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— On est où ?

— Tu n’as pas une petite idée ?

Elle observe à travers la vitre l’environnement. Il faut dire que ce n’est pas vraiment jolie et c’est perdu dans un coin de campagne à trente-minute de la ville. J’ai eu rapidement le coup de cœur pour ce lieu. J’espère que ça plaira à Marta.

— Un hangar, le hangar pour nous.

— Nous ?

Elle prend ma main pour faire des cercles dans la paume avant de me répondre.

— Oui

— Je suis heureux de ton envie d’être avec moi dans mon projet d’une salle de spectacle. L’essentiel désormais, c’est de te trouver un rôle. Si tu veux m’aider.

— Hum …je m’en fiche de la salle.

— Comment ça ?

— Maman t’as pas dit ?

— Non mais je t’écoute.

— Ce n’est pas moi le problème, c’est toi la solution

— Tu veux dire quoi par-là ? Je ne suis plus ma belle.

— C’est internet qui m’a donné la solution pour être connu.

— Ah oui et comment ?

— Internet

C’est à mon tour de réfléchir en fixant le hangar puis Marta. Je pense savoir où elle veut en venir. Faudrait peut-être que je laisse les spectacles au bar pour me concentrer sur un autre moyen de diffusion et dans un ou plusieurs autres domaines. Internet offre plein de possibilité à saisir.

— Internet est la solution. Tu veux créer des films à petit budget ou des clips vidéo ? Toi qui aimais tant et aime encore la scène.

— Pas que. Blog aussi. YouTube, tu sais, quand je dors pas, j’écris ou presque mais aussi je regarde des conseils sur ce genre de trucs. On peut tout faire !

— Quels genres de conseils ?

— Comment mourir…

Je la force à me regarder pour embrasser son front, le temps de continuer à trouver mes mots.

— On va éviter ce genre de conseils. Néanmoins c’est encore une fois une très bonne idée.

— C’est vrai ? Tu veux de moi ?

— On va visiter l’endroit, tu vas voir c’est génial ! Bon, je vais te donner un pull quand même car ce n’est pas chauffer. Ce qui est certain, c’est que je me dis qu’on peut créer diffèrent pièces pour pourquoi inviter des personnes qui tournerons des vidéos de conseils ou des petits films ou parler de choses de la vie. Tu me suis ?

— C’est compliqué…

— Alors, on va le visiter ?

— C’est fini ?

— Il est vide mais c’est important d’y aller pour regarder le potentiel de ce grand lieu.

Je sors pour prendre son fauteuil et un pull mais en ouvrant la portière, elle fixe ses mains. Je veux lui intimer de venir quand on m’appel. C’est son père et je m’éloigne tout en gardant un œil sur Marta qui n’a pas bougé :

— Allo ?

— Je te dérange pas ?

— Non, je suis avec Marta devant le hangar que j’ai acheté, le matin même. J’allais lui faire visiter mais elle ne semble pas se décider. Et vous ? Il y a un problème avec la piscine ?

— Disons que j’ai besoin d’un coup de main. Je ne crains qu’il ne faille revoir tout le système.

— Je m’y connais rien mais je viens. On rentre.

— Super merci !

— C’est moi qui vous remercie. Sinon j’imagine que votre femme est avec vous ?

— Oui, elle lit dans le jardin, on a emmené Elfi.

— Ça fera plaisir à Marta. Bien, on rentre. Je vais en profitez pour inviter Adela à prendre l’apéro.

— Je m’en occupe.

— Ok, super, à plus tard.

Je rentre et j’informe la raison du départ. Toujours aucune réaction et je n’essaie de pas m’inquiéter durant le trajet. Une fois à la maison, ma copine s’installe sur le canapé et allume la télévision.

Pendant ce temps, je tente de comprendre l’installation de notre piscine qui commençait à plus marcher depuis la veille et son père est rapidement venu à la rescousse. Je voulais m’en occuper plus tard avec des professionnels hors il se refusait de penser que sa fille allait attendre plusieurs jours pour se baigner. Bien, que comme tout le monde, on sait qu’elle s’en fiche.

Sa mère prépare des sandwichs et en donne à sa fille qui s’est allongé pour regarder une ancienne série sur la danse, le chien à ses côtés. Elle finit même par s’endormir jusqu’à l’arrivé de sa sœur.

Les deux femmes sont hilares et d’une faible assistance dans notre combat toujours vif face aux éléments. Son père se résigne à boire une bière sur un tabouret au fond de la piscine en observant le carrelage. J’en profite pour aller me doucher et participer à une conférence en ligne sur la création d’une entreprise d’événementiel.

