GoLrine
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Défi
Petit défi qui devient grand.
Un jour, peut-être, tu liras tout ceci.
En attendant, je pose sur le clavier mes plus douces pensées concernant la folle aventure qu'est la parentalité.
Un jour, peut-être, tu liras tout ceci.
En attendant, je pose sur le clavier mes plus douces pensées concernant la folle aventure qu'est la parentalité.
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Comment t'avouer que depuis ton arrivée sur Scribay, je me sens limitée. Idiot, n'est-ce pas ? Probable. Sept mois de jardin secret. Puis, un jour, j'ai ouvert ma carapace et me suis emballée :
oui maman, j'écris.
Bienveillante, fière, te voilà possédée d'une envie : me lire. Fille aimante et ne désirant que ton bonheur, j'offre alors cette si belle parenthèse de ma vie après quelques insistances. Qu'est-ce que je risque au juste ? Ne suis-je pas de plus en plus fière de mes écrits ? Bien sûr. N'ai-je pas envie de dévoiler mon loisir à vous, mon entourage ? Je le croyais. Seulement, je me suis trompée. Comment l'avoir réalisé ? Simple.
Un texte. Une possible participation à un concours et une volonté de ta part, m'aider, m'accompagner dans toute ta bienveillance et ta fierté de maman. Mais ici, maman, ici, j'ai envie d'avancer seule. Pas prête encore à révéler toutes les failles parfois si bien dissimulées dans mes écrits. Pourtant, j'avais pensé être claire :
non maman, merci mais ce texte restera en l'état. J'en suis fière et je ne veux pas qu'on le travaille ensemble.
Peut-être est-ce de ma faute, peut-être n'étais-je pas suffisamment déterminée. Ici maman, ici, j'ai envie de tout écrire. Puis-je le faire ? Me jugeras-tu ? Jamais et je le sais, mais maman, oh maman, moi en revanche je ne suis pas prête à autant me dévoiler. Un jour peut-être. Dans une semaine, dans un mois, jamais ? Je ne sais pas. Mais sache maman qu'au moment où je souhaiterais avancer à tes côtés, je glisserais mes doigts dans les tiens et tu sauras. Tu sauras que je suis prête à tout offrir au plus précieux des soutiens. Toi, maman. Vous tous. Mais là, je réalise que je ne suis pas encore prête. Votre regard est si riche, votre amour est si puissant, mais je veux que ce talent m'appartienne à moi et moi seule, le plus longtemps possible. Unique contrôle ? Moi.
Alors maman, s'il te plaît, accepte de lâcher-prise. Accepte de ne pas contrôler pour une fois. Te supplier ? Non. T'implorer ? Non plus. En appeler à ta bienveillance et à ta fierté de maman. Oui, ta fille écrit. Bien sûr que sa plume est la meilleure, puisque c'est celle de ta fille, mais ici, désormais, je ne peux plus tout écrire. Alors comment faire ? Quel stratagème trouver pour ne pas te vexer ? Car non maman, je ne supporterais pas de te blesser, je veux seulement vivre ma passion et coucher sur le clavier mes craintes, mes angoisses, mes démons et mes failles sans me sentir oppresser par des annotations que je sais bienveillantes. Une idée. Une simple idée. Un autre compte. Une autre riGoLaune.
Golrine.
Tout recommencer. Ici, mon souhait ? Etre seule, seule avec des inconnus aux plumes toutes plus douées les unes que les autres. Plumes invisibles qui lisent sans analyse inconsciente. Et si tu lis maman, saches que je t'aime. Je ne le dis jamais, je ne l'écris que trop rarement, tu le sais, une pudeur familiale. Un héritage de papa ? Très probable. Mais ici maman, avec tout ce que je place ça et là au gré de mes oeuvres, cette pudeur est exacerbée. Il me faut un exutoire, un moyen de tout libérer, de vider et d'analyser aussi. Aurais-je un jour le courage de te faire lire ce texte ? Je ne pense pas. La raison ? J'ai si peur maman, si peur de t'offenser, parce que je t'aime si fort maman, si fort.
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Défi
Défi entremélé à un autre. Sur un piano (4ème édition).
Musique choisie : Yann Tiersen. Naval. https://www.youtube.com/watch?v=m4kRciR7Eo4&feature=youtu.be
Ce sujet m'a fait trembler à la minute où mes yeux se sont posés sur lui. Comme mon cœur a tremblé le jour où il est revenu, les mains sur le crâne, le visage déconfit, le regard éteint.
