Les jours de Soleil

4 minutes de lecture

Clara avait 8 ans lorsqu’elle entra pour la première fois à l’hôpital. La leucémie avait transformé sa vie en une routine de traitements, de chambres aux murs blancs et de machines aux bips incessants. Les journées se ressemblaient toutes, mais Clara refusait de sombrer dans la tristesse. Elle s’évadait dans ses dessins, remplissant des feuilles entières de paysages colorés : des champs fleuris, des ciels radieux et des animaux fantastiques qui semblaient tout droit sortis d’un rêve.

Un jour, alors qu’elle s’appliquait à dessiner un papillon géant, un garçon entra dans sa chambre. Il portait une casquette bleue qui lui tombait presque sur les yeux, et il semblait hésitant, comme s’il n’était pas sûr d’être au bon endroit.
« Bonjour », murmura-t-il en regardant ses dessins.
Clara leva les yeux, lui offrant un sourire chaleureux.
« Tu veux dessiner avec moi ? »
Il haussa les épaules, mais s’approcha finalement.
« Je ne suis pas très doué… Mais tu pourrais m’apprendre à faire un dragon ? »
Clara rit doucement et lui tendit un crayon rouge.
« D’accord, mais tu dessines les flammes. »

Ainsi commença leur amitié. Lucas, âgé de 9 ans, partageait le même combat que Clara. Leur complicité grandit rapidement. Ils passaient leurs journées à dessiner, à imaginer des mondes fantastiques où leurs corps n’étaient pas fatigués, où la maladie n’avait pas de place. Lucas avait un rire contagieux qui illuminait la chambre, et même dans les moments difficiles, il trouvait toujours une blague pour faire sourire Clara.

Un jour, alors qu’ils étaient assis côte à côte, Lucas fronça les sourcils en observant un dessin de Clara.
« Tu dessines toujours des champs de fleurs. Pourquoi ? »
Clara haussa les épaules, traçant un pétale avec soin.
« Parce que quand je sortirai d’ici, c’est là que je veux aller en premier. Sentir les fleurs, courir dans l’herbe, voir le soleil sans une vitre entre nous. »
Lucas la regarda, pensif.
« Tu sais quoi ? On ira ensemble. Je veux voir ça aussi. »
Elle lui tendit la main, et il la serra avec douceur.
« Promis ? » demanda-t-elle.
« Promis. »

Mais la maladie n’épargnait personne. Les semaines passèrent, et Lucas commença à changer. Ses forces diminuaient, ses joues devenaient plus creuses, et son rire se faisait plus rare. Clara voyait les cernes sous ses yeux, les tremblements dans ses mains quand il essayait de tenir un crayon. Un après-midi, alors qu’il luttait pour dessiner un simple cercle, il jeta le crayon au sol, frustré.
« À quoi bon ? Je suis nul. Et de toute façon, je suis trop fatigué pour courir dans un champ de fleurs. »
Clara posa son dessin et lui prit doucement la main.
« Ne dis pas ça, Lucas. Tu es fort, beaucoup plus fort que tu ne le crois. »
Il baissa les yeux, murmurant : « Et si je ne sors jamais d’ici ? »
Clara sentit les larmes monter, mais elle les retint. Elle devait être forte pour lui.
« Tu sortiras », dit-elle fermement. « Et même si tu es fatigué, je te porterai s’il le faut. Mais on verra le soleil ensemble, c’est promis. »

Malgré ses paroles réconfortantes, Lucas continuait à décliner. Certains jours, il était trop faible pour se lever de son lit. Clara s’asseyait alors à côté de lui, dessinant en silence, lui racontant des histoires pour remplir l’espace de rires et de couleurs.

Une nuit, alors que tout était calme dans l’hôpital, Lucas lui murmura :
« Clara… si je ne peux pas courir avec toi, tu courras pour nous deux, d’accord ? »
Elle serra sa main avec force, refusant d’accepter cette idée.
« Arrête, Lucas. Tu seras là. Je le sais. »

Mais un matin, Clara se réveilla et trouva son lit vide. La casquette bleue de Lucas était posée sur la table de nuit, un souvenir silencieux de son départ. Sa maman entra dans la chambre, ses yeux rougis.
« Lucas est parti, ma chérie. Il ne souffre plus. »
Clara sentit son cœur se briser en mille morceaux. Les larmes qu’elle avait retenues pendant des semaines jaillirent, mais au fond d’elle, une promesse restait gravée : elle courrait pour lui.

Quelques mois plus tard, le jour tant attendu arriva. Clara quitta l’hôpital pour la première fois. Sa maman l’emmena dans un champ de fleurs, comme celui dont elle avait tant rêvé. L’air était empli du parfum des fleurs sauvages, un mélange doux et enivrant. Le vent caressait son visage, jouant avec ses cheveux, et le chant des oiseaux résonnait tout autour d’elle.

Elle s’accroupit et sortit de sa poche le dernier dessin de Lucas : un champ de fleurs baigné de lumière, avec deux enfants courant main dans la main. Elle posa le dessin au milieu des fleurs et regarda le ciel.
« Tu avais raison, Lucas. Le soleil est encore plus beau en vrai. »

Elle inspira profondément, fermant les yeux pour savourer ce moment. Puis, elle se redressa, regarda l’horizon et murmura :
« Je vais courir pour nous deux. »

Et elle s’élança à travers le champ, ses pieds frôlant l’herbe douce, son rire se mêlant au vent. Dans ce champ de fleurs, Clara sentit que Lucas courait avec elle, quelque part, dans un coin de son cœur.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Podqueenly ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0