Premières neiges
Un mois s'est écoulé depuis.
En me réveillant ce matin de Décembre, je constate avec joie que le paysage est recouvert d'une couche de neige blanche ! Je me dépêche alors d'enfiler mon uniforme scolaire d'hiver, celui contenant des collants blancs et une veste doublée de fourrure, avant de peigner mes longs cheveux châtains pour les laisser tomber sur mes épaules.
J'attrape mon cartable blanc et me précipite jusqu'à la cuisine afin d'y récupérer mon bentô, ma boite à déjeuner, préparée soigneusement par maman ce matin-même. Cette dernière remarque :
- Tu as l'air particulièrement pressée, aujourd'hui.
- Oui, il neige enfin ! Je veux en profiter au maximum !
- Tu n'as même pas pris le temps de manger !
- Oh, ça va, je n'ai pas faim, je mangerai à midi.
- Yoko . . .
- Allez, à tout à l'heure !
Je dépose un baiser sur sa joue et m'eclipse bien vite.
*
En ouvrant la porte de l'immeuble, je prends une grande inspiration afin d'emplir mes poumons de cet air froid. Ensuite, j'avance tranquillement, pas à pas, afin de profiter du son que font les flocons de neige lorsqu'ils craquent sous mes pieds. C'est un de mes bruits favoris !
Je marche ainsi jusqu'à l'école, prête pour une nouvelle journée de cours et, surtout, impatiente de retrouver Naoki à seize heures !
*
J'ouvre la porte du club de littérature à la volée, en lançant, comme à mon habitude, un joyeux : "Bonjour !".
Quelques membres du club me rendent mon salut. Je me mets alors à chercher Naoki des yeux et le vois bientôt, un livre à la main, en pleine conversation avec une grande fille aux longs cheveux blonds et bouclés.
Ils semblent si plongés dans leur discussion que je n'ose les interrompre. Alors je reste là, debout à quelques mètres d'eux, à attendre qu'ils terminent enfin.
Il faut plusieurs minutes à Naoki pour tourner la tête et me remarquer. Il se dirige alors vers moi et me salue :
- Bonjour, Yoko. Comment est-ce que tu vas ?
- Bien, dis-je en le tirant par le bras, mais ce ne sera pas le cas de notre histoire si on l'abandonne ! Allez, viens ! On a encore plusieurs chapitres à écrire, déclaré-je en l'entrainant derrière moi.
Il me suit, perplexe, mais n'oppose aucune résistance.
*
À dix-huit heures, nous quittons ensemble le lycée, comme à notre habitude. La neige craque sous nos pieds tandis que nous avançons dans la rue.
Naoki marche un peu devant moi, réfugiant ses mains du froid mordant en les cachant dans les poches de son manteau.
Il ressent alors soudainement quelque chose de froid le percuter à l'arrière du crâne ! Il se retourne pour me voir, une boule de neige à la main. Je la lance sur lui et il l'esquive en rétorquant :
- Arrête, Yoko ! Ce n'est pas drôle !
- Si, ça l'est !
- Non !
- Et bien, quoiqu'il en soit, la guerre est déclarée ! Si tu veux qu'elle s'arrête, tu dois la gagner !
Je conclue ma déclaration en lui envoyant une énorme boule de neige ! C'est alors qu'il riposte en m'en lançant une en retour et une joyeuse bataille s'en suit !
Nous courons partout en riant aux éclats jusqu'à ce que je finisse par trébucher et tomber au sol ! Épuisée, je ne trouve pas la force de me relever tout de suite et commence donc à agiter mes bras et mes jambes pour faire un ange de neige. Naoki s'agenouille près de moi pour me demander :
- Ça va ? Tu ne t'es pas fait mal ?
- Non, ça va. C'était amusant, n'est-ce pas ?
- Oui, je l'admets, dit-il en souriant.
- Tu vois ? C'est pour cela que tu dois rester en vie ! Si tu te suicides, tu ne pourras plus jamais t'amuser dans la neige avec moi !
- C'est vrai, mais cet argument n'est pas suffisant pour me faire changer d'avis, désolé.
La conversation commençant à devenir déprimante, je change bien vite de sujet :
- On devrait recommencer demain, mais en mieux ! On construira chacun une petite forteresse de neige et on devra faire tomber la base ennemie. Les boules de neige seront nos missiles. Qu'en dis-tu ? On se rend au parc demain après l'école ?
- Si tu veux, répond-t-il.
Après quelques secondes, il propose :
- On pourrait inviter Imaé à nous rejoindre.
- Qui ?
- Imaé. C'est une fille du club de littérature. Elle aussi a découvert que je veux me suicider et s'est mis en tête de me sauver, comme toi.
- Est-ce que, par hasard, ce ne serait pas la blonde avec qui tu discutais tout à l'heure ?
- Exactement. Alors ? Tu es d'accord pour qu'elle vienne avec nous ?
- Hmmm . . . Si tu veux, dis-je en détournant la tête. Bon, dépêchons-nous de rentrer avant de prendre froid !
Je me lève et continue ma progression dans la rue, sous la lumière des lampadaires. Naoki se lève et m'emboite le pas.
Pour la première fois, c'est moi qui nous ai poussés à rentrer.
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