— Il est mort, a-t-il alors sangloté en plongeant dans mes bras tremblants.
Son père, mort ? Enfin...
Est-il sûr ? Est-il encore chaud ? Y a-t-il un espoir ?
— Va voir, et tu comprendras.
Ni une, ni deux, me voilà sur le trottoir, la maison voisine, puis, sa maison, la maison de mon beau-père. Deux voisins se trouvent sur le portillon, eux aussi ont la mine des mauvais jours. À l'intérieur, le silence. Glaçant, terrible, morbide. Jamais la télé n'est éteinte dans cette maison, toujours le chauffage inonde l'air de ses effluves les plus puissantes. Ici, le silence et le froid. La mort avant même de l'apercevoir.
Couloir. Salon. Table basse. Pieds qui dépassent, nus, blancs. Sur le sol. J'approche. Une main. Son dos.
—Philippe...
Rien. Froid. Glacé. Dur. Rigide. Mort.
Dieu qu'il est maigre, il avait raison, son fils, mon amoureux, avait raison. L'ombre de lui-même. Voilà ce que cet homme était devenu. Voilà ce que la dépression et l'alcool avaient fait de lui. Un spectre avant l'heure. Un poids pour le seul qui y allait encore. Une angoisse ? Ça. Le découvrir. Le retrouver. Être fracassé contre cette mort misérable.
— SAMU bonjour.
— Bonjour, je vous appelle car je ne sais pas du tout qui appeler. Mon beau-père est mort.
— Vous êtes sûre madame ? Pouvez-vous vérifier son pouls, sa respiration. L'avez-vous appelé ? Répond-il ?
— Il est glacé, il est dur, il est face contre terre, il est mort. C'est certain.
— Madame, j'ai besoin que vous me disiez s'il n'y a vraiment plus d'activité cardiaque ni respiratoire.
— N'avez-vous pas compris mes propos ? Vous n'êtes pas en train de me demander de le retourner pour faire face à son visage ? Ne me demandez pas cela.
— Avez-vous accès à sa nuque ? Si oui, pressez deux doigts.
Alors ? Alors j'ai menti. De quoi avais-je peur ? D'un gasp. D'un soubresaut de la mort. D'un corps en acidose telle que le cerveau envoie des décharges pour tenter l'impossible. Oui, la mort, une sage-femme la connaît. Hors de question de subir celle de mon beau-père tandis que l'homme de ma vie s'effondre devant l'entrée de sa maison.
— Rien. Il n'y a rien.
— Et est-il rigide ? Retournez-le madame.
— Non. Je ne le retournerai pas.
— Alors essayez de plier une jambe.
Pantalon tiré, jambe en l'air. Dix petits centimètres. Rien de plus.
— Madame, les pompiers sont en chemin.
Camion tonitruant. Pourquoi se précipiter ? Il est bel et bien mort. N'êtes-vous pas en train d'offrir un espoir inutile et cruel à l'homme qui pleure devant la porte ?
Thermomètre. Front. 22 degrés.
— Je suis désolée, Madame, votre beau-père est décédé.
Soulagement. Suis-je horrible d'être soulagée qu'il soit parti ? Oui, je suis une personne insensible et atroce, à la carapace cuirassée. Lui, mon homme, ma moitié, s'était effondré. Ai-je seulement pleuré vous demandez-vous peut-être. Bien sûr que j'ai pleuré. Pleuré de déception. Cet homme avait tout gâché. Quelle chance d'être en vie, d'être en bonne santé. Pourquoi tout ruiner ? Pour ça ? Du Ricard ? Du rosé ? Et une solitude étouffante ? Qu'a-t-il gagné ?
— Si jeune... annonce le médecin de garde.
Sur le sol. Baignant dans son vomi. Vision déchirante d'une fin de vie impuissante. Certificat rempli à quelques mètres de lui. Oui, si jeune... Comment avoir glissé ainsi ? Au point de ne plus manger. De ne plus vivre. De boire, de vomir, de fumer et de dormir ? Quelle vie était-ce ? A-t-il seulement pensé à son fils qui subissait de plein fouet la détresse de cet être en souffrance ? Oui, une part de moi lui en veut.
— Lorsque vous le retournerez, j'aimerais voir son visage, s'il n'est pas trop abimé.
— Vous êtes sûre, Madame ?
