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– Nous avons donc là le symbole des Corvus. Comme te l’a dit Ivan, et je partage son sentiment…

– Quoi ?! Tu peux le redire ? s’exalta Ivan.

– Pfff… je suis du même avis que toi. Professionnellement, j’en conviens, tu as des connaissances de base. Il arrive donc que, professionnellement, nous soyons sur la même longueur d’ondes. Satisfait ?

– Peux mieux faire mais c’est un bon début.

– Ouf… donc je reprends : à mon sens, ils ne sont pas juste nommés, je suis sûre que cette pierre a été gravée par un Corvus. En chair et en os, récapitula Éléna.

– Euh, ok, je… réfléchit Ivana.

– Ivana ? En quoi n’ai-je pas été claire ?

– Comment ça juste nommés ? je crois comprendre mais…

– Ta sœur veut dire que ce message fait référence aux Corvus. Mais c’est aussi plus que ça, c’est un Corvus qui l’a rédigé. Pas une peuplade future, pas une tribu annexe, pas des rivaux, non ! Un véritable Corvus s’est tenu là devant cette pierre pour y graver ce message.

– D’accord, c’est ce qui me semblait comprendre.

– Mais c’est plus clair lorsque c'est moi qui apporte les explications, non ?


Ivana jeta un coup d’œil vers Éléna, hésita, tergiversa, pencha pour le compromis :

– Éléna t’a mâché le travail, puis c’est un peu ma faute, j’ai eu un problème de concentration, sinon j’avais le sens, l’idée générale.

– Humm… mauvaise foi…

– Continue Éléna, ne fais plus attention à lui, je suis toute ouïe.

De bonne grâce, Éléna enchaîna :

– Ivan mentionnait une mise en garde, mais plus que ça, pour moi c’est évident, il s’agit de faire attention.

– Euh… là encore l’explication est limpide, donc la nuance ne t’échappera pas, hein, chérie ? la testa Ivan qui, de son côté, ne voyait pas bien la différence.

– Bah oui, ça va, je ne suis pas si sotte, j’ai saisi, j'entends bien que ce n’est pas pareil, ché-ri ! attesta Ivana sans vouloir exposer son propre doute.

– Hein ?! n’en crut pas ses oreilles Ivan. Euh… mais… tu…


Éléna, comprenant que lui ne concevait pas pleinement la subtilité, aurait bien voulu le laisser mariner un peu et aurait aimé l’entendre quémander une explication, mais opta au final pour être directe et avancer, sans digressions, sur la traduction :

– Ivan, une mise en garde suggérerait que quelque chose pourrait arriver, quelque chose de forcément nocif et potentiellement dangereux. Là, nous sommes prévenus de faire attention, faire attention dans le sens où nous devons apprécier les causes et les conséquences de nos actes à venir.

– Euh… c’est… oui, d’accord, continua Ivan, perplexe.

Ivana, le voyant perdu, confus, l'esprit embrouillé, interpréta à son tour – autant pour s’assurer qu’elle comprenait vraiment bien que pour renseigner Ivan – et reformula les paroles d’Éléna :

– Bichon, ici on ne nous prévient pas d’un risque. Il nous est juste dit que ce que nous allons faire, si ce n’est pas bien fait, si nous ne savons pas ce que nous faisons, pourrait se révéler hasardeux.

– Ah… articula-t-il, pas beaucoup plus avancé.

– Fais un effort ! commença à s’énerver Éléna.

– Euh… oui, je… Ok ! se reprit-il, bien décidé à décrypter leurs paroles. Donc, cette première ligne…

– Pas vraiment, le stoppa aussi sec Éléna.

– Hein ? se désespéra-t-il.

– De ton côté, tu as aussi en partie traduit ! Nous sommes donc d’accord, tu le sais tout aussi bien que moi, rassure-moi, que leur écriture est plus en escaliers qu’en lignes ?

– Euh... bien sûr… je… vous m’agacez toutes les deux à la fin ! Ce que je veux dire, c’est que la première phrase du message gravé sur cette pierre… ça te satisfait comme formulation ?

– Pas forcément, mais parlons en phrases si tu veux, lui accorda Éléna.

– Merci ! La première phrase n’est donc pas « attention danger ! » mais « sachez, et ayez conscience, de ce que vous vous apprêtez à faire ». Ai-je tout bon ?

– Oui.

– C’est bien mon amour, le félicita Ivana.

Ivan inclina la tête et resta stoïque deux secondes. Avant de déclarer, un brin acariâtre :

– Est-ce pour vous si difficile de rendre le tout intelligible ?

Éléna s’indigna et prit sa sœur à témoin :

– Ivana, n’ai-je pas été claire dans mes explications ?

– Bah, si, mentit-elle un peu.

– Non ! Ce que vous avez essayé de me dire n’était pas clair du tout ! s’emporta Ivan.

– Pourtant tu as compris, non ? le contra du tac au tac Éléna.

– Oui mais… mais après m’être trituré le cerveau alors que tout aurait pu être expliqué bien plus simplement ! Tu as des problèmes… Non, vous avez des problèmes, vous, toutes les deux, avez de sérieux problèmes à formuler simplement les choses ! conclut-il satisfait et soulagé que ça sorte.

– Oh, excuse-nous, homme supérieur, ton encéphale, décidément, est largement au-dessus de nos capacités linguistiques, s’irrita Ivana.

Ivan fronça les sourcils, inspira profondément par le nez, bouche fermée et joues creusées, et alors qu’il hésitait à répliquer, se contenta d’expirer bruyamment, expulsant ainsi ses véhémences. Il aurait été prêt à s'élancer dans un débat infini sur l'élocution des deux sœurs et sur sa capacité à les écouter – les supporter – puis à les comprendre – les traduire –, mais il opta au final, en parfait accord avec Éléna sans qu'il ne le sut, pour une suite moins digressive :

– On passe à la deuxième phrase ?

– Place à la deuxième ligne ! exulta Éléna, un brin taquine.

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