Chaleurs et châtiments
La nuit, tous les chats sont gris. C’est ce qu'il se dit, en tous cas, mais moi, je n’y crois pas trop. Comment un chat noir pourrait-il devenir gris ? On dit aussi qu’il ne faut parler que si l’on est sûr que ce que l’on va dire est plus beau que le silence et ça, je suis sûr que les chats s’en fichent comme de leur première régurgitation.
Il est quatre heures du matin et dehors, un minet miaule à s’en briser les cordes vocales. On dirait un bébé à qui on aurait tapé sur un orteil avec un marteau. Un son étrange et terrifiant, tout droit sorti des enfers où le Malin lui-même, dans son peignoir brodé de flammèches dorées, doit se boucher les oreilles.
Je l’imagine, le greffier, perché sur un toit ou un muret, à déclamer à qui veut l’entendre — c’est-à-dire tout le quartier — des mots grossiers comme : j’ai une de ces envies de baiser !
Le visage enfoncé dans mon oreiller, je n’ai pas du tout envie de rire, mais de pleurer, car dans une poignée d’heures je devrai me lever.
Chat hue dans la nuit, chagrin au matin. Et ça, c’est moi qui le dis.
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