Les pompes funèbres semblent étonnées.
— Oui. Je veux voir s'il a souffert.
Pourvu qu'il n'ait pas souffert. Les minutes sont longues. Puis, la bache blanche est soulevée. Il s'est éteint, à bout de forces. Sur son visage émacié, on observe presque le soupir de la mort, dernier souffle imprimé à jamais sur son corps et sur mes paupières. Notre dernier partage.
— Philippe... Qu'avez-vous fait... je me surprends à dire.
Notre dernier échange.
Philippe, vous avez fait du tort aux vôtres et vous êtes retrouvé seul. Votre vie est la conséquence de vos choix. Mais lui, lui il est resté, envers et contre tout. Contre les mensonges, contre la honte, contre le dégoût, peut-être. Il est resté. Il est resté car il vous aime si fort. Vous n'étiez plus un papa pour lui. Vous êtiez un ami, un ainé qu'il fallait respecter. Des heures passées sur la route pour vous rendre visite à la clinique. Des allers-retours aux urgences lorsque, pris d'angoisse, vous appeliez les pompiers ou nous suppliez de le faire pour vous.
Il vous a offert la meilleure part de lui. Sa générosité. Son altruisme. Son absence infinie de jugement. L'avez-vous seulement remercié ? Vous êtes vous seulement excusé ? Jamais. L'appeler quand vous aviez besoin, mais ne pas l'appeler pour son anniversaire. Lui demander de venir pour acheter de l'alcool mais ne jamais l'inviter à manger. Il vous a tout donné. Vous lui avez tout pris.
Alors oui, Philippe, je vous prie d'accepter ma colère qui me semble légitime.
Quand il dort dans le canapé, vous n'imaginez pas comme j'ai peur qu'il devienne comme vous, incapable de dormir dans une chambre. Nécessitant toujours le bruit sonore d'une télé pour ne pas se confronter au silence d'une vie de solitude. L'impact que vous avez eu sur sa vie, est pour l'instant si noir, si morbide. Votre mort, sa perte, l'a brisé. Il vous a perdu et pour lui, il a échoué. Echoué à vous sauver...
S'il y a quelque chose après la mort, j'espère que vous pouvez lire ces mots, que vous pouvez voir sa détresse. Sachez, Philippe, qu'à l'inverse de vous, il ne sera jamais seul. Où étiez-vous à son âge ? Que faisiez-vous ? Vous buviez déjà. Vous terrorisiez sa mère. Vous effrayiez vos enfants par vos coups de sang. Enfin, vos enfants... Votre aîné. Car lui, Philippe, lui n'a jamais eu peur de vous. Peut-être est-ce pour ça, d'ailleurs qu'il est resté. Alors non, Philippe, je ne le laisserai pas devenir vous. Je vais lui laisser le temps de digérer sa tristesse, d'appréhender sa dépression, de contrôler sa peur, puis, quand le temps sera venu, on se battra, on tapera du poing sur la table et on se reprendra. Ensemble. Il n'est pas seul, Philippe. Il n'est pas comme vous.
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Comment je lui avoue qu'il n'est pas quelqu'un pour elle ? Est-ce normal qu'il la rabaisse pour devenir important ? Est-ce normal qu'elle justifie ses bassesses par de l'humour ? Lui dire ? Un risque, la perdre. Non. Alors j'observe, j'analyse tout. Cet arbre de vie tatoué sur le bras pourrait-il s'abattre un jour sur son corps ? Le symbole est trop grand pour qu'il en soit réduit à cette ignominie. Vie et Création de toute chose en découlent. Force, puissance, également. Pourquoi cette encre incrustée terrasserait celle qui l'aime tant ?
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Un défi indisponible m'a tenté courant avril. Que pourrais-je bien écrire au moi de 59 ans ? Oui, vingt neuf et trente égal cinquante neuf. En écrivant ces quelques mots je souris déjà. Les maths ne sont définitvement pas ton fort, n'est-ce pas ? Mathieu est-il toujours ta calculatrice vivante ? L'homme qui compte plus vite que son ombre ? Au moment où je t'écris, il est en face de moi, sur le canapé et joue en ligne. Dommage que cette lettre demeure sans réponse, j'aurais tellement aimé que tu le décrives vieux ? Pitié, fais qu'il ne soit pas bedonnant ! Je commence donc cette lettre par lui ? Ça t'étonne que je ne me questionne pas sur notre avenir ? Bien sûr que non. Toi comme moi on sait que lui, c'est pour la vie. Tes défauts l'agacent mais il les aime quoiqu'il en dise.