En sortant me prendre une bière, les femmes lisent dehors et le père est sorti de son antre pour jouer aux sudoku, cette fois, le chien à ses pieds.

Je retourne mon attention sur ma copine. Je reste en retrait observé un nouveau spectacle et visiblement, sa famille m’a rejoint sans doute alerté par son plaisir solitaire bien trop bruyant.

En silence, presque cachés dans la cuisine, on commente en chuchotant mais en commun accord on ne bouge pas. Adela sort son téléphone et choqué je lui demande ce qu’elle compte faire :

— Bé je vais enregistrer ses paroles.

— C’est son plaisir, on ne devrait pas regarder ! Je ne vois pas pourquoi on s’acharne à rester planter là alors que c’est son intimité.

— Je suis d’accord Monsieur mais elle a fini et marmonne des choses.

— C’est audible maintenant précise sa mère mais aucune film, ok Adela ? Même en lui montrant, elle se reconnaîtra pas et si c’était le cas, elle en aurait honte.

— Oui, je comprends désolé. C’était dans une intention de la faire analyser aux médecins si elle recommencer. Surtout si elle délire.

Pas le temps de continuer le débat, Marta les jambes encore en équerre au sol, retire sa main et dessine rapidement quelque chose sur la table basse puis s’en va précipitamment après mis pause, poser sa main sur un personnage féminin de la même série qui tourne en boucle. Elle se retourne, dos accolé et mime parfaitement, quelqu’un qui joue avec le sable d’une seule main.

Elle commence à rire et le temps s’arrête. Puis on l’entend parler à quelqu’un de manière fluide. On reste hypnotisé.

— Tu te souviens Eva, de nos jeux d’enfants dans ce parc ?

— Oui, Marta. Tu me vois encore sur cette balançoire ?

Marta l’a fait parler. Deux personnalités, deux entités. Parle-t-elle aux morts ? Ou les morts l’ont-elles possédé ? Quand Eva parle, sa voix est douce, enfantine et lointaine. Et Marta, plus ailleurs aussi mais parfois sans émotion...

— Comme si c’était hier. Tu te souviens, de ton rêve enfant ?

— Voler tel un aigle !

— Et tu t’es écrasé tel une pauvre chose…Sait tu ce que j’ai fait ce terrible soir ?

— Non mon amie. Je t’avais dit ne pas me suivre, de me laisser partir…

— Tu as voulu te briser les ailes, tu as réussi…mais moi ? C’est tu pourquoi j’ai besoin de te voir ? Tu es si loin et proche de moi.

— Parle-moi de tes tourments…je suis en toi.

— J’ai eu tant de choses à te crier mais la colère à parler pour moi. Je me suis noyé, j’ai perdu pied et je ne sais comment je me suis relevée.

— La danse Marta. La danse t’a permis de t’envoler.

— Tu es parti quand ma sœur avait disparu. Tu sais que je l’ai revu ? Enfin, je crois. Depuis mon retour sur cette basse terre, je commence à me souvenir de quelques vies de mon ancienne vie. Mais tu sais, ce n’est pas moi. On me le répète, que je danser comme elle. Marta avait ses projets et à réussit. La nouvelle Marta à encore des projets et ne sais pas si elle va réussir.

— Qu’attend tu de moi ?

Marta arrête son geste et regarde devant elle, les yeux humides. Puis d’une voix plus ferme :

— Toi.

— Je suis là à jamais.

— La mort n’existe pas, c’est juste la fin des signes, les pléiades nous désignent, comprend entre les lignes. Oui c’est ça Eva. Tu es la clef dont j’ai enfin besoin. J’ai chanté et danser pour toi, pour nous, pour lui. Tu te souviens du rêve de ton père ?

— Marcher.

— Oui comme moi. Je ne marche plus alors que lui, ne pouvait plus. J’aimerais danser un jour. On m’a montré comme j’étais et j’en suis jalouse d’elle. J’aimerais savoir ce que ça fait. Ma sœur m’a aidé sans succès. Voilà la clef, c’est toi.

— Que veut-tu faire mon amie ?

— Créer une société d’implantation de puce pour remarcher, redanser, bouger. Eva sera l’acronyme. Veux-tu m’aider ?

— Oui. Je serais toujours là, c’est une bonne idée.

Marta revient à la même place avec sa feuille. On distingue vaguement un bonhomme bâton avec trois cercles et des gribouillis.

— Eva, veut tu porter le nom de mon enfant ?

— Oui.

