Serment
Nos yeux s'écarquillent d'horreur tandis que l'homme qui me retient sort de sa poche un poignard ! La lame métallique scintille sous les rayons du soleil.
Il approche l'arme de ma gorge. Je ferme les yeux, absolument terrifiée ! J'entends Naoki crier mon nom :
- Yoko !
Son cri est suivi d'aboiements. Interloquée, j'ouvre les yeux pour voir arriver . . . Aka ! L'animal s'approche de nous en courant.
Il se jette sur mon agresseur pour le mordre au bras ! L'homme lâche son arme et hurlement de douleur !
Il faut quelques secondes à son complice pour se remettre de sa surprise et aller le secourir, mais ce sont quelques secondes de trop pour lui : Naoki réagit plus vite en envoyant un puissant coup de poing dans son ventre. La douleur et la surprise font lâcher prise à l'homme et mon ami en profite pour ramasser le poignard qui traine à terre.
En passant près de moi, il m'attrape par le poignet en m'ordonnant :
- Cours et ne t'arrête sourtout pas !
J'obtempère. De toute façon, je n'ai pas vraiment d'autre choix puisqu'il me tient toujours fermement par le poignet, m'entrainant derrière lui.
Après nous être éloignés d'une dizaine de mètres, il siffle et appelle :
- Aka ! Au pied !
Son chien obéit. Il ne lui faut que quelques secondes pour nous rejoindre. Il se met alors à courir à nos côtés.
Naoki déclare alors :
- Ils ne tarderont pas à se mettre à nos trousses. L'entrée de la forêt est encore trop loin, nous ne pourrons jamais la rejoindre d'une traite à ce rythme. Il faut qu'on se cache, le temps qu'ils quittent cette zone.
Je regarde partout autour de nous, cherchant des yeux une bonne cachette. J'en remarque bientôt une : une crevasse sous un vieux tronc renversé. Je freine alors brusquement, obligeant Naoki à s'arrêter. Le jeune brun se tourne vers moi et j'en profite pour lui montrer ma trouvaille du doigt :
- Ici.
Nous nous précipitions vers le tronc d'arbre et nous glissons en-dessous pour aterrir dans la crevasse. En nous y allongeant, impossible qu'on nous voit, à moins de baisser les yeux. Naoki attrape Aka par son collier, pour l'empêcher de bondir vers nos agresseurs lorsqu'ils arriveront.
Le chien semble avoir très bien compris : il s'allonge et ne fait plus le moindre bruit.
Après seulement quelques secondes d'attente, nous les entendons approcher. L'un deux peste :
- Ces sales gosses ! Si je les attrape, eux et leur maudit cabot, je les tuerai !
- Encore faut-il leur mettre la main dessus. Où sont-ils ?
- Ce ne sont que des gamins, ils n'ont pas pu aller bien loin. Courons encore, nous finirons bien par les rattraper.
Ils repartent de plus belle.
Je pousse alors un soupir de soulagement, remerciant tous les dieux qu'ils ne se soient pas attardés pour chercher dans le secteur.
Nous attendons cependant encore de longues minutes, afin d'être sûrs de ne pas retomber sur eux en chemin.
Ce n'est qu'alors que Naoki déclare :
- C'est bon, nous pouvons y aller. Rentrons le plus vite possible, mais surtout, restons prudents. Ils sont peut-être encore dans la forêt.
J'acquiesce. Nous nous relevons et sortons de notre cachette. Aka hume l'air, puis s'assied tranquillement, langue pendante et queue agitée. Mon ami traduit son comportement :
- Il a retrouvé son calme. Cela veut dire qu'il n'y a aucun danger proche.
Je m'agenouille pour serrer le chien dans mes bras en m'exclamant :
- Heureusement que tu étais là, Aka ! Sans toi nous étions perdus !
- Oui, merci beaucoup, Aka, dit Naoki en caressant chaleureusement son animal.
Nous reprenons ensuite notre marche. Il nous faut plusieurs heures pour quitter la forêt. Des heures d'angoisse car nous craignons à tout instant de tomber nez à nez avec les deux trafiquants.
Heureusement, cela ne se produit pas et nous atteignons l'entrée de la forêt sains et saufs. Le soleil est alors en train de se coucher, teintant le ciel d'orangé.
Ce n'est qu'à ce moment que nous nous arrêtons enfin. Naoki s'assied sur un rocher en poussant un long soupir de soulagement :
- C'est bon, nous sommes hors de danger.
- Oui, et c'est non seulement grâce à Aka, mais aussi à toi, qui a su garder ton sang-froid et réagir comme il fallait. Merci, Naoki ! Tu nous as sauvés !
- Oh, c'est normal, ne me remercie pas . . .
- Si, tu le mérites !
- Hmmm . . . Si tu le dis . . . De toute façon, je suis beaucoup trop fatigué pour rétorquer, alors tu peux affirmer ce que tu veux, ça m'est égal.
- Je peux même affirmer que tu ne te suicideras pas ?
- Tu peux l'affirmer si tu veux, mais ça n'empêchera pas le contraire. En plus, ce qui vient de se passer aujourd'hui est une raison supplémentaire de me donner la mort.
- Tu viens d'échapper à la mort pour te la donner toi-même ? dis-je, en levant un sourcil, interloquée.
- Je t'ai déjà dit que je ne veux pas que ce soit quelqu'un d'autre que moi qui me tue. Ce qui vient de se passer aujourd'hui prouve la cruauté de ce monde et de ses habitants ! Il est hors de question que je reste dans un endroit où des hommes n'hésitent pas à tuer des mineurs juste pour de l'argent !
- Je comprends ton indignation et la partage, mais nous venons aussi de prouver qu'ensemble, nous pouvons surmonter tout cela !
Je lui tends alors ma main pour lui dire :
- Voilà donc ce que je te propose : Plutôt que de te suicider, faisons le serment de toujours rester aux côtés l'un de l'autre afin d'affronter et surmonter ensemble la cruauté de ce monde et toutes les épreuves à venir !
Naoki plonge ses yeux bleus dans les miens pendant de longues secondes, à l'issue desquelles il soupire :
- Bon, d'accord. Je promets de ne pas me suicider tant que tu resteras à mes côtés, mais c'est uniquement parce que je ne veux pas te laisser seule face à ce monde impitoyable alors que tu es à mes côtés, ce serait ingrat.
Mon visage s'illumine d'un grand sourire et je m'exclame :
- Merci, Naoki !
- C'est bon, n'en fais pas tout un tas, on a compris. Allez, viens, nous devons rentrer. Aka et moi allons te raccompagner.
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