Tu as donc 59 ans, papi et mamie ne sont plus de ce monde. J'espère qu'ils sont partis en paix et de la plus belle des morts. Ne sois pas triste en pensant à eux. Ils t'ont aimée et ont marqué ta vie à jamais. Quelle chance d'avoir profité de leur amour aussi longtemps ! Maman et papa ont respectivement 83 et 84 ans… Bon, peut-être ne sont-ils plus là, eux aussi. As-tu réussi à t'ouvrir davantage ? À oser t'affirmer sur les choses qui te déplaisent parfois chez maman ? À leur dire enfin que tu les aimes. Lolo, ils ne sont pas éternels. Ne le regretterais-tu pas, s'ils s'éteignaient avant de leur offrir toute la beauté des sentiments que tu éprouves à leur égard ? Maintenant, j'arrête de parler de tout ça, je vais réussir à me miner le moral au présent comme au futur. C'est dingue ! Ta soeur ? Qu'est-elle devenue ? Difficile de se projeter avec elle, mais tu lui as toujours fait confiance. Tu étais parfois la seule. T'a-t-elle remerciée d'avoir été si souvent là ? Tu ne le faisais pas pour ça, bien entendu...
Pratiques-tu toujours régulièrement le Yoga ? Tu sais qu'en vieillissant, les petits bobos de jeunesse deviennent de véritables emmerdes, alors ton dos en vrac et ton épaule déglinguée ne demandent que cela, que tu prennes soin d'eux. Dis-moi que tu continues de bricoler dehors dans tes parterres ? Comme je les imagine fleuris... Pleins de vie, de couleurs, d'odeurs et de textures !
Es-tu devenue maman ? Tu sais très bien dans quel état d'esprit je suis en ce début d'année 2020. Tu sais les doutes qui m'habitent, qui t'habitaient. Curieuse de mon futur, je n'ai cependant pas envie de connaître cette finalité. Pourquoi ? Parce que moi même je n'imagine rien à cet instant.
Comment va Kikito ? Il a quoi maintenant, quand tu convertis l'âge d'un chat en âge humain, 38 ans ? Comment ça tu lèves les yeux au ciel ? Un chat ça a 9 vies, non ? Oh, ça suffit hein, tu sais très bien qu'intérieurement cet humour désastreux te fait toujours sourire, alors ne joue pas ce rôle de pince sans rire qui te va si mal.
59 ans. Le temps du bilan. J'ai été plutôt sûre de moi en t'écrivant dans 30 ans, peut-être que demain je suis morte… qui sait ? Personne justement. Personne ne sait.
Sois heureuse Lolo. Sans fioritures, sans chichis, crée toi des souvenirs doux et joyeux contrebalançant ceux qui alourdissent ton coeur. Continue d'être entourées de gens que tu aimes et qui savent être là pour toi. C'est important, ne l'oublie jamais ! Je me suis prise au jeu de ce défi, je t'ai écrit le sourire aux lèvres du début à la fin. Souviens-toi, quand tu as démarré l'écriture au début du confinement du COVID-19, tu voulais arrêter de rêver à tout va, ton cerveau était en ébullition. Tu parlais tout haut quand tu étais seule et Kikito était une excellente diversion pour les personnes qui ne comprenaient pas. Continue, Lolo. Continue d'écrire. Ça ne demande rien, pas d'échauffement, pas d'épaule solide, seulement du temps…
Je me laisse donc rêver à te voir lire cette lettre sur ton canapé, baignée par le soleil de la fin de journée. Te souvenais-tu l'avoir rédigée ? Je sais que tu vieilliras dans la maison dans laquelle tu t'es installée depuis maintenant 32 ans… 32 ans bordel ! Ne prends pas la peine de me répondre, le passé est passé, écris-toi à nouveau, vois aussi loin, ou sois plus raisonnable, peu importe, mais projette toi. Ça n'a jamais été ton truc, peut-être que ça l'est devenu ?
Une dernière chose, tu es aimée Lolo, par beaucoup et par toi-même !
