Interlude épistolaire à sens unique

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Bon, je viens de rédiger cette lettre que je compte envoyer à l'école de mon petit dernier, et peut-être aussi au maire, et peut-être aussi à la Gazette, voire à la cour européenne des droits de l'homme, à l'ONU ou à Dave Grohl. Je l'ai à peine relue, ce sera remanié, mais j'avais envie de le partager avec vous, ça peut vous faire marrer...

Madame, Monsieur,

Je m'adresse à vous pour vous faire part de ma stupéfaction.

Hier, jeudi 9 mars, mon fils Milo s'est vu imposer la vision d'un dessin animé à l'heure de la cantine. Il s'agissait d' « Hercule », une fantaisie des studios Disney s'inspirant vaguement de la légende du demi-Dieu grec. Milo a exprimé son souhait de jouer à l'extérieur, ce qui me semble un réflexe sain chez un enfant de son âge, d'autant plus qu'il ne se prive pas de regarder sa dose de cinéma ou de dessins animés à la maison, sous notre supervision et souvent en la compagnie d'un adulte ou de sa sœur aînée. Les animateurs le lui ont refusé. Le prétexte invoqué pour le forcer à regarder « Hercule » était que ce navet – parce que c'en est un, ne nous leurrons pas – s'inscrivait dans une démarche pédagogique autour de la mythologie gréco-romaine.

Manque de bol pour les critiques avisées à l'origine du choix du film sélectionné, Milo s'y connaît en mythologie grecque puisque ses parents en sont férus également, d'où de nombreuses lectures, et autres supports audio, vidéo etc bien plus adaptés que le film sus-cité. A noter également que le prof de Milo en moyenne et grande section a passé également pas mal de temps à raconter les grandes lignes de la mythologie grecque.

Toujours est-il que Milo est rentré à la fois furieux et navré de constater l'appauvrissement de la légende, le non-respect du personnage et un traitement mièvre dont le fond sonore arracherait des plaintes à un sourd. Milo a hérité de l'esprit critique de ses parents.

J'ajouterais pour ma part que le personnage est nommé Hercule selon la tradition latine alors que les autres Dieux apparaissant dans le film conservent leurs noms grecs : Zeus, Héra, Hadès. Ce manque de cohérence contredit ouvertement le prétexte du « projet pédagogique ». Mieux encore, le film présente Hercule comme le fils de Zeus et d'Héra. Contresens lamentable et honteux. Héraclès, dont le patronyme signifie « la gloire d'Héra », doit justement son nom au fait qu'il est le fruit d'amours illégitimes entre ce coquin de Zeus et une mortelle, et qu'il est obligé de se soumettre aux ordres d'Héra pour payer la faute du père. C'est de cette façon qu'il devient un héros célèbre et blablabla, je ne vous apprends rien, mais le film, lui, désapprend. Il y a d'autres supports pour enseigner la mythologie et un tel choix semble indiquer, surtout, que les animateurs souhaitaient profiter de la phase digestive qui suit le repas sans se soucier outre-mesure du bien-être des enfants.

Ce n'est pas la première fois que Milo revient de l'école en se plaignant qu'on l'ait obligé à regarder un film. Projet pédagogique ou non. C'est proprement scandaleux. Les psychologues, orthophonistes et professionnels de l'éducation s'accordent tous sur le fait qu'il faut limiter le temps d'écran pour les enfants et des animateurs, chargés de veiller sur nos enfants, les placent délibérément devant des films qu'ils choisissent au petit bonheur la chance sous prétexte que c'est du dessin animé, donc ça va ?

Franchement, on croit rêver.

J'exige que ça s'arrête.

Merci de votre compréhension.

Cordialement,

Miguel Lopez

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