Noir
Il te semble aujourd'hui que tes jambes fragiles
Ne sauraient te porter au delà de tes murs,
Que la tâche est trop dure, l'ennemi invincible,
Et tu n'oses lever les yeux vers le futur.
La journée qui s'étend devant toi, page blanche,
Fait de ton matin calme un vestibule d'ombre ;
Tu attends que la nuit avec son masque d'encre
Cache à tes propres yeux ton visage qui sombre.
Tu as peur de ces gens qui jugent, qui condamnent
Et ne veux plus croiser que regards inconnus ;
Il semble que ton cœur sous le poids de tes larmes,
Tende à se racornir chaque jour un peu plus...
Je ne connais que trop cette douleur affreuse
Qui se renforce encor de ce que la raison,
Quelle que soit l'ardeur vraie de sa main généreuse
Echoue à en briser l'amère obstination...
Le temps qui passe enfin atténue la brûlure :
N'applique pas trop tôt le fer de ta pensée
Sur l'invisible plaie qui saigne et qui suppure...
Repose-toi plutôt, laisse le temps passer...
Fais-toi un doux duvet de l'affection des tiens,
Dépose tes soucis et détends ton corps gourd ;
A ton étonnement tu verras qu'un matin
Le fardeau de ta peine aura pesé moins lourd
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