— Elargir, voguer, aligner les pas pour l’éternité. C’est dur de trouver, je suis seule…

— Jamais seule, sens, ressens autour de toi l’empreinte de leurs espaces. La chute est un échec, se relever une réussite. N’oublie pas. N’oublie pas, n’oublie d’où tu viens, ce que tu es, ce que tu veux devenir.

Sur ces dernières paroles, elle se retourne une autre fois pour coller sa main sur l’écran. On se regarde et s’éloigne vers la piscine pour parler plus tranquillement :

— Je n’ai pas compris grand-chose commence lentement sa mère

— Elle veut crée un projet ambitieux pour la science. Mine de rien, sans connaissance en plus c’est presque impossible.

— Roberto, si elle y tient autant que t’aider dans ta société, moi, je l’encouragerais. Même si, elle n’ira pas au bout si elle change de projet.

— Tu as raison Adela. Cependant, on ne peut être partout. Je m’engage dans quelque chose d’aussi grand, il faudra quelqu’un pour être avec elle si elle s’occupe dans son idée.

— Tu oublie ses vieux parents.

— Désolé Monsieur. Je sais on peut toujours compter sur vous. Bien, on fait quoi ?

— Demain on verra plus clair. On connaît maintenant son mode de fonctionnement. Elle peut ou oublier son projet ou alors s’y tenir effectivement comme dit Adela, quelques jours.

— Maman, moi, je voudrais résoudre son étrange dessin. Je vais aussi lui faire prendre l’air dehors.

Elle s’en va et sa mère se décide à la suivre. Son père se rassoit dehors à la table tout en les observant à travers la bai vitrée. Je l’imite avec ma bière.

— J’ai une idée pour financer son projet m’annonce son père

— Et c’est quoi ?

— Une idée aussi lumineuse que la sienne. Ma fille désirait que vous proposiez des sortes de vidéos à poster sur internet.

— Et ?

— L’argent mon garçon. L’argent. On peut en demander à des gens du monde entier pour récupérer des aides, peut-être de l’Etat ou d’associations aussi.

— Je ne suis pas sûr que ça peut se faire. Mais pourquoi pas. Après je n’ai fais aucun travaux. Ni recherchais des collaborateurs …

— Ne te bile pas pour ça. Si je me connais pas trop en piscine, concernant les travaux, j’ai des bons contacts. Payer ou pas, ça sera entre eux et toi. Où est Marta ?

On se retourne vers Adela nous informent qu’elle commençait à fatiguer. Sa mère l’aide pour le rituel. En patientant, on consulte l’étrange dessin. C’est bien un bonhomme avec un cercle pour la tête, un pour le cœur et un autre pour l’intimité.

On met quelques minutes à lire les mots et c’est sa mère qui réussit à résoudre. Bien que le mystère demeure encore.

— Reprenons alors une nouvelle supposition souffle Adela. On a la tête qui peut être la représentation de sa perte d’identité…

— Comme son cœur ma fille

— Oui papa.

— Les deux sont assez évident sur sa perte de repère mais son intimité ?

— Moi, je pense Monsieur, que ça encore un lien avec son identité. Elle s’est fait plaisir en redécouvrant son corps.

— Et ? Vous savez quoi ? Je vais continuer à y réfléchir demain, sans doute que Carmen aura une vague idée. Et puis, tout cela n’a pas de rapport avec son étrange conversation.

— Etrange est toujours bien le mot exacte. Bien, vous voulez rester manger ?

— On va rentrer si cela te dérange pas. On n’a rien contre toi mais tout cette enquête me fatigue.

— Aucun soucis, je comprends et je le prends pas mal.

— On se tient au courant si Carmen à réussit à résoudre.

— Et moi, pour le hangar.

— Pas de problème, rien ne presse.

Une fois tout le monde partit. Je me fais livrer un burger et je mange devant un petit film sans intérêt. Je m’en vais ensuite dormir jusqu’à que je me réveille en sursaut en ne sentant plus ma copine à trois heures.

La lumière allumé, je prends encore peur en la voyant me fixer comme une poupée dans un film d’horreur. Debout sur son déambulateur, dans sa tenue blanche, le souffle bas. Après avoir repris mes esprits, j’arrive à la faire revenir et la rassurer sur le fantôme Eva, celle du mort qui l’accuse de lui avoir volé son cœur ou encore un autre qui serait en sang dans le lit.

Je lui raconte une histoire puis je me rendors en cuillère. Je dormirais finalement moyennement bien. Je n’ai pas peur des spectres mais de ma copine…

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