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Défi
Écrire. Coucher sur papier son imagination, ses craintes, ses espoirs, ses joies, ses peines. Belle palette de couleurs n'est-ce pas ? La vie, voilà ce que c'est. La vie dans ce qu'elle a de plus beau, de plus horrible, de plus terrifiant. Dans toute cette folie, qui suis-je ? Un astronaute lové dans sa combinaison. Carapace lui offrant le minimum vital : température contrôlée, oxygène régulé, vie millimétrée. Ces ballons, ces couleurs luminescentes invitent à l'évasion, la rêverie, la libération, aussi. Des turbulences malmènent ce cosmonaute, soulevé de terre par un ballon plus noir, plus puissant, plus effrayant que ceux que l'on aperçoit sur l'illustration. Me voilà hors de ma galaxie.
Univers chamboulé. Cliquer sur relever le défi et trouver pager blanche de nombreux jours. Ne plus avoir envie de venir sur la plate forme et travailler mes textes. Imagination envolée.
De quoi ai-je envie ? Qu'au fil de mes mots, je puisse grimper le long de cette corde, sortir ma plume, et menacer. Menacer ce ballon. Lui dire d'aller se faire foutre, de le laisser tranquille, de me rendre l'homme que j'aime. Lui dire que je l'en empêcherai, qu'il ne me l'enlèvera pas. Pas comme ça. Dire à ce ballon que j'ai mes protections, mes enveloppes, mes couches, ma combinaison, mon bouclier et qu'il ne m'aura pas. Que je vais me battre pour lui, pour celui que j'aime. Ma plume est sortie, aiguisée, acérée, et elle a soif. Soif d'une encre épaisse, chaude, au goût ferreux, écarlate.
Toi ! Terreur invisible ! Explose, claque, lorsque j'enfonce cette plume au plus profond de ton enveloppe immatérielle. Des années lumières nous séparent de la réalité. Combien de temps avant que mon acte ait les répercutions escomptées sur ma moitié ? Quel décalage avant que la gravité nous ramène dans notre univers ? J'ai baissé ma garde, j'ai cru qu'il allait mieux, j'ai cru que ce deuil était fait. J'étais obnubilée par ce projet qui traîne. Rien d'autre ne comptait. Erreur. Douleur. Foutu ballon, tu as bien réussi ton coup. Tu as gonflé petit à petit, et sans qu'on s'en aperçoive, nous voilà hors de notre atmosphère. Les capteurs de nos combinaisons se sont brutalement affolés mais sois tranquille. Tu penses avoir gagné ? Quelle naïveté ! Ne vois-tu pas que je façonne une arme redoutable ? Construite avec une grande minutie pour un but : quelle devienne notre étoile, le centre de notre univers pour te voir imploser sous l'impact de notre bonheur.
Bientôt, très bientôt, tu n'appartiendras plus qu'au passé ! Tremble, dépression. On aura ta peau.
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Parce que l'envie d'écrire ça peut nous prendre un peu comme une envie de chier, quoi de mieux qu'un ordi sur les genoux et quelques minutes à tuer sur le trône pour assouvir l'un et l'autre de mes besoins primaires.
Par où commencer ? Difficile, mais je vais essayer de faire de mon mieux.
Je suis une femme qui gère. Quoi ? À vrai dire, pas mal de choses. Peut-être trop, je l'accorde et je pense que cette maîtrise montre à présent toute l'étendue de ses failles.
On dit que la grossesse ça déséquilibre le centre de gravité et bien celui qui a pondu cette connerie ne croit pas si bien dire. Dieu que je comprends certaines femmes qui, une fois leur utérus gravide et leur ventre s'arrondissant, décompense de pathologies jusque là parfaitement maîtrisées... Pour résumer, ma vie à moi, gravite autour de plusieurs autres vies que l'on appelle un entourage et qui ne va pas forcément très bien.
Ma sœur traverse seule une dépression depuis plusieurs années. Mon conjoint, qui a perdu son papa il y a quelques mois, a traversé une très vilaine passe également lorsque la grossesse n'était alors qu'à l'état d'amas de cellules et pour couronner le tout, cette dite grossesse n'a pas débuté sous les meilleurs auspices... Charmant, n'est-ce pas ? Et moi dans tout ça ? Et bien je gravite. Je ne vais pas vous cacher que je suis tombée de haut lorsque Mathieu m'a annoncé être contraint d'interrompre son contrat de travail devant des crises d'angoisses à répétitions et un traitement anxiolytique instauré par le médecin traitant... Il est mon ancre, ma bouffée d'air et de bonheur... Si lui vacille, alors que me reste-t-il ?
