Parmi les arbres

8 minutes de lecture

Perdu au cœur d'une grande foret, le jeune " Lolo ", ne sut quelle direction prendre.

" Pars vers le Nord Est ", lui avait ordonné son maître, avant de disparaître parmi la canopée.

- Alors, gamin, par où tu veux aller ? Tu n'sais pas où est le nord, et encore moins l'est, fais moi rêver !

La dague à sa ceinture ne cessait de lui parler, et encore moins de se moquer de lui. Le monstre accroché à sa taille n'avait cure de l'âge de son porteur, un pauvre enfant de sept ans ne pouvait entreprendre un tel voyage. Il le savait, son maître le savait, tous le savaient.

L'enfant prit une longue respiration, et sans hésitation, il fit un pas vers l'avant.

- Il suffit de suivre le soleil levant pour se diriger vers le Wa, à l'est, et le nord devrait être à la gauche du soleil, donc, en suivant ce raisonnement, on devrait y arriver.

Un grognement échappa à son arme.

- Où, tu pourrais me laisser le contrôle, et je t'y emmènerais, promis, après je te rends ton corps.

Rapidement, des " cling ", " clang ", " clong ", dérangèrent le calme des arbres alors que " Lolo " frappait à de multiples reprises la dague contre un rocher proche.

- Aïe, arrête des conn-... Morveux, j'vais t'arrach-... Mais bordel stop !

Ce n'est qu'après de longues minutes que le vacarme prit fin, et le voyage pu débuter.

Les jours s'écoulèrent, deux mois, deux longs mois de voyage, seul au milieu de la forêt, ou presque. Deux mois étaient tous le temps que son maître lui avait offert pour se rendre jusqu'à Némeos, la cité des Gardiens.

À chaque pas, le garçon pouvait sentir sa destination s'approcher. À chaque pas, il découvrait de nouvelles choses. Un jour, un insecte qu'il n'avait jamais vu.

- Oh ! Ignis ! Ignis regarde ! Un scarabée rhinocéros de Wa ! J'en avais jamais vu en vrai ! Trop cool ! Regarde-moi cette corne ! On dirait un Pouchémon !

Sans grande surprise, la dague n'avait cure de cette découverte, mais pour le garçon, ce simple insecte était quelque chose d'incroyable, quelque chose de nouveau. Sans hésitation, il s'en saisit, et comme s'il marchait grâce à une étrange forme de pilotage automatique, il reprit sa route sans pour autant lâcher des yeux le pauvre insecte prisonnier de sa petite main.

La journée fut longue, et quand vint l'heure de se coucher, le garçon planta la lame dans le sol, son manche enfoncé dans la terre, elle s'embrasa. Ignis lui servirait de feu de camp pour la nuit.

Son sommeil fut étrangement paisible, cela ne faisait que deux petites semaines qu'il avait pris sa place parmi les bois, et il semblait déjà s'y être habitué.

Au petit matin, son ventre criait famine, il n'y avait là guère de surprise à cela, pour un garçon de son âge, une si grande épopée demandait une quantité d'énergie phénoménale. Il ouvrit son paquetage, le vida, et n'y trouva que du riz...

Cependant, à son plus grand plaisir, une rivière se faisait entendre à quelques dizaines de mètres de là où se trouvait l'enfant. Qui dit rivière, dit poisson, qui dit poisson, dit un bon repas.

C'est dans la précipitation que l'enfant remballa son paquetage, et fit une ligne droite en direction du bruit. Et quelle surprise. Face à lui, il ne s'agissait pas d'une simple rivière, mais d'une cascade rugissante. Il n'était pas surprenant qu'il l'ait entendu depuis son campement de fortune. Au pied de la cascade, dans l'eau, des dizaines de carpes semblaient s'être lancé le défi de l'escalader, nombreuses furent celles qui s'élancèrent à la conquête du torrent déchaîné. Toutes sans exception se virent échouer avant de retomber dans l'eau plus bas. Si pour elles, la situation était bien triste, pour le garçon, il s'agissait là d'une aubaine.

- T'as vu ça Ignis ? ! Une cascade ! Une vraie cascade ! Comme dans les livres !

Ignis ne laissa qu'échapper un misérable, " pff ". La chose était après tout l'incarnation de la première flamme, le feu primordial ne pouvait s'émerveiller devant une simple cascade... Et puis il faut dire qu'il n'aimait pas bien ça, l'eau.

Le garçon lui, ne pouvait s'empêcher de regarder la cascade comme s'il s'agissait d'une des plus belles choses qu'il eut vue de sa courte vie... À bien y réfléchir, il était bien possible que cela soit en effet l'une des plus belles choses qu'il vit. Il restera là de longs instants, observant les poissons tenté leurs chances, l'eau qui s'écrasait, écoutant le bruit qu'elle causée, en admirant la puissance. Il ressentait la crainte que ce simple court d'eau inspirait à la créature toute-puissante qui pendouillait à sa ceinture et ne pouvait s'empêcher de trouver ce miracle de la nature, magnifique.

Cependant, la réalité le rattrapa assez rapidement. Un nouveau grondement se fit entendre, son estomac le suppliant de le remplir. Il éclate de rire, et fit un pas dans l'eau.

Il se saisit d'une pierre qui traînait là, et dans un éclair blanc, l'une des nombreuses carpes tentant l'ascension se vit perdre la vie avant de s'écraser contre la surface de l'eau.

Une fois la carpe en main, il ne lui resta plus qu'à l'écailler, la vider, en extirper la chair, et en disposer les tranches sur ses boulettes de riz vinaigrés. Un véritable repas de seigneur pour le jeune garçon abandonnait parmi la mer d'arbre.

