rêveries, ça ne te mènera nulle part…
- Ou elle revient… ou je meurs, je te l’ai déjà dit ! Ecoute : j’ai bien compris ce que tu veux me faire entendre mais voilà, je l’ai dans la peau, c’est comme ça ! Je… je suis incapable de faire quoi que ce soit sans elle, merde ! Depuis qu’elle est partie, chaque inspiration fait entrer de l’acide dans mes veines, chaque expiration me vide de mon sang … Ecoute Jean : laisse-moi crever maintenant. Sérieusement : laisse tomber… Et merci pour tes conseils.
- Et après, hein ? Parce que, même si tu n’es plus là, il y aura un après, au cas où tu ne le saurais pas ! Je vais lui dire quoi, moi, à Léa ? Ben écoute voilà : John est mort… sans se battre… Tu veux vraiment qu’elle ait cette image de toi ?... Ecoute: les choses sont ne réellement perdues qu’à l’instant où on renonce à les chercher… Et toi, tu n’es pas du genre à renoncer, du moins je ne te connais pas comme ça, je me trompe ? Toi, tu es un guerrier. Un gagnant.
- Donc, si je t’écoute, tu penses sérieusement que si je me lève maintenant et que je me mets à bouger dans tous les sens, ça va la faire revenir ? Comme ça ? Comme par… magie ?… Franchement je trouve ça un peu étrange comme raisonnement. Je n’y crois pas trop, pas son genre à la miss… Mais bon… après tout pourquoi pas… Tu as raison au moins sur un point : perdu pour perdu, hein… Au moins je pourrais dire que j’aurais essayé !
Or les choses se passent rarement tel qu’on les imagine. Je m’explique : après deux minutes de réflexion, la seule action qui m’ait semblé pertinente fut d’envoyer à Léa ce simple Short Message System : I miss you. Bon début, un peu calculé, je l’avoue. Parce qu’en secret j'espérai qu'elle comprenne que la barrière de la langue matérialisait en fait le mur de pudeur qui était en moi, et que je franchissais pour elle. Juste pour elle. Ce message catapulté dans les remous du réseau, il n’y avait que Léa pour être capable de le saisir. Et de le déchiffrer. Et en tirer tout ce qu’il ne disait pas. Elle saurait lire le roman écrit en filigrane derrière ces trois petits mots tout simples : I miss you. Du moins, c’est ce que je croyais parce que, pour tout dire, après cet acte tout à fait héroïque j’ai attendu sa réaction, relativement sûr de moi je l’avoue. J’ai patienté plusieurs minutes - peut-être était-elle occupée -, qui se transformèrent bien vite en heures – voire même très, très, très occupée -, puis en jours – où même partie en voyage sur la Lune, sur Mars, ou en direction de la galaxie d’Andromède, allez savoir - pour finir en une longue éternité silencieuse, habitée d’elle qui se fichait complétement de moi… Je me vidais de sa mémoire sans jamais voir de fin, comme une bête d’abattoir qui se viderait de son sang… Et moi, torturé, complétement anéanti, j’étais de nouveau vautré dans mon canapé, ingurgitant bières sur bières, abasourdi par la violence de son silence. Mais, poussé par un dernier élan de fierté, je me ressaisis bientôt de mon smartphone, cette fois bien décidé à faire plier le destin.
Ni une ni deux, j’abandonnais toute pudeur et autres messages cachés. Je décidais de la prendre d'une manière plus directe avant que l’alcool ne m’assomme complétement, ce serait mon dernier geste, promis, après je me laisserais définitivement sombrer dans son oubli. Nouveau SMS donc, très vite converti en Media Messaging Service par excès de caractère, ça ne s’inventait pas. Il fallait dire que je m’étais un peu lâché, Aïe, miss! J'ai mal à toi, à ton sourire, à ces attentes où tu n’es plus! Aïe miss! Je souffre d'être moi, juste moi, dans cette faiblesse qui se nourrit de ton absence. Aïe miss... Mais où est donc… cet amour… qui fait de nous… une fois passé… ces êtres… si douloureusement… séparés ?, mais ce furent, malgré tout, les derniers mots parlant de nous, Léa et John, et qui se sont certainement perdus, dilués dans l’infini de la création. Quelques malheureux octets désincarnés, sans âme ni conscience, errant, vidés de tout sens, dans l’océan d’information d’un Big Data défait du moindre sentiment. Ce qui devait être un acte de bravoure destiné à forcer le destin, se finissait pour moi en vrai cauchemar.

Car l'amour doit être ainsi, certainement : Cruel comme une phrase insaisissable, une longue phrase gigogne dans laquelle s’encapsulent tout au long des années des incompris, des quiproquos et autres mystères de l’autre, comme autant de pelures de chagrin. Jusqu’à un sale matin où, se réveillant dans un lit définitivement vidé de la moitié de sa vie, on se demande soudain, juste un peu trop tard : Mais où est donc… ? Tout compte fait chercher l’amour, c’est un peu chercher Ornicar. Il s’agit de la même quête absurde d’une chose impossible, d’une réponse illusoire à une question saugrenue, posée en rigolant à un enfant qui ne sait encore rien de la vie.
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Terry Torben
Inspiré (très librement, c'est à dire avec humour) par un fait totalement improbable, concernant une jeune fille de 17 ans, Alexandra Allen, habitant dans l'Utah...
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Terry Torben
(Base photo de couverture : Cassandra Warner et Jeremy Floto. http://www.flotowarner.com/untitled-gallery)

Deux minutes, c'est juste le temps qu'il vous faudra pour lire cette petite allégorie autour du temps qui passe. Une de plus, diriez vous...
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Défi
Terry Torben
Proposition de texte répondant au défi "Grève du point"!
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Terry Torben
[Sculpture de Yann Jost http://www.france-art-realisation.com/artists_createurs/jost_sculptures_pierre/jost_sculptures_pierre.php ] Première participation a un défi... Je me lance... Et pour cette première, j'ai donc choisi "La rêgle de 4", proposée par @An'Maï Lej. Le sujet: "un trou noir est un corps condensé dont le champ gravitationnel est si intense qu'il empêche toute matière et tout rayonnement de s'échapper". Ça, c'est ce que dit le Petit Larousse. Il s’agira ici d'une variation... un peu décalée autour de ce thème...
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Terry Torben
L'allitération a littéralement laminé ma Muse...
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Terry Torben
En réponse au défit : "Caresse-moi le cerveau."

Texte écrit depuis quelques temps déjà, qui attendait sagement au fond d'un tiroir... Lorsque j'ai lu dans la présentation du défi : la conscience est-elle un fardeau?... comment dire... je me suis dit que c'était peut-être le moment de le sortir.

Je tiens à attirer l'attention sur la nature volontairement très sombre de ce texte, écrit à la première personne. Certains passages sont un peu crus (bien que j’ai arrondi certains angles à la relecture), et j'ai conscience que cela peut faire grincer certains lecteurs(trices) pour qui la lecture reste (et à très juste titre!) une détente. Non : vous ne trouverez pas ici une caresse, c'est certain – l’auteur du défi me pardonne ! –, et je tiens ici à justifier ce choix : lorsque j'ai écrit ce qui suit, certains événements venaient de se produire, qui m'ont fait me questionner en profondeur sur la nature même de l'âme humaine…
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Terry Torben
[Pas sur d'avoir tout bien compris mais bon : le sujet m'interpelle, alors je me lance...]

Beaucoup de légendes entourent les chats. Ils auraient, entre autre un rapport étrange à la mort...
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