Le travail. J'adore mon job. Travailler avec ses amies, faire un taf gratifiant baignant dans l'amour, dans la fierté, dans le bonheur, tout le monde en rêve ? Et bien je le vis au quotidien. Enfin, je le vivais... Car oui, là aussi, les limites se sont faites sentir. Satané utérus, satané bassin. Me voilà contrainte de me mettre à l'arrêt devant une vilaine sciatique. Comment je vais compartimenter maintenant ? Là bas, rien d'autre ne compte et personne ne me hante, mais ici, chez moi, seule, isolée, limitée physiquement, avec un locataire qui prend de plus en plus de place, et qui me transforme de plus en plus, tant sur le plan physique, que sur le plan moral, je vacille à mon tour.
Car oui, toi qui bouges, toi qui grandis, tu chamboules tout. Oserais-je dire qu'à cause de toi, je me retrouve chez moi à ne pas pouvoir profiter de la bouffée d'oxygène que représente mon boulot ? Oserais-je dire que par ta faute, je me retrouve avec des angoisses, et une forme de culpabilité de te faire ressentir tout ça ? Oserais-je dire alors, que j'ai besoin d'aide pour gérer cette culpabilité ? Car oui, petit bébé, il m'a fallu du temps pour t'appeler ainsi, pour m'envisager maman, pour appréhender ta présence dans mon corps, et ce, même si tu as été programmé depuis longtemps. Et c'est pour cela, que j'ai besoin d'aide. Tu mérites de ressentir ce qu'est la paix, la sérénité, la confiance et l'amour. Les angoisses d'une mère qui s'inquiète pour son entourage ? Tu ne les mérites pas, elles ne te servent à rien, tout comme, au final, elles ne me servent à rien. Il s'agit de leur vie à eux et pas de la mienne, qui au final, est si belle ! Veinarde !
Alors voilà ici le premier texte depuis une éternité, écrit sur les chiottes, les pieds fourmillants, après avoir passé l'après-midi à rechercher le meilleur babyphone ou le sac à langer idéal d'un bébé que je pense déjà aimer autant que j'aime son père qui sourit à nouvea, et surtout après avoir réfléchi à ce que je vais dire à la sophrologue que je rencontre lundi.
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Défi
12 mars 2021.
27 semaines d'aménorrhées.
Toi que j'observe à travers cette paroi qui s'arrondit, toi, qui gigotes, tournes et retournes dans ce ventre que je prête, j'ai quelque chose à t'écrire.
Mon chéri, mon chat, petit renardeau que j'imagine en bonne santé, la vie te fera des cadeaux, tu verras. À chaque vague, je t'imagine heureux, souriant, amusé de racler tes petons dans le fond de ta première maison et j'imagine alors la puissance d'un tout petit corps, déjà si généreux. Mais qu'importe cette puissance, qu'importe les gestes, qu'importe les mots, qu'importe ta vie, mon chéri, je ne te demande qu'une seule chose : respecte les toutes, toujours.
Ne lève pas les yeux au ciel comme ton père ! N'oublie pas la chance que tu as d'être né homme blanc dans notre société et n'oublie jamais que d'autres se battent au quotidien pour le respect qu'on t'offre avec tant de facilité. Alors chéri, respecte tous ceux qui sont différents de toi et plus particulièrement, respecte la Femme.
Respecte la mère, respecte la fillette, la mamie. Respecte les yeux en amandes ou le velouté d'une peau venue d'ailleurs. Respecte le silence et le regard fuyant. Respecte l'intimité meurtrie, amputée par les croyances d'un autre temps. Respecte la longueur et la place d'une étoffe qui parfois, dit plus qu'elle ne dévoile, respecte aussi le plongeant de certaines autres... Jamais tu ne sauras ce qu'un regard insistant peut provoquer. Jamais ton torse ne sera autant agressé que la poitrine d'une femme dissimulée avec poésie sous un tissu alors, chéri, respecte toute cette diversité de femmes. Elle peut être timide, extravertie, grande, petite, grosse ou maigre, sur ses deux jambes ou à deux roues, avec, sans cheveux, maquillée ou non, féminine, masculine... Quelle qu'elle soit à tes yeux, elle est bien plus puissante que toi, et ça tu ne pourras jamais le comprendre, alors respecte chaque femme qui aura la chance de graviter autour de toi.