- C'est trop bon ! Je suis un génie ! Je vais appeler ça... Le... Oh, je sais ! Nigirizushi ! Ça sonne bien !

A la vus de ce repas, nombre d'étranges créatures se jointent au jeune homme, et ensemble, un véritable festin prit place sur les berges de la rivière. Des créatures toutes plus étranges les unes que les autres. Un renard aux traits fins se plaça à sa droite avant de prendre forme humaine, sous ses bras, il tenait deux faisans qu'il avait dû abattre récemment. Un étrange chien viverrin se joint également à eux, il se faisait connaître sous le nom de Danzaburo, le tanuki, lui, ramenait de la boisson. Pour tout légume, les nouveaux amis mangeraient des concombres apportaient par une chose semblant être le mélange d'un canard, un enfant, une grenouille et une tortue, drôle d'animal que voici. Tout se passait merveilleusement bien pour la petite coterie, les rires fusaient et le repas était délicieux. Mais rien ne dure jamais.

Un grand " splash " se fit entendre, suivit par un tremblement de terre, puis une ombre projetait au-dessus d'eux.

Dans la panique, tous les animaux prirent la fuite, laissant le gamin et son arme abasourdie devant la créature qui se présentait devant eux. Un monstre de plusieurs dizaines de pieds de long. Une gueule assez grande pour avaler des dizaines d'hommes en un coup de croc, des dents aussi longues et tranchantes que des dagues, des pattes puissantes et armées de griffes semblables en tout point à des sabres, et un corps aussi long et tortueux que la rivière qui l'avait vus naître. L'une des carpes avait-elle atteint son objectif ? Aurait-elle réussi à atteindre le sommet de la cascade ? Qu'importe, le résultat était là, face à lui.

- Un dragon !! Hurlait l'arme qui pendouillait à la ceinture du gamin. Fuis ! Vite, sinon on était foutu !

Loin d'obéir aux instructions de la dague, le gamin s'en saisit. Un sourire sur le visage, il tremblait d'excitation. Le garçon semblait avoir une capacité d'adaptation surnaturelle. Il ne lui aura fallu que quelques jours pour s'adapter à son environnement. Le petit " Lolo " semblait s'être déjà transformé en bête sauvage, cherchant l'affrontement, l'excitation apportée par un combat à mort.

Un silence d'outre-tombe s'instaura alors que les nouveaux ennemis se dévisageaient. Un silence de courte durée, car finalement, voilà que le gamin le brise. Dans un hurlement bestial, il s'élança à la rencontre de son adversaire. Deux autres cris firent trembler les arbres. Celui du dragon, un rugissement monstrueux secoua la forêt par sa puissance. Et enfin, celui de la dague, plus aigue, effrayée par la situation, craignant pour sa vie.

L'affrontement était féroce. Aucun des adversaires n'acceptant de céder du terrain à l'autre. Le garçon se battait avec l'agilité, la vitesse et l'arrogance d'un singe des montages. Le dragon quant à lui faisait résonner le tranchant de ses crocs et griffes, faisant trembler la terre et débordées la rivière. L'opposition de deux forces incoercibles se faisait ressentir parmi la forêt. Le monstre, tout-puissant, et pourtant, enchaîné, lié à la rivière et à son cours d'un côté. Et de l'autre, le garçon, libre de ses mouvements, jouant de cette liberté avec arrogance et éclats de rire.

Son arme, par le passé pas plus longue qu'un glaive semblait maintenant aussi longue et tranchante qu'un nodachi. Sans trop savoir s'en servir, il compensait son manque de connaissances par son agilité. Se servant de l'arme comme d'un bâton, frappant de son tranchant comme de son plat sur les écailles de la bête. Le ciel, contre la terre, la rivière contre le vent.

Le combat dura de longs jours, de longues nuits. Sur le dos de la bête, l'enfant avait traversé de nombreuses lieues en directions de sa destination. La fureur du monstre avait ravagé la forêt, et pourtant, le rire du garçon ne semblait pas s'éteindre, il semblait prendre un plaisir monstre durant cet affrontement.

La fureur de vivre, la détermination, et par dessus tout, la joie du gamin avait gagné sa lame qui avait cessé toute forme de résistance contre lui. Il s'agissait là d'un combat qu'elle ne pouvait de toute façon, pas gagné. Alors autant donné tout ce qu'elle avait contre leur ennemi commun. Le feu contre l'eau, voilà un combat qui restera dans les annales.

Ce n'est qu'à la fin d'une longue semaine d'affrontement que la bête ne rendit son dernier souffle. S'écrasant au sol, abattant bouleaux comme chênes sur son chemin. Son œil furieux toujours figé sur le singe qui venait de l'abattre.

- On l'a fait Ignis ! On a vaincu le dragon ! On est les meilleurs !

Comme dans un réflexe bestial, le gamin se mit à battre son petit torse comme un tambour, riant aux éclats avant de s'effondrer au sol, à bout de force. Il lui faudrait bien du temps pour récupérer de ce combat d'anthologie, mais il avait survécu, mieux, il avait vaincu. Il se sentait invincible à cet instant, la forêt elle-même trembler devant ce petit garçon étrange. Sa peau semblait faite de pierre et ses yeux, similaires à deux jades semblaient percer les nuages de rayons de lumière.

Il lui fallut bien quelques jours pour reprendre connaissance, aux côtés du monstre qu'il avait occis. Puis reprendre sa route vers Nemeos, il manquerait deux mois d'entraînement, mais les auraient compensés par des aventures dignes de contes.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Le Professeur ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0