chapitre 6 :
Au réveil, je sentis le pied d’Octavia chatouiller mon nez.
- Bouge ton gros pied de sur ma tête !
- Si tu bouges ton bras !
La position dans laquelle nous nous trouvâmes n’avait rien de géométrique, et nous prîmes deux bonnes minutes à nous en extirper.
- Alors, déclara-t-elle tandis qu’elle tentait de mettre de l’ordre dans ses cheveux, qu’est-ce qu’on fait ?
- On évite Charles. Pour toujours.
- Ok.
Sur cette bonne résolution, nous descendîmes prendre notre petit déjeuner. Ma mère avait préparé un véritable buffet.
- Tu devrais prendre un truc.
- Non merci, j’ai pas faim.
Octavia ne mangeait jamais le matin. Jamais. Je savais au fond de moi que je ne parviendrais pas à la convaincre, mais ma conscience amicale m’avait tout de même poussée à essayer.
- Tu dois prendre un petit déjeuner, si non tu vas encore avoir des vertiges.
- Et toi tu dois aller parler à Charles.
Je me retournai d’un coup.
- Tu vois, on fait pas toujours ce qu’on devrait faire.
- Pétasse.
Ne voyant pas l’intérêt d’en répondre davantage, je me servis un bol de Trésors et la suivit sur la terrasse.
- J’avais tellement faim !
J’approchai la cuillère de ma bouche, et Octavia se mit à siffler :
- Vooooooum, l’avion entre dans l’aéroport !
- T’es insupportable.
Alors que nous étions assises contre un mur de pierres, je ne pouvais m’empêcher de penser à cette soirée affreuse. J’y pensais encore quand sa mère vint la chercher, et j’y pensais toujours quand elle fut partie. Cette nuit-ci non plus, je ne parvins pas à dormir.
Lundi sonna avant que les sept heures n’aient eu le temps de passer. Mathéo faisait déjà du bruit dans la cuisine, cherchant sûrement comment faire chauffer du lait.
- Il faut appuyer sur le bouton « On », lui dis-je, les yeux trop fermés pour voir où j’allais.
- Il faut dormir la nuit, rétorqua-t-il. Si Tiana te voit, elle va faire des cauchemars jusqu’à ses dix ans.
- Très drôle.
Tiana, c’était notre petite sœur, la dernière arrivée de la famille. Elle n’atteignait pas encore mon genou, mais je l’aimais déjà bien plus que je ne pouvais supporter la montagne qui me servait de frère.
Mathéo était grand, bien plus grand que moi, et il semblait avoir récupéré en héritage toute la musculature que pouvait offrir nos parents. C’était le capitaine de l’équipe de basket du lycée, le gars que toutes les filles rêvaient d’embrasser. C’était aussi le meilleur ami de Nathan, et l’idée qu’il puisse apprendre pour ce qu'il s’était passé avec Octavia instaura un malaise dont je n’avais pas besoin.
- Ça te dit qu’on parte en voiture ce matin ? ça t’évitera de croiser cet imbécile qui te colle dans le bus.
- Il s’appelle Ivan, mais c’est pas de refus.
Je retire ce que j’ai dit, la montagne pouvait parfois avoir un côté gentil. Parfois.
Nous arrivâmes au lycée bien plus vite que d’ordinaire, Nathan et Octavia nous attendait.
- Wow Eléonore, comment t’as fait ?
- Fait quoi ?
- Être encore plus moche que d’habitude !
Nathan sourit tandis que j’entrainais mon majeur à une valse insultante.
- Connasse.
Octavia et moi étions comme cela, on s’insultait pour se prouver notre amour. Les gens nous trouvaient étranges, et nous emmerdions les gens.
- Au fait les filles, déclara Mathéo quand nous franchîmes le portail, vous serez là ce soir, pour le match ?
Je n’avais qu’une envie, dormir. Mais nous faisions partie de l’équipe de pompom girls, alors je n’avais pas vraiment le choix. Il y a deux ans de cela, jamais je n’aurais cru pouvoir entrer dans une équipe comme celle des pompom girls mais Octavia m’y avait poussé, et je l’ai fait. Désormais, ma vie ressemblait à un cliché américain. Etrangement, ça me plaisait. Ou du moins, ça me plaisait avant que le beau brun ténébreux ne fasse son apparition.
- Super, s’exclama Nathan.
- Au fait, c’est qu’elle équipe que vous affrontez ?
- Celle de Blackwood, le lycée de Charles.
Putain.
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