Désire les si tu le souhaites, aiment les si cela te chante, mais s'il te plaît, n'oublie jamais de les respecter. Ne fais pas ton malin, ne sois pas comme ces porcs. Ne sois pas l'adolescent abruti qui siffle, qui claque des mains ou insulte... Ne sois pas celui qui blesse. Ne sois pas le patron abusif, le mari étouffant, le père insistant. Naître homme est facile et naître femme devrait l'être aussi. Pour cela, l'homme doit en prendre conscience. Ne sois pas dangereux, ne cache pas ton jeu. Respecte, tout simplement et surtout, n'insiste pas, n'insiste jamais.
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Défi
Est-ce que je crois en un destin déjà tracé ? Hum, je ne cesse de dire que le destin fait bien les choses, que tout arrive dans une vie pour une raison, même s'il est parfois difficile de comprendre. Alors, j'aurais tendance à répondre bien naturellement que oui, je crois en un destin tracé.
Des années d'attente après des années d'amour. Mais rien. Toujours rien. Rien que le vide. Rien que nous deux. Difficile alors de comprendre la volonté de ce destin, de cette nature toujours plus forte que la volonté individuelle. Ce vide réglé qui dure et perdure, apporte doutes et craintes. Pourquoi ? Qu'avons-nous fait pour ne pas avoir droit au bonheur offert pourtant si facilement à tant d'autres ? Dans cette vie ou dans une autre, avons-nous causé tant de tort qu'il faille nous priver de cette chance ? Certains appellent cela le Karma. Payer pour le passé. Le nôtre ou celui de nos ancêtres. Quelle idiotie !
Pourtant, quand la vie ne suit pas nos rêves, on en arrive à douter. Douter de nous. Du nous que forme ces amoureux depuis toujours que tant d'autres jalousent. La vie est cruelle. Elle sait donner autant qu'elle sait priver. Alors ce destin qui expliquait la plupart des grands événements de ma vie a commencé à me faire détester d'y croire. Bien sûr, il m'a fait rencontrer l'homme qui partagera le reste de mon existence, celui qui m'a appris à m'aimer et à me moquer de moi-même, qui m'a apportée tant de confiance en ma personnalité et en mon corps...
Parfois, la vie s'acharne à nous faire perdre notre optimisme. Je n'y pensais plus ? Mon esprit n'était plus focalisé sur ce projet qui ne venait pas secouer notre quotidien ? Conneries. Bien sûr que tous les mois, deux fois par mois j'y pensais. Cercle vicieux. J'avais tout. Bonheur, amour, vocation, famille, amies. Pourquoi oser en réclamer davantage ? Seulement, la famille s'est assombrie par la cruauté de cette vie. Maladies physiques, maladies mentales, mort, ces dernières années n'ont pas été baignées de lumière mais des amitiés s'en sont renforcées. Puissantes et aussi précieuses que les ressources de cette terre, elles ont été la lumière, le soleil dans cette obscurité qui m'étouffait sans même que je m'en aperçoive. Oui, ces dernières années, ce destin ne m'a pas apporté que de bonnes choses. Pourquoi alors continuer d'y croire, de s'y raccrocher comme l'explication ultime de ce tout qui resserrait ma poitrine ? Parce que tout arrive, ou n'arrive pas, pour une raison précise. La comprendre sur l'instant est rare mais un jour, la vie nous apporte toutes ses raisons.
Pourquoi avoir autant attendu avant de m'apporter cette chance ? Parce que j'avais besoin de réaliser. De réaliser que je le voulais vraiment. Que je voulais vraiment qu'on se lance à deux dans cette folle aventure. Dans cette aventure qui va chambouler nos vies, et celles de tant d'autres. Que ces autres y puiseront peut-être, eux aussi, tout ce que la vie a de plus beau à offrir. L'espoir d'un mouvement si puissant, qu'il déséquilibrerait les relations, les dits et non-dits qui ont créé cet étau pour apporter alors du renouveau.
Est-ce que je crois en un destin tracé ? Oui. C'est grâce à lui que je me réjouis désormais de ces changements qui s'opèrent. Je m'inquiétais qu'il ne soit pas là. Je m'inquiète désormais qu'il y reste, et surtout, qu'il s'y développe correctement. Désormais, une part de moi, enfouie, bien enfouie me rassure. S'il est arrivé après tout ce temps, après tous événements, alors, n'aies crainte. Tout ira bien, ça ne peut qu'être écrit.
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Vous êtes arrivé à la fin