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Mia

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Alors que nous roulons depuis deux longues heures déjà, je commence à me demander si nous avons bien fait. De tout précipiter sous la menace d'une riposte incertaine de la part de Nodem, de tout tenter pour une victoire hypothétique.

Nous ne sommes pas assez préparés. Je m'en rend compte maintenant, après avoir réfléchi à tout ça durant ces deux heures de trajet. Hier, tout me paraissait bon, car l'adrénaline et le hâte d'être libre me berçait de réussite et d'espoir. Aujourd'hui, et alors que le GPS indique une arrivée dans moins d'une heure trente, je commence vraiment à douter.

La main de Elio se referme sur la mienne, et son regard me balaye le visage.

• Mia, tu as peur, ça se voit.
• J'ai jamais été douée pour... cacher ce genre de chose.
• Ça s'appelle une émotion. Tu as le droit d'utiliser ce mot.
• Je suis désolée, j'aurais dû être de votre côté à Lou et toi hier. J'aurais dû...
• En parlant de Lou, nous coupe Andres à l'avant. Quelqu'un sait pourquoi on vient de m'envoyer le nom de plusieurs chaînes sur lesquelles il est en train d'être diffusé ?

Je déglutis, à la fois surprise et étourdie par ce qu'il vient de dire. Pensant tout d'abord avir mal entendu, je me penche en avant pour m'assurer de ses dires, avande me mordre pensivement la lèvre.

• … quoi ?
• Plusieurs chaînes de télévision et de stations radio.
• Quelle radio ? Pourquoi il...

Pas besoin de lui demander. Il se penche déjà vers le poste de la voiture pour changer les stations, jusqu'à tomber sur la chaîne d'information nationale. Un léger grésillement me tend, avant que le signal ne se stabilise, et que l'impensable n'arrive.

Et à la peur qui me rongeait déjà, s'ajoute la surprise anxieuse de tomber sur la voix de mon ami d'enfance, en train de parler dans un anglais presque parfait.

• … Reborn. Vous connaissez déjà notre histoire, et...
• Monte le son, on entend pas bien derrière, ordonne Elio.

Andres obéit, et je me concentre pour tout comprendre ce que raconte Lou, sans me départir de mon masque figé d'incertitude.

• … aujourd'hui je parle au nom de nous tous. De nous tous, Reborn, victimes, civils aux souhaits bafoués, parents démunis, enfants dans la peur. Je parle au nom de mes amis et moi-même, au nom de la guerre que nous sommes en train de mener. Alors que vous m'écoutez, nous marchons vers Sera, notre ville natale, où se déroulera un rassemblement visant à soulever les foules.
• Mais qu'est-ce qu'il raconte..., je murmure.
• Vous tous qui m'écoutez de part et d'autre du globe, faites la même chose. Ne laissez plus personne vous dicter votre conduite, ne laissez plus personne vous contraindre, vous maltraiter, vous faire du mal. Aujourd'hui, Reborn, défaites-vous de vos chaînes. Civils, rejoignez-nous. Ce monde n'a plus de sens, il nous faut lui en redonner un. Si je parle aujourd'hui c'est pour vous implorer, de nous rejoindre : chaque jour nous mettons nos vies en danger pour que tout redevienne comme avant. Pour que les mensonges et la haine cessent. Je ne veux pas d'un monde où je n'ai plus envie d'évoluer. Je veux cesser de survivre, et seulement... vivre. Nous sommes tous les même, malgré les distinctions que Nodem à pu inclure en notre communauté. Humains, Reborn, la seule différence entre ces deux groupes, est la contrainte. N'oubliez pas ça. Relevez la tête, et avancez à nos côtés. Reprenez votre liberté durement arrachée.

Puis, le message se coupe et reprend au début. Et le même discours reprends, se rediffuse, me fait à nouveau voir trouble.

À quel moment a t-il enregistré ça ? À quel moment a t-il décidé de jouer le tout pour le tout en indiquant au monde une fausse indication nous concernant ? Un rassemblement à Sera, qui de part son côté subversif va alerter les autorités. Un tour de magie. On détourne l'attention du public pour mieux faire marcher le reste. La question est de savoir si Lou a réellement de grands pouvoirs de prestidigitateur. Si il aura le don de aire marcher notre ennemi sur un chemin qui ne mène à rien.

La main de Elio se referme un peu plus sur la mienne. Je sens sa peau sur la mienne, et un instant, je prie pour que Lou ai réussi à nus offrir une ouverture, aussi petite soit-elle.

• Toujours un temps d'avance, je murmure pour moi-même.
• Il est fort. Ou complètement inconscient, mais c'est forcément l'un des deux.

Andres, tourné vers nous, hausse un sourcil évocateur.

• Il est définitivement le plus réfléchi de vous quatre.
• … comme tu dis.

Il a tour prévu : en cas d'échec de notre part, d'autres prendrons le relais. Le combat ne cessera pas, même si nous nous éteignons aujourd'hui. Il a pris une ultime disposition, intimée par sa propre peur de la défaite.

Mes yeux se portent sur ma bague de fiançailles et je réprime un sanglot tandis que ma gorge se noue. C'est fou de voir comme la peur, même après tout ça, arrive encore à me nouer les entrailles.

Il faut que nous gagnions aujourd'hui que nous arrivions à stopper la production, que Lou et Léo parviennent à récupérer les documents et à destituer Nodem. Nous n'avons pas le droit de tant nous être engagés dans une cause qui je l'admets, nous dépasse, si c'est pour tout laisser tomber au dernier moment.

Si seulement nous étions morts à Liberty.

…

La voiture vient de se garer. À proximité de l'usine, tout en s'assurant d'être assez loin pour de potentiels tireurs.

• Ok, je lance en me détachant. Tout le monde est prêt ? Un minimum ?
• A t-on vraiment le choix ?

Je coule un regard à Elio, avant de me penher vers lui pour l'embrasser avec douceur.

Le plan est simple : progresser jusqu'à l'usine, s'y infiltrer, et tout faire sauter de l'intérieur. Pour ce faire, nous disposons de plusieurs sacs à dos contenant le matériel nécessaire à une désintégration totale de l'usine. Il suffira que nous les posions de part et d'autre à l'intérieur des locaux, puis de les enclencher à distance. Sur le papier, ça paraît simple et infaillible. En réalité, des millions e failles sont probables, et je n'arrive pas à penser à autre chose qu'à cette éventualité selon laquelle nous pourrions ne jamais reprendre la route de nos habitations.

Dernière carte à abattre. Dernier coup de maître.

Si tant est que nous maîtrisons encore quelque chose.

Mes lèvres en se détachant de celles de Elio, me laissent un goût glacé dans la bouche. Il doit ressentir la même chose, car ses yeux sont voilés d'une ombre mêlant tristesse et appréhension.

• La majorité de nos hommes sont sur le pied de guerre avec Léo et Lou. Ici, nous sommes peu afin d'avoir une invisibilité de déplacement optimale. C'est pour ça qu'il va falloir être rapide.

Andres ponctue sa tirade d'un sourire assuré, tout en sortant du coffre deux sacs à dos chargés en explosifs et autres bombes à déclenchement différés.

• Je pars sur l'aile nord de l'usine, on reste en contact.
• Tu pars tout seul ? s'étonne Elio en lui attrapant la manche.

Andres hoche la tête, avant d'inspirer par le nez, et de se tourner vers moi. Ses yeux me balayent une dernière fois, et j’arrive à capter, au fond de son regard, une étincelle se remettre à briller. Ses sourcils se froncent, et il me dégage le visage d’une mèche rebelle.

• Soyez prudents, nous demande t-il avant de partir en courant suivi par deux de ses hommes.

Nous le regardons partir, avant d'à notre tour, prendre la direction de l'usine, sans plus nous attarder sur le risque et les probabilités de réussite ou d'échec de cette mission. Il va nous falloir agir sans penser aux conséquences, sinon nous n'arriverons à rien.

Il va nous falloir avancer sans regarder en arrière, ce que nous laissons derrière nous, ou le sentimental et la peur prendra le pas sur la détermination et l'optimisation.

Elio m'attrape la main et me tire en avant, et en un clin d’œil, je me retrouve plongée en immersion totale dans l'adrénaline